Sidney Lumet et Al Pacino.
Sur le papier rien à redire, je suis rentré dans le film confiant.
Le verdict final est un peu plus mitigé, et a de sacrés relents de Donnie Brasco (en changeant simplement le camp où se déroule l'infiltration).
Ce n'est pas un gage de mauvaise qualité, simplement une pensée sachant que j'ai vu l'autre récemment.

Al Pacino campe parfaitement son rôle, transpirant la frustration et la peur palpables.
Son personnage tourne rapidement en rond justement, se nourrissant de cet enfermement pour nourrir la frustration sus-nommée, mais laissant dans le même temps le spectateur quelque peu sur sa faim.
C'est d'autant plus dommageable que les personnages secondaires changent beaucoup et rapidement.
C'est inhérent à l'histoire, je ne vois rien à y redire, mais cela conduit de facto à faire reposer une énorme partie de l'intérêt du film sur les épaules de Pacino. Heureusement qu'il a la carrure pour.

De la même façon, je pense que le film n'aurait pas souffert de se voir amputé d'une ou deux dizaines de minutes.
Le rythme, dolent, un peu pesant, n'aurait guère pâti d'un format 90 minutes, alors qu'ici on se trouve confronté à quelques longueurs difficilement excusables pour quelqu'un comme Lumet, et difficilement justifiables même si elles trouvent à l'extrême limite leur sens dans l'intention de nous faire partager l'insupportable attente de Serpico, confronté à la loi du silence tenue par ses collègues et sa hiérarchie.

Côté réalisation on note quelques plans-séquences agréables, des prises caméra à l'épaule qui collent bien à l'action, mais sur la globalité ces spécificités restent du domaine de l'anecdotique.
Ce n'est en rien un reproche.
Je suis convaincu que l'approche très académique est d'une part fermement attachée à la personnalité de Lumet, et permet en outre de focaliser l'attention sur son propos, la dénonciation d'un système intégralement et quasi-irrémédiablement gangréné, de l'intérieur qui plus est.

De ce point de vue la réussite est totale.
Serpico est un film noir, pessimiste dans sa très grande majorité, cynique et froidement lucide à la fois.

C'est à ne pas manquer, même si l'on est bien loin de la maîtrise vue sur Douze hommes en colère (ma seule autre expérience avec Sidney à ce jour, mais je promets d'y travailler).
SeigneurAo
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le 12 mai 2012

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SeigneurAo

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