Elle est si belle. En elle et du dehors. En dedans et en dehors. Mais pour le voir, il faut la regarder et l'écouter. Ecouter son regard que lui prête Damla Sönmez et comprendre son langage sifflé car elle est muette depuis l'âge de cinq ans.
Sibel est une jeune femme qui vit avec son père veuf, chef du village et sa sœur cadette. Cela se passe en Turquie dans une région montagneuse qui surplombe la Mer Noire. Sibel siffle. Elle siffle ses joies et ses peines, elle siffle ses questions et ses réponses, elle siffle son affection et ses envies. Quand Sibel ne travaille pas aux champs avec les femmes du village, elle court la montagne et les bois avec son fusil pour essayer de piéger un loup qui rôde autour du village et entretenir son amitié avec la vieille Narin, un peu folle, qui vit seule dans l'isolement le plus total en attendant le retour de son bien-aimé.
La communauté villageoise est doublement enfermée. Elle est enfermée dans ses traditions ancestrales faites de coutumes immuables, de superstitions et d'exclusions pour garantir la pureté et la perpétuation des traditions. Sibel, la muette porte malheur. Sibel, la coureuse des bois est porteuse d'une inquiétante liberté. Sibel est porteuse du pire, elle côtoie la folle de la montagne et maintenant fréquente secrètement un homme qu'elle voit dans les bois et, circonstance aggravante, qui est un hors-la-loi. Sibel est la transgressive que son père couvre d'affection et protège. Elle apparaît de ce fait et peu à peu comme une espèce de lueur dans la nuit.
Sibel affiche cette liberté à laquelle elle tient mais recherche simultanément l'affection et la reconnaissance de la communauté. Le loup qu'elle pourchasse est un danger pour les habitants qui se tiennent éloignés des montagnes et même du Rocher de la Mariée qui est un lieu de rassemblement des jeunes femmes du village à la veille du mariage de l'une d'entre elles. Piéger le loup et le neutraliser permettrait de mettre fin à la menace, de permettre à la vie de suivre son cours mais également de gagner la reconnaissance du village.
Le loup invisible sans doute inexistant prendra corps ou plutôt deviendra pour Sibel ossements épars dans les sous-bois. Ali, le hors-la-loi la ramène à la réalité : ce ne sont pas des ossements de loup mais ceux d'un être humain qu'un carnassier de la forêt a éparpillés.
Etrangement, je ne me souviens pas vraiment comment l'histoire se termine et je me suis dit qu'au fond c'est une excellente chose car elle n'a pas besoin de fin ou tout simplement parce que je ne veux pas qu'elle se termine.