Tout le monde ne sait pas qu'il y a quatre Spy Kids; on s'arrête la plupart du temps au troisième, le laideron de 3D douteuse, surement l'opus le plus culte de la saga (pour de bonnes et de mauvaises raisons). S'il est souvent oublié, ce n'est pas pour rien; quand on voit les égarements de Rodriguez, qui s'est vu sombrer dans un bordel d'imagination à mesure qu'il nous pondait de nouveaux opus, logique que le moins rentable de la série, et le plus tardif n'ait pas fait grand bruit.


C'est au final au moins aussi mauvais que le troisième épisode, si ce n'est encore plus nanardesque; nous y viendrons, mais la gestion de la métaphore filée sur le temps est proprement grotesque. Dès l'introduction, c'est un malaise intense qui s'offre à nous : entre des acteurs à la ramasse, une mise en scène qui n'a plus de sens et la modification de voix d'un méchant uniquement faîte pour le rendre plus cartoon, on finit la main sur le visage, frustré, abasourdi par tant de laideur et de bêtise.


Bien entendu, All the Time in the World s'enfonce toujours plus dans sa merde : ce qu'il prend pour une offre d'imagination et de rêverie n'est en fait qu'un bordel infâme, visuellement douteux, mal écrit, mal géré et peu cohérent avec un univers comique déjà casse-gueule; l'organisation des OSS qui ne contrôle pas psychologiquement ses candidats aurait pu nous éviter l'arrivée du nouveau méchant, maître du temps, dont la découverte finale ne tenait qu'à un regard sur son passé, pour comprendre ses motivations, tenter de le rendre un peu moins manichéen et le démasquer en 5 minutes de film.


Surtout, on n'aurait pas eu droit à ses insupportables tirades sur le temps; quand Rodriguez tente d'être un grand dramaturge, c'est aussi comique qu'attristant. On le voit qui se débat dans la mélasse de ses dialogues peu inspirés, navrants de naïveté, insipides et portés par des répliques toutes faîtes toujours plus stéréotypées, quand les gosses ne décident pas de les clamer sourire colgate aux lèvres, regard caméra et clin d'oeil furtif (on a échappé de peu à la pub de Yaourt américain; heureusement ne font-il pas vraiment de clin d'oeil).


Deux acteurs qui, censés reprendre le flambeau des deux symboles d'une génération en quête d'idoles de son âge, réussissent le terrible exploit d'encore plus mal jouer que les originaux, qui quand on les recroise au détour de quelque caméo, prouvent qu'on peut vieillir sans avoir plus de talent, et devenir has been à moins de trente ans. Et donc, après avoir fait rire pendant de longues séquences, Spy Kids : All the Time in the World refoule la nostalgie mal placée, et rentre dans une logique profondément pathétique (dans le sens attristant).


Complètement dépassé par les nouvelles productions Disney/Pixar/Dreamworks/... qui font bien mieux en animation et avec une meilleure imagination (surtout condensée et mieux dirigée), il tente de réunir ce qui faisait le succès des premiers pour garder leur patte, en y ajoutant de nouveaux éléments, de nouveaux codes et rafraîchir, du moins l'espérait-il, une saga en perte de vitesse. Cette passation de pouvoir entre les jeunes et les anciens en atteste et dévoile aussi ce qui n'y va pas : à trop vouloir en faire, on tombe dans le peu sincère, dans un faux spectaculaire mal géré, mal dosé.


Le problème venant ici de l'humour, le surplus que Rodriguez a tenté d'amener ne fait que le rendre plus nanardesque, ridicule, sans qu'on ne puisse jamais ni prendre au sérieux son travail, ni trouver de véritable qualité à son film (parce que refaire Home Alone en mode Fils du Mask pendant vingt bonnes minutes, c'est assez insupportable et c'est la preuve d'une paresse scénaristique imblairable).


On en sort interloqué, un peu perdu, je vous avoue; voir un chien parler (avec un regard de psychopathe), s'apercevoir que les méchants sont les clones d'une même personne (même celui avec sa voix aigüe) et que leur arc se boucle sur une morale affligeante (laissons le temps au temps, aimons notre famille) alors que leur dirigeant se baladait avec un masque d'horloge sur la gueule (un masque que t'achèterai à la foire/fouille pour Halloween); se rendre compte aussi que Jessica Alba n'est décidément pas bonne pour jouer dans tous les Rodriguez, et que c'est le grotesque Joel McHale qui remplace le charismatique Antonio Banderas, tout cela a quelque chose de profondément traumatisant.


Comprenez la douleur que j'ai ressentie au visionnage, et ne vous l'infligez pas, s'il vous plaît. C'est laid, mauvais, certes drôle en tant que nanar, mais attristant si l'on s'intéresse aussi au fond. La fin d'une époque? D'un côté, c'est une bonne chose de faîte.

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le 4 mai 2019

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FloBerne

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