Star Wars s'achève, comme l'ambition inespérée de Disney de vouloir révolutionner cette saga légendaire si convoitée. Star Wars est, et restera, un vivier de l’imaginaire; une prouesse numérique, un opéra cosmique et une source d’inspiration pour les générations à venir, mais on préférera cependant oublier les 3 derniers films: Le réveil de la force, le dernier jedi et l’ascension de Skywalker. La « disneylogie » des cinq dernières années prouve à elle toute seule l’incapacité des majors, et tout particulièrement de Kathleen Kennedy, la nouvelle PDG de Lucasfilm, à perpétuer l’héritage laissé par George Lucas après la Revanche des Sith.


Star Wars 9 est un échec. Non seulement dans les limites du film stricto sensu, mais aussi parcequ’il s’inscrit dans la continuité de 2 films incohérents et bâclés. Le problème principal est l’absence d’un arc narratif précis, réfléchi et délimité. La timeline est disproportionnée et ne permet pas aux spectateurs de constater l’évolution de la Rébellion. Cette même rébellion qui est victorieuse dans le 6, affaiblie dans le 7 est de nouveau réduite au quasi-néant à la fin du 8.
Autant le dire tout de suite : ce scénario en lame de scie est plus épuisant à comprendre qu’excitant à regarder.


Mais allons-y, le ton est donné : C’est une nouvelle fois la fin du monde dans notre galaxie lointaine, très lointaine et cette fois-ci il y a un compte à rebours comme un vrai film d’espionnage. L’heure n’est plus à l’originalité, mais à la productivité, l’intrigue se veut rapide, simple et sans chichi. Elle s’articule comme un jeu de piste où trouver un objet t’apportera un indice pour progresser dans l’aventure.
Il n’y a donc aucune prise de risque, aucun événement surprenant, si ce n’est des éléments faussement inattendus.
La grande bataille finale que l’on nous avait promise est en tout point similaire à celle du 6 : une partie de l’infanterie rebelle dans un raid spatial, l’autre au « sabre laser » face au grand méchant.
Il faut réparer les incohérences laissées par Rian Johnson dans son fiasco précédent et terminer dans les temps de l’impératrice Kennedy après le départ de Colin Trevorrow, réalisateur déchu pressenti pour diriger le 9. Mais tout était prévu nous garantit la PDG !


En solution de repli, les studios Disney vont user d’un bon nombre de facilités scénaristiques. La plus flagrante est le retour de Palpatine annoncé comme une fleur en opening du film. Il n’apporte ni profonde surprise ni nuance subtile au final de la Saga. Il incarne cette vision très manichéenne dont Georges Lucas a souhaité se détacher en développant l’univers étendu de la Prélogie et de la série The Clone Wars. Mais surtout il revient sur ce que nous connaissons déjà : le même personnage utilisé depuis 42 ans ! Et cela ne nous ravive pas la flamme de la nostalgie.


Aux facilités scénaristiques grotesques, J.J. Abrams aura décidé de nous faire vivre un film à l’allure d’un shinkansen où le spectateur n’a pas le temps de digérer les informations reçues. Il faut aller vite, c’est la nouvelle cadence de Disney. À nous donc de comprendre une suite logique aux éléments contradictoires du 8 et du 9. Quand le 8 faisait du sur place dans plus de 40 min dans l’espace, le 9 lui n’a pas le temps, et cela se ressent dans le développement des personnages.
De nombreux personnages secondaires tout d’abord, ont été tout simplement éliminé ou oublié, on pense par exemple à Rose ou au Général Hux. D’autres font leurs apparitions aux mauvais moments : Jannah ou Zorri Bliss, qui alourdissent l’histoire déjà suffisamment chargée. Quant aux personnages principaux, leurs histoires ne sont pas assumées : l’évolution des sentiments de Finn envers Rey est catastrophique, la prise de responsabilité de Poe Dameron le rend plus insolent et Kylo Ren aura échoué à être notre révélation Sith des 3 épisodes.


Attardons-nous tout d’abord sur Kylo Ren. L’écriture de ce personnage est pauvre et mal écrite, sa succession d’échecs face à Rey l’humilie plus qu’il ne l’honore, son manque d’entraînement, son manque de contrôle que nous aurions dû voir évoluer depuis le 7 ! L’idée des chevaliers de Ren aurait pu être intéressante si elle avait été approfondie et améliorée dans leurs techniques de combat. On se rappelle d’exemples notoires : la garde rapprochée de Grievious, des clones d’élite de la République ou des fils de Dathomir dans l’Univers Legends.
On comprend que Kylo Ren cherche son identité et essaye de trouver sa place face à l’héritage familial lourd à porter, cependant était-ce nécessaire encore une fois de ressortir le masque de Vador ? Sa timide évolution finale n’est PAS une émancipation de son passé, c’est une nouvelle facilité. Quand Johnson avait décidé d’en finir avec le masque, Abrams décide symboliquement de le lui remettre et le cantonne à l’ombre pathétique d’un personnage qui aurait pu incarner quelque chose d’encore plus grand.
Quant au personnage de Rey, le 9 veut nous donner les clés de son passé. Tel Luke à Dagobah faisant face à son père, Rey fait face à son double maléfique dans les vestiges de l’étoile noire. On effleure donc du doigt l’idée que Rey pourrait être sith, et cette idée est séduisante, car la dimension tragique s’en verrait renforcée. Mais le basculement vers le côté obscur ne se fait pas en si peu de temps. C’est une descente aux enfers qui ne doit pas être prise à la légère. L’idée trop ambitieuse est finalement abandonnée pour des doutes, des doutes et encore des doutes tout au long du film. Un questionnement redondant et ennuyeux, qui prend toute la place sur de vrais entraînements au sabre laser, digne d’un chevalier jedi.
Après 12 ans d’attentes depuis la bataille de Mustafar, Disney nous aura donné 3 combats et demi au sabre laser avec des manches aussi gros que des arbres. Une technique de combat inexistante sans souplesse et esthétisme de mouvement et sans rapidité des échanges. L’image symbolique du sabre est souillée, jetée puis brisée dans le 8, pour refaire surface dans le 9. Ce même sabre utilisé respectivement dans le 3, 4, 5, 7, 8 et 9, laisse place à celui de Leia, il était temps de mettre un peu de renouveau.


Pour palier face au développement approximatif et incomplet, tout est misé sur la Force. Il faut le reconnaître, jamais, dans aucun épisode de Star Wars, la Force n’aura été aussi présente. Mais encore une fois, le manque de temps et de finesse, donne une sensation précipitée à son utilisation. Par exemple, le don « inné » de Rey, pour les éclairs et de la guérison n’a pas été suffisamment bien préparé et est peu convaincant. Puis l’ambiance mystique d’Exegol est tournée à son ridicule avec une exagération déconcertante de cette pseudo cérémonie sith.
La dyade dans la force, point visuellement esthétique, entre Kylo et Rey aurait pu être mieux exploitée si elle n’avait pas été hachée et réduite à de courtes interactions timides. Même si l’idée était bonne, elle n’apporte pas énormément de valeur ajoutée à l’histoire globale, elle réduit le champ de vision du spectateur aux deux mêmes personnes et nous réchauffe au micro-ondes une histoire d’amour toxique qui n’a rien à faire là.


Enfin donc, Star Wars 9 a tout misé sur le pathos des sentiments, et c’est étouffant. C’est un peu près la même sensation qu’une indigestion de Paris-Brest : ça nous dégoûte à force d’en voir et d’en entendre parler. Je vous épargne la myriade de déclarations sur le pouvoir de l’amitié, la force de l’unité et la famille de coeur que l’on choisit. Ne vous y trompez pas, le problème ne réside pas dans les propos en eux-mêmes, mais dans leurs mises en scène exagérée et omniprésente à chaque hésitation des personnages. Leurs conséquences sont contre-productives pour le film : cela alourdit les dialogues, désamorce la sensation de suspense, ralentit l’intrigue générale et infantilise les personnages et les spectateurs qui se voient prendre par la main par notre bien penseuse Kathleen Kennedy.
Car c’est bien cela que Walt Disney a fait : un film pour enfant. On ne s’adresse plus aux fans, on oublie celles et ceux qui ont fait vivre Star Wars pendant tout ce temps, on s’adresse à un public jeune, une cible marketing facile et non exigeante, rapidement impressionnable. Pour cela nous sommes servis en effets spéciaux, visuels et sonores très confortables dans un budget de 275 millions de dollars, mais aux dépens d’une vraie création artistique et d’un travail de fond effectué dans la durée.


Rick McCallum, producteur de la prélogie disait que la musique parle d’elle même, qu’elle raconte Star Wars sans que l’on ait besoin d’écouter les dialogues. Dans ce dernier épisode même la musique a perdu de sa brillance et de son originalité. On ne reconnaîtra que le thème de Rey et de la Force répété inlassablement. Ainsi ici, et c’est bien vrai, Star Wars 9 n’a plus rien à raconter.

Asro
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le 2 févr. 2020

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