je vais pas me taire parce que t'as mal aux yeux

Paul Verhoeven est vraiment un cinéaste qui met mal à l'aise, l'esthétique qu'il promène de film en film voyeuriste, vulgaire et violente fait toujours un peu mal aux yeux. Cependant comme Patrick Bruel dans "casser la voix"(pour évoquer quelqu'un qui fait mal aux oreilles sans être pour autant aussi intéressant), ce n'est certainement pas une raison de ne pas en parler. Au contraire; qu'il se vautre dans la vulgarité la plus effarante (showgirls), dans le brulot sécuritaire/antisécuritaire (robocop) ou ici dans la farce militariste/antimilitariste; ce monsieur à l'art de mettre mal à l'aise, d'exprimer une vision sordide de l'humanité et de nous y faire adhérer.
Ici une humanité pourtant déjà largement décérébrée lutte pour ne pas se faire aspirer le cerveau par des vers géants ou découper en rondelles par des araignées géantes. Attention, comme d'habitude Verhoeven n'épargne rien à son spectateur, tous les clichés du teen movie, du film de guerre, du film d'extra terrestre, du film sportif et du film antifasciste sont là: et va z y les histoires de fesse à deux rond, et va z y le camp d'entrainement à la full metal jacket, et va z y la propagande à la télévision (oulala big brother) et encore moi, j'en passe, lui non.
Comment la sauce prend elle? mystère, ce qui se voit, en revanche c'est que le film doit beaucoup à l'interprétation toujours sérieuse et premier degré d'acteurs qui se battent pour défendre l'indéfendable. Ces personnages, tous plus creux et idiots les uns que les autres, gardent grâce à eux ce minimum d'humanité qui évite de basculer dans le simple jeu de massacre. Soit il y a des moments ou on ne peut que se réjouir de voir des insectes géants écraser cette pseudo humanité irritante, sortie tout droit des séries pour ados les plus crispantes de l'époque. Mais Van Dien, malgré son rôle de crétin galvanisé et son physique de celluloïd arrive à injecter suffisamment de naïveté à son personnage pour susciter un peu d'empathie.
Or c'est ce reste d'empathie pour cette humanité dégénérée, fasciste, à la crétinerie arrogante qui fait tout l'intérêt et l'ambiguïté du film, au delà du manichéisme benêt par exemple des frères Wachowski.