Un scénario passionnant, une réalisation impeccable, un casting sur-mesure dominé par Ralph Fiennes et Angela Bassett… Strange Days fait partie de ces films en état de grâce, ces œuvres d’exception où l’alchimie entre chaque membre clef de l’équipe technique et artistique s’avère parfaite...
Appréciable sur plusieurs niveaux de lecture, le script co-rédigé par James Cameron et Jay Cocks s’appuie sur l’une des thématiques les plus récurrentes et les plus complexes du père de Terminator : l’amour/haine de la machine, appréhendée à la fois comme un extraordinaire vecteur de progrès et d’évolution, mais aussi comme un danger permanent brisant les libertés individuelles. Ici, la technologie n’est pas symbolisée par un cyborg destructeur mais prend la forme d’une drogue irrésistible, seul substitut possible aux émotions en voie de disparition dans un monde de plus en plus déshumanisé. Prophétique par bien des aspects, Strange Days annonce les phénomènes Youtube, Dailymotion ou Facebook avec une décennie d’avance, et se redécouvre aujourd’hui avec le même ébahissement rétroactif qu’un Blade Runner ou un Minority Report...
Au service de la cohérence visuelle de son long-métrage, Kathryn Bigelow s’octroie les services de la compagnie d’effets visuels Digital Domain (nécessaire pour donner suffisamment d’ampleur au réveillon 1999-2000 conçu comme « la mère de toutes les fêtes ») et de l’as du steadicam Jim Muro, à qui nous devions déjà les mémorables poursuites en plan-séquence de Point Break. Avec un budget de 42 millions de dollars et des recettes d’à peine 10 millions, Strange Days fut un flop spectaculaire au box-office, et sombra dès lors dans un semi-oubli totalement injustifié...
Il serait grand temps de restituer à cette fable pré-apocalyptique le statut de classique qu’elle mérite !!!