Tout le monde devrait aimer Raymond

Après les envolées gores de la psyché torturée d'une adolescente dans "Excision", Richard Bates Jr revient avec une comédie surnaturelle portée par une épatante bande de comédiens déjà en partie présente dans son précédent long-métrage.

Devant l'impossibilité de trouver un job, Raymond (Matthew Gray Gubler) revient vivre contre son gré chez ses parents. Alors que les rapports avec son père (Ray Wise) deviennent de plus en plus tendus, sa capacité à voir les esprits des défunts, disparue depuis qu'il avait quitté le cocon familial, se remet à faire des siennes. La découverte par des ouvriers mexicains du cadavre d'une petite fille enterrée dans son jardin n'y est sans doute pas étrangère...

Dans "Excision", on avait déjà remarqué le véritable talent d'écriture de Richard Bates Jr pour les dialogues au cynisme imparable mais avec "Suburban Gothic" et le retour de ce jeune citadin dans sa petite ville natale, il trouve encore un bien meilleur écrin pour toute l'étendue de sa verve acide et jubilatoire. Le regard de Raymond accompagné de ses remarques ironiques sur une population qu'il juge pour la plupart comme des ploucs font des petites merveilles de pics d'humour noir auxquelles il est bien difficile de ne pas succomber, le tout étant porté par un Matthew Gray Gubler tout aussi absolument irrésistible dans ses attitudes de type blasé aux tenues improbables. La palme de la qualité des dialogues revient sans doute à ses échanges avec Ray Wise qui semble s'amuser comme un petit fou dans son rôle de père exécrable sur tous les plans. Et dans le genre "interprète de personnage fatigué par la vie", Gubler trouve une des partenaires les plus géniales qu'il soit en Kat Dennings dans le rôle de Becca, la seule à pouvoir renvoyer Raymond dans les cordes de son cynisme en étant une donne sentimentale des plus particulières. Avec, en plus, les sympathiques apparitions de John Waters, Sally Kirkland ou Jeffrey Combs pour quelques scènes absurdes, "Suburban Gothic" ne déçoit jamais par son humour permanent et décolle même vers des horizons un poil plus ambitieux le temps de quelques séquences (la superbe scène de la danse exaltant les frustations intérieures de Raymond et Becca).

Évidemment, si elle est néanmoins peut-être la grosse faiblesse du film par son manque d'originalité, l'intrigue surnaturelle participe elle aussi à la bonne humeur générale en apportant une touche délicieusement rétro au film par un lot d'apparitions volontairement kitchs et aussi inventives que drôles. Entre un piano-orteils, une valse improvisée avec une tête flottante ou une lampe se remplissant d'un liquide très suspect, "Suburban Gothic" ne s'interdira rien en allant fortement lorgner vers la générosité des comédies 80's du genre pour offrir un ton des plus rafraîchissants à contre-courant de la vague mainstream actuelle.

Drôle et sans véritables limites dans ses intentions, "Suburban Gothic" est une comédie rétro d'épouvante jubilatoire dans laquelle tous les comédiens semblent être venus s'éclater à grand renfort de dialogues brillamment hilarants.