Summer Wars
7.1
Summer Wars

Long-métrage d'animation de Mamoru Hosoda (2009)

Ils ne sont jamais arrivés. Pourtant tous les autres clichés du film d'animation japonais concon y sont passés : un héros asocial qui va finir par se taper la fille forte mais sensible, le monstre très méchant qui veut détruire le monde par pur nihilisme, qui va devenir énorme et dégueulasse mais qui va se faire battre par le pouvoir du Deus Ex Machina, et surtout ce gros n'importe quoi constant si cher aux Japonais qui élève nombre de leurs films au rang de chef-d'oeuvre (Mononoke et Paprika pour ne citer qu'eux), mais qui en détruit beaucoup d'autres au passage tant il est rarement utilisé à bon escient.

Ce qui m'a le plus déçu, c'est le traitement fait au numérique. Moi qui m'attendais à un film de geek, j'ai eu droit à un condensé des plus gros clichés sur l'informatique des films faits par des gens qui n'y comprennent rien. Ça passe par des petits trucs, comme le coup du gamin qui va déplacer son perso dans un combat en tapant sur un clavier (apparemment la souris n'existe toujours pas dans certaines contrées reculées du Japon), ou le virus qui se fait piéger dans un serveur (à la limite pourquoi pas) mais qui arrive à en sortir PARCE QUE L'ORDI SURCHAUFFE, ou encore la sécurité du plus gros réseau d'informations mondial, censée être la plus robuste au monde, qui repose sur UNE clé (un peu comme si les données de la CIA étaient accessibles par un simple mot de passe que tu pourrais récupérer en donnant le nom de ton clebs ou de ta copine de quatrième)... Mais ça va surtout beaucoup plus loin avec une informatique omnipotente qui-peut-détruire-le-monde-parce-que-mon-Dieu-QU'AVONS-NOUS-FAIT ???
Ça ne serait pas si gênant si cette incompréhension totale des auteurs ne trahissait pas complètement le propos qu'ils veulent nous faire avaler.

Parce que justement, et c'est là le plus gênant, ce n'est pas un film sur les geeks. C'est tout le contraire.
Le film essaie tant bien que mal de dénoncer l'importance que prennent les réseaux sociaux et la vie numérique sur notre vie réelle, tout en remettant au centre du tableau les valeurs familiales et traditionnelles chères aux Japonais. Le problème, c'est que c'est fait sans aucune subtilité et totalement unilatéralement, le message est asséné bêtement et avec acharnement tout le long du film. Les aficionados du réseau sont tous isolés et handicapés sociaux : le héros frustré et ahuri, le petit frère de sa copine qui est le seul à ne pas participer aux activités familiales parce que, tu comprends, il joue, ou l'oncle trop d4rk, seul exclu de la famille, qui se révèle avoir codé le méchant virus, et ce pour des raisons bassement matérielles (berk, argent !), et le bougre n'a même aucun regret !
Par contre, les vieux de la veille représentent la combativité : la vieille qui sauve le monde en trois coups de fil en disant aux gens de se bouger le cul (merci, on y avait pas pensé), ou la gamine qui rend ses comptes à tout le monde avec un jeu de cartes parce que les jeux vidéos, c'est mal. Ce qui est vraiment agaçant encore une fois, c'est que l'incompréhension à propos des geeks se fait sentir à tous les instants. Même quand les auteurs essaient de donner un peu le change en prêtant des avantages au numérique, ils se foirent maladroitement. Ainsi, Internet a permis au petit frère de s'affirmer alors qu'il se faisait maltraiter à l'école. Sauf que ce n'était que pour mieux s'isoler sur son ordinateur (et c'est le kendo de son grand-père qui va au final lui permettre de trouver la force de vaincre).

Tout ce foutoir est servi sur un plateau de personnages clichés et débiles. Par exemple, le héros n'a aucune utilité avant son heure de gloire finale (je n'ai réussi à me rappeler de son prénom que 10 minutes avant la fin), tous les membres de la famille se limitent à un trait de caractère (ce qui est plutôt normal, tant ils sont nombreux, mais serait mieux passé si les personnages principaux avaient bénéficié d'un traitement correct) et surtout, un point qui m'aurait fait marrer s'il n'était pas totalement affligeant, les femmes y sont traînées dans la boue. Vraiment : au milieu du film, au pire moment, elles décident de se concentrer sur les pâtisseries et la cuisine. On les voit toutes les trois réunies autour de l'évier, à pester contre les hommes qui sont, oh, juste en train de SE SORTIR LES DOIGTS POUR SAUVER LE MONDE. Heureusement, qu'y'avait les mecs. Toutes des salopes. *Lance un gros glaire dans l'herbe*

Bon allez, j'exagère. L'avantage de tout ça c'est que je me suis beaucoup marré. Comme dit en préambule, on a droit à un vrai film d'animation japonais concon, tout y est poussé à l'extrême, tout est dans l'exagération (le combat final fait passer Yu-Gi-Oh pour un manga d'auteur ultra sobre) et c'est toujours jouissif. De plus, l'ambiance y est quand même bien travaillée, j'ai bien aimé notamment les scènes de nuit.
Mais là où même un film d'action neuneu comme Die Hard 4 avait réussi à parler d'informatique sans tomber complètement dans le cliché moralisateur, Summer Wars se foire en beauté et me donne juste envie de taper dessus de manière très très vilaine. Moi les films qui me prennent pour un con, j'aime pas. Mais c'est sûrement parce que je suis un gros frustré de l'Internet.
Arbuste
4
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le 25 août 2013

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Arbuste

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