Sweet home
4.7
Sweet home

Film de Rafa Martinez (2015)

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Que pensez-vous du slasher movie? Que signifie ce genre à vos yeux ? Qu'en attendez-vous ? Est-ce un simple exutoire où le meurtre de rue et la violence gratuite représentent un catalyseur de votre colère et où vous pouvez assouvir une vengeance passive ? Est-ce un accès à un humour décalé, mais incontrôlé, dû aux codes cinématographiques basiques frôlant les clichés ? Ou est-ce simplement la curiosité de voir quelle idée farfelue se trame derrière cette volonté d'un slasher movie ? Peut-être est-ce tout à la fois ? En effet ce genre cinématographique peut souvent se targuer d'avoir une base scénaristique intéressante, un concept inattendu qui rend l'histoire attractive. Ici le réalisateur souhaite donc aborder la manière dont se déroulent les 50000 expulsions annuelles en Espagne. « 85% des expulsions se font de manière pacifique, 13% ont recours à la violence et 2% en utilisant d'autres méthodes ».


De quoi alimenter la genèse de l'histoire d'une façon plutôt inattendue. La scène avec le vieil homme refusant de quitter son domicile s'inscrit d'ailleurs comme étant la plus intéressante intellectuellement. Mais le slasher d'aujourd'hui ne cherche pas vraiment à être intelligent. Si le postulat de départ intrigue, son développement n'est jamais étoffé, c'est à peine si on en reparle par la suite. Admettons que ce qui importe sont les accès de violence et la nature malsaine des images, ce n'est pas une raison pour délaisser constamment le scénario. Nous nous retrouvons avec l'information qu'en Espagne les gens sont expulsés de chez eux avec violence pour une minorité non négligeable d'entre eux, mais on ne nous dit absolument rien de plus. Ni pourquoi, ni depuis quand, ni qui sont les instigateurs ou l'organisation qui s'en occupe, c'est à peine si on comprend comment on en arrive à ce stade de l'expulsion forcée. C'est déjà ce qui avait été grandement critiqué pour American Nightmare, une phrase d'accroche qui faisait rêver mais que l'intrigue ne développait pas outre mesure. Le vieil homme dans Sweet Home fait d'ailleurs se poser une question, comment finit-il par faire partie des 2% alors qu'on le voit mal résister à une expulsion forcée ? De plus, l'une des volontés de Rafael Martinez était de dérouler l'histoire et l'origine des événements dans un lieu de vie reconnaissable par le spectateur afin d'installer une certaine empathie et une compréhension. Rarement la volonté d'un réalisateur n'a à ce point échoué. Non seulement les lieux les plus facilement reconnaissables s'arrêtent au hall d'entrée et à la cage d'escalier, mais en plus l'histoire se déroule dans un immeuble abandonné dont la plupart des fenêtres sont condamnées, difficile alors de se repérer comme étant chez soi. Le scénario part déjà en vrille alors que cela vient juste de commencer.


Dans ce genre de productions, il est également coutume de faire face à des personnages masqués ou cagoulés sans que l'on nous épargne l'acte incompréhensible, mais toujours fréquent, de dévoiler leur visage à la première occasion. Les personnages aux visages masqués ont toujours l'air assez badass, il faut bien l'avouer, surtout depuis la saga des Vendredi 13, et même si quelques fois on ne saisit pas l'utilité qu'ils le soient, on l'excuse car cela rend bien. Mais une fois qu'on attribue un masque ou un casque à son personnage, même si ce n'est pour aucune raison valable, on assume son choix et on ne le retire pas à la moindre occasion comme le font les méchants de Sweet Home. Inutile de poursuivre dans les clichés, puisque le film en est rempli, mais on verra d'un bon œil que le héros du film est en fait une héroïne, suivant les traces de You're Next à ce niveau, avec une femme forte qui ne se démonte à aucun moment. Là encore c'est monnaie courante que le dernier survivant soit une femme mais c'est le seul cliché qui ne nuit pas au long-métrage, surtout quand son petit ami nous pète les noix en moins de 10 minutes.


S'agissant pour une fois d'une production espagnole et non américaine, on est en droit de se dire que si le scénario est déficient, il reste la mise en scène. Et vous voilà tous tombés dans le panneau. Reconnaissons qu'il y a de l'effort, esthétiquement c'est plutôt recherché : une teinte dominante jaune/orangée/rouge qui s'inscrit bien dans l'ambiance nocturne glauque et sanglante que nous connaissons des thrillers des années 90'. Peu d'éléments temporels nous précisent l'année exacte à laquelle tout cela se déroule, si bien que l'immeuble en cours d'expulsion ne répond certainement plus aux normes de sécurité actuelles. Ainsi l'histoire peut tout aussi bien se dérouler en ce moment qu'il y a 20 ans. Ce manque de repère ne gêne en rien la lecture du récit et reste crédible pour le spectateur qui n'a pas de difficulté à s'adapter. Ce qui n'est pas le cas du montage. Si l'esthétique visuelle générale est agréable et offre quelques très beaux plans, le découpage technique est quant à lui fini avec les pieds. Les quelques scènes d'action sont particulièrement nauséeuses, filmées en shaky cam, montage alterné, avec différentes valeurs de plan et des zooms brusques, évitez de manger devant le film, vous pourriez l'avoir fait pour rien. Sans compter que les différents changements de lieux manquent absolument de clarté, on ne sait pas comment les personnages se déplacent d'un point A à un point B, à moins qu'ils soient dotés de pouvoir de téléportation.


Finalement le film reste très amusant dans sa nature grotesque, si vous cherchez un vrai slasher sanglant et haletant, autant attendre le prochain, car même son côté purement trash n'est pas évident. Les producteurs de la saga [REC] n'ont pas misé sur le bon cheval visiblement car cette histoire horrifique n'apporte que peu de frissons, et Sweet Home est quand même loin de la lignée de Hostel comme ils le prétendent. En tout cas vous pouvez continuer à glander chez vous, si quelqu'un cherche à vous expulser de manière violente, il suffit de crier un peu fort et vous lui ferez peur. Plus que le film en tout cas.


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Notry
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le 3 avr. 2019

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