Jason Batman - Gotham Psycho
Le contexte est bien connu mais remettons le tout de même en place : la trilogie Batman de Nolan fut composée de Batman Begins où la chauve-souris se retrouva aux prises avec un Ra’s Al Ghul toujours déterminé à instaurer un nouvel ordre mondial, puis de The Dark Knight où notre héros combattit un Joker campé par un Heath Ledger des grands jours mais qui donna également la part belle à Harvey Two-Face, deuxième opus qui fut jugé encore plus convaincant que le premier, et s’achève avec cette troisième partie, attendue au tournant par nombre de chauves-souris en herbe.
Seulement voilà et autant commencer par ce qui fâche. Si TDK était aussi réussi, c’est qu’il reposait sur un équilibre parfait entre son trio Batman/Joker/Two-Face. Car si Heath Ledger dans son interprétation cannibalisait l’attention et les louanges, le personnage de Dent est tout aussi important dans le développement de l’histoire, on peut même considérer qu’il en est la plaque tournante.
Or dans TDKR, cet équilibre fragile n’est pas retrouvé, les personnages secondaires étant bien moins équilibrés. Une Catwoman bien trop sous-exploitée alors qu’elle est campée de façon tout à fait convaincante par Anne Hathaway. Marion Cotillard qui ne sert à rien, pour rester poli, et qui rend le twist qui l’inclut totalement raté au niveau de l’implication émotionnelle du spectateur. Et pourquoi s’encombrer sur ces pseudo-révélations à deux balles sur le passé de Bane alors que ce qu’on savait jusqu’alors suffisait parfaitement ? En fait j’ai l’impression que c’est à partir de ce twist que tout part en sucette.
En ce qui concerne les faiblesses du scénario, je trouve qu’une partie de ce qu’on peut lire sur l’interweb est injustifié (des gens qui ont retenu la moitié du film et relèvent de pseudo-incohérences qui n’en sont pas), et qu’une autre partie l’est. Je ne rentrerai pas dans les détails, j’ai levé un sourcil une fois ou deux pendant le film, mais je ne spoilerai pas, sans compter que ça m’a moins empêché d’apprécier le film que cette volonté de tout expliquer en prenant le spectateur pour un abruti (comme quand on prononce le nom du personnage de Gordon-Levitt à la toute fin alors que le dernier des cons avait compris). D’ailleurs la salle dans laquelle j’ai vu le film était plus que remplie d’abrutis bruyants et mal élevés, et vu leurs réactions même eux se sont un peu sentis pris pour des débiles dans ce genre de moment.
Et puis clairement, Ra’s Al Ghul est loin d’être mon héros de Batman préféré, j’étais pour tout dire, m’étant préservé de tout spoil, un peu déçu de le «retrouver», et ici se trouve sans doute plus que pour tout autre aspect la raison des notes que j’ai attribué à chacun des épisodes de la trilogie. La force de l’univers Batman et de la réussite dans l’invention de ses Méchants est qu’ils ont un compte à régler avec Batman lui-même, et bien souvent l’origine de leurs particularités est due au fait de l’Homme Chauve-Souris (d’où le compte à régler). Là j’avoue que le coup des Ninjas qui veulent renverser Gotham pour instaurer un nouvel ordre mondial me laisse un peu plus de marbre (surtout qu’ici, du fait du scénario (ville coupée du monde etc pour le mini spoil), Gotham paraît bien vide). Alors, c’est aussi le cas dans les comics avec tout le micmac avec sa fille, mais dans le film … sans spoiler, c’est minime, mal amené, et tard.
Bon bref, arrêtons là de taper sur ce film que j’ai somme toute beaucoup apprécié. L’équilibre entre les bad guys moins subtil que dans TDK, et leur choix, gâchent un peu la fête, mais le film offre tout de même une belle conclusion à cette trilogie qui aura sur remettre le Chevalier Noir au goût du jour.
Essayant de structurer un minimum cette critique, je n’ai jusqu’ici pas parlé de Bane. Eh bien il est foutrement réussi. On pouvait craindre qu’Heath (que Heath ?) Ledger fasse de l’ombre aux autres jusque dans le dernier film, mais non, Tom Hardy interprète un Bane imposant, d’envergure dans tous les sens du terme, impressionnant et charismatique. Catwoman est fort réussie ainsi que le personnage de Joseph Gordon-Levitt même si j’eusse préféré un temps de passage à l’écran inversé, mais bon, on comprend pourquoi en ayant vu le film. (Feignons d’oublier la présence Cotillard au casting).
Les qualités des précédents opus qui en ont fait le succès sont toujours là, les images sont esthétiques (ces scènes au tribunal), la bande-son d'Hans Zimmer sans être un chef d'oeuvre pose l'atmosphère sombre et lourde, le film est plein de punch, Batman aussi, et le spectateur est embarqué dans cette aventure de justicier masqué aux ennemis toujours charismatiques et détestables à la fois (sauf Cotillard qui n’est que détestable mais passons, ai-je dit).
Finalement je dirais qu’il ne faut pas bouder son plaisir devant cette conclusion solide à une trilogie qui aura su donner vie à un univers crédible (quelle que soit le degré de crédibilité qu’on veuille bien accorder au scénario), plus centrée sur la psychologie de Batman et ses forces et faiblesses. Certes, TDK restera mon favori, mais faut-il se plaindre que Bane (et la petite présence de Catwoman) ne crèvent pas autant l’écran que le Joker et Dent, ou se réjouir d’avoir eu une trilogie d’excellente facture pour les fans du Batman avec un second opus qui réussit à s’élever jusqu’à tutoyer l’excellent ? Je garderai personnellement un très bon souvenir de la saga de Nolan.