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J'attendais un film excessivement crétin, composé de bourrins se rentrant dans le lard en faisant trembler les alentours, entrecoupé de saynètes romantiques insérées au forceps et gênantes.
Si The Man who feels no pain a sa dose de combats, il ne s'attache pas à une course à l'armement absurde dont les Tamouls sont les marathoniens (Bahubali, 2.0 etc). Le budget relativement faible explique en partie sa sobriété, mais c'est un amour sincère du cinéma de cascadeurs qu'on ressent à la vue des nombreux coups de pieds sautés. Simple et efficace bien que manquant parfois un peu d'impact, le jeu constant sur le ralenti rythme l'action et permet d'explorer les corps et les visages de ces grands enfants jubilants donnant au public un plaisir partagé.


À l'opposé des guerriers sérieux, machistes et fascisants du cinéma Indien¹, Vasan Bala dirige une action régressive sans sacrifier le reste. Surya, enfant handicapé élevé à l'écart du monde devient un adulte puéril influencé par le cinéma international des États-Unis à Hongkong en passant par le Japon. Cependant, le film a sa propre identité et échappe au pénible jeu de la référence, à un gag près sur Terminator, et évite de glorifier l'immaturité de Surya en sauveur providentiel.


Car c'est presque l'enjeu de The Man who feels no pain d'opposer un esprit bon enfant aux héros reposant sur des figures historiques nationalistes ou même divines. Il développe ce sentiment discrètement en faisant de l'insensibilité à la douleur un handicap alors que c'est habituellement le trait de supers soldats génétiquement modifiés, en ignorant les avances de jeunes femmes militaires, en exposant l'acte nationaliste fictif du grand-père, en rejetant le Bindi (symbole religieux et de soumission de l'épouse) et en affichant son ouverture par la culture, l'immigration et l'émigration se faisant naturellement sans l'appuyer grossièrement d'un message lié à une quelconque actualité.


Voilà donc un film d'action (et romantique tout de même) gentiment naïf qui réussit à ne pas verser dans la facilité de l'homme machine, ni dans un accomplissement geek replié sur lui-même et son univers.


¹Pour prendre un exemple : Baaghi tourne autour de figures similaires : frères rivaux, rapport de maître à élève qui là repose sur l'autoritarisme, le mal est à l'étranger (des chinois et des noirs en Thaïlande, pays que de braves immigrés indiens veulent fuir pour retrouver leur belle patrie), l'infiltration du repaire du méchant se fait par la porte principale en beuglant alors que The Man who feels no pain détourne ce passage avec humour... À cela s'ajoute la romance immature, des points essentiels de l'intrigue laissés à l'abandon et des rebondissements prévisibles car à l'encontre de l'écriture du personnage (qui serait surpris d'apprendre que le gentil héros n'a pas tué une femme innocente ?).

Homdepaille
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le 2 févr. 2020

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