Michel Hazanavicius a su s’imposer en quelques films comme le petit génie du cinéma français. Celui qui ose, celui qui décide de faire ce qu’il a envie. S’il est connu des plus geeks d’entre nous avec ses hilarants Derrick contre Superman et surtout La Classe Américaine, il s’est évidemment fait remarquer avec OSS 117 en 2006 puis 2009. Après son Oscar, son César, son Goya, ses BAFTAs en 2011 avec The Artist, film muet en noir et blanc, on se demandait bien quel chemin allait pouvoir prendre Hazanavicius. Allait-il partir en aventure à la conquête de Hollywood comme l’a fait Jean Dujardin, ou continuer dans le chemin de la comédie française réussie et intelligente ? Car inutile de préciser qu’après le succès fulgurant de The Artist, le réalisateur français avait carte blanche.


Il frappe là où on ne l’attendait pas. Présenté à Cannes, Michel Hazanavicius décide de mettre en scène un remake des Anges Marqués de 1948. Exit ici un monde post-seconde guerre mondiale. Il nous plonge dans un conflit qui semble lui tenir à cœur de nous montrer à l’écran, celui de la guerre de Tchétchénie en 1999. On y suit deux histoires parallèles, celle d’un enfant Tchétchène en fugue après la mort de ses parents, et recueilli par une militante des droits de l’homme (Bejo), et celle d’un jeune adolescent qui devient soldat. Présenté à Cannes, le film a été longuement décrié, et son pathos pointé du doigt. Grand bien lui a fait puisque le réalisateur a pris bon de remonter son métrage et de couper toutes ces parties tires-larmes. Il en résulte un film juste, fort, poignant quoique parfois bancal.


En effet, The Search a le parti pris de raconter plusieurs histoires en parallèle qui ne sont (au premier abord) pas du tout lié. La première, la trame principale, est la plus classique mais est pourtant celle qui fonctionnera le plus sur le spectateur. Car Hazanavicius décide de placer le récit de la guerre du point de vue humain et de l’impact qu’il a sur les vies des gens. Les scènes de conflit dans cette trame sont simplement inexistantes, mais on ne l’oublie pas pour autant grâce à une ambiance très lourde et des sujets évoqués très graves (à l’image comme à l’oral, le personnage de Béjo travaillant aux Droits de l’Homme). Si cette partie fonctionne également, c’est de part son histoire simple (déjà vue diront certains) mais néanmoins touchante et crédible. Elle est portée par Bérénice Béjo, toujours impeccable mais surtout Abdul Khalim Mamutsiev, jeune garçon qui, comme une majorité des acteurs du film, n’est pas professionnel. Le duo est brillant et criant de vérité.
La deuxième trame est tout son contraire, mais la qualité est là aussi : on suit quasiment un seul et uniquement personnage au cœur de la guerre, où comment celle-ci lave le cerveau d’un adolescent.
The Search souffre malheureusement de son ambition car on peinera à s’intéresser pleinement au troisième sujet : celui de la sœur qui essaie de retrouver son petit frère (recueilli par Bérénice donc).


Intelligent, The Search n’ira jamais dans l’excès ni dans le pathos. Il ira encore plus loin en adaptant sa réalisation et le ton global de son film entre les deux histoires qui se recouperont pour un final poignant. On regrettera peut-être un film trop ambitieux car avec trois histoires différentes, il y en aura forcément une que vous trouverez moins intéressante. Néanmoins, Michel Hazanavicius maîtrise sa mise en scène à la fois proche du documentaire, proche des personnages et parfois froide et distante pour un long métrage réussi.

AlexLoos
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le 18 mai 2015

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AlexLoos

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