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Critique croisée avec BLINDSPOTTING


Rien ne réuni vraiment l'officier Jimmy Arnaud (THUNDER ROAD) et Collin (BLINDSPOTTING). Mais il est intéressant de croiser leurs histoires. Tous les deux affrontent les fatalités de la vie. Toutes les difficultés de l’existence retombent sur le premier, le second est empêtré dans une société à cran et ultra violente. Ces deux films montrent l'envers du rêve américain dans des tonalités certes très différentes mais complémentaires.


THUNDER ROAD démarre sur de drôles de funérailles. Le ton est donné, le train de vie quotidien de Jim commence à dérailler sérieusement. Sans jamais céder à la fatalité, Jim se confronte à la douleur du deuil, la gestion des émotions, la délicatesse d'être père, la conciliation entre vie familiale et vie personnelle, aux contrariétés de l'amitié, au conflit amoureux et aux tragédies brusques. Certes Jim tangue mais il tient, porté par la volonté d'aller de l'avant et ne pas s'enliser où rien ne va. C'est la philosophie du morceau de Bruce Springsteen qui donne son titre au film.


Collin est accablé par la violence mais se détermine a ne jamais plus y céder. Il échappe difficilement à la brutalité qui l'entoure. Mais maintenant que la fin de sa conditionnelle approche, plus que repenti il est animé par la volonté de se sortir -lui et son entourage- de toute cette agressivité folle. Le point de vue de Collin évolue, comme l'illustre le parallèle avec l'illusion d'optique. Le cerveau doit s'adapter pour voir le vase s'il a toujours vu deux visages et inversement. C'est tout le sens du titre BLINDSPOTTING, qui se traduit par l'effet d'aveuglement, comme un angle-mort. L'histoire de Collin propose une ouverture du champ de vision et de l'esprit.


Ces deux films peuvent se répondre justement sur une certaine opposition de point de vue. Le portrait d'un agent de police face à la chronique des derniers jours de conditionnelle d'un ancien détenu. Mais à l'évidence ces protagonistes ne sont pas définis que par ces caractéristiques. L'officier Arnaud qui pouvait peut-être exprimer un certain dédain envers des fauteurs de troubles va semer lui-même le désordre. Au regard de sa vie, on compatit plus qu'on ne le blâme. Pour des problèmes bien différents, Collin aussi a de la rage en lui. On ne peut décemment pas juger d'avantage.
Ce qu'il y a de percutant dans ces deux histoires, c'est la verve convaincue avec laquelle Collin prêche le combat par les mots et la détermination sans faille de Jimmy pour aller chercher le meilleur de ce que la vie peut offrir.


Deux chroniques douce-amer dans une société qui déborde de crises de nerfs. Deux combats singuliers contre la fatalité. Deux récits qui contredisent la pensée manichéenne ou binaire qui règne. Deux affronts aux regards pleins de jugement et d’à-priori. Deux portraits qui se complètent pour casser les codes et les clichés. Deux films aux univers marqués, très bien défendus par la mise en scène et l'interprétation.

adamkesher01
7
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le 19 oct. 2018

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Adam Kesher

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