Timecrimes
6.6
Timecrimes

Film de Nacho Vigalondo (2007)

Autant le dire tout de suite je n'aime pas le cinéma espagnol. Oui lancez moi une pierre je ne sais pas, faites ce que vous voulez, lynchez moi. Pourtant ce cinéma je ne l'aime pas, je vais expliquer par la suite pourquoi. Ce film, Timecrimes, a pourtant suscité mon intérêt. Et au-delà de son développement minimaliste on a ici un film qui bénéficie d'une assez bonne écriture et d'une réalisation consciencieuse.

Pourquoi je n'aime pas le cinéma espagnol? Je vais vous dire c'est mon avis, ne me jugez pas trop sévèrement, mais osez me jeter une pierre et ensuite peut être on discutera de votre acte. Le cinéma espagnol n'a pas grand chose d'original, rien de bien transcendant et de personnel dans le sens où sa construction est une pâle copie, un reflet de foire de plusieurs inspirations, la Nouvelle Vague française, le néoréalisme italien et le cinéma fellinien. Et je vais même vous dire qu'il a des issues bien dégueulasse, comme le cinéma socio-démago que j'ai en abhorration, car usant d'un principe de socialisme larmoyant, responsabilisant le spectateur et éttoufant le cinéma dans un sac à déchet de la civilisation. Oui on vous asphyxie avec des vapeurs de soufre, on vous humilie en vous insultant du sort de l'Espagne. Et bien que je sois relativement tolérant, on peut pas être parfait, j'entretiens une aversion pour le cinéma d'Almodovar notamment, qui ne passera à mon humble avis le stade de réalisateur Cannois, sans fond, ne disposant pas d'une bonne place dans l'oeuvre contemporaine. Car sur-estimé, prétentieux, pédant, ayant le même défaut que Tarantino, avoir des personnages creux, vides, sans beaucoup de charme et dont la faille principale se révèle être l'apitoiement de ses personnages. Finissons en là par le cinéma fantastique espagnol.

Le cinéma fantastique espagnol surfe sur quelques réussites, à cependant relativiser, je cite en exemple le cinéma d'horreur avec Rec peut être un peu sous-estimé, et par exemple le Labyrinthe de Pan, mais aussi le cinéma de Bunuel de grande qualité, qui avait donné ses lettres de noblesse à ce genre. Toutefois, il souffre des démons du cinéma espagnol, un cinéma criard, sans verve et sans panache, avec un manque de personnalité flagrant, évident, vide de sens, et loin d'être une invention nationale et au carrefour d'un cinéma européen riche, en réalité il bénéficie d'une côte démago-bobo criarde et faiblissante. Cannes est son seul soutien.

Venons-en à ce film. Le hasard me mène sur sa route. Il ne bénéficie d'aucune aura prétentieuse et s'appuie sur une bonne lucidité de la part de ces créateurs. Une lucidité scénaristique, en somme un scénario qui non seulement se révèle simple dans sa construction, mais aussi dans son développement. Tout ceci en gardant un suspens et une construction suffisamment intrigante pour coller au genre du thriller de science fiction. En définitive son principal atout c'est le scénario.

Autre atout, le jeu décomplexé. Les acteurs sont bons dans l'ensemble, principalement grâce à la direction des acteurs non étouffante et réaliste par rapport au fait qu'elle sera l'atout du film. Des acteurs donc sans pression, et un rôle principal très bien exploité et joué par un excellent comédien. Enfin pour ma part il m'a paru bon dans le sens où il est dans la mesure, ne dépasse pas son rôle par excès et reste cependant très convaincant, comme quoi jouer dans les limites permet de faire une bonne partition. Un atout dans le scénario et dans le jeu d'acteur, mention spéciale à Karra Elejalde. Très bon et ce qui fait donc un film très plaisant, avec une note de plaisir vis-à-vis de la découverte et de la fraîcheur.

L'histoire, que je ne révélerai pas dans son intégralité, prend place dans des paysages propices au mystère. Des forêts denses, avec des lieux communs, qui se révèlent finalement intriguant par leur allure banale. La révélation de l'intrigue et de son facteur devient surprenant, on perd le film mais on se laisse entrainer facilement grâce à la fraicheur et la simplicité narrative, sans blabla et question existentielle débile propre au cinéma espagnol. Cependant il y a une personnalité, une essence espagnole, dans l'expression et le manque de fond, typique.

Pas réellement de défauts, car la simplicité, la non nécessité de créer des personnages profonds, sont de réels atouts. Mais au final le film reste donc un moment de plaisir, divertissant, intriguant, mais sans portée définitive, ne pousse pas à la réflexion. Malgré le fait que je n'aime pas ce genre de pédanterie morale, elle se doit d'être fait habilement ce que ne réussi pas le cinéma espagnol et c'est donc le piège qu'évite ici le réalisateur, la niaiserie sociale et le n'importe quoi fantastique ou pervers, comme le cinéma d'Almodovar sait le faire, oui il sait faire des films de pervers et obsédés.

Mais du coup Timecrimes ne souffre pas de tout ça, apporte de la fraîcheur sans prétention et prise de tête. Mais se retrouve quand même limité à être un divertissement intelligent et efficace. La réflexion niaise nous étant épargnée, sans pour autant oublier une sorte de morale définitive non appuyée, juste évoquée insufflée par le final efficace.

En définitive c'est un film sobre et efficace, simple et évitant les pièges de sa culture cinématographique, réussissant un film fortement appréciable et sans prétention. Fraîcheur.
TheDuke
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le 26 sept. 2013

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TheDuke

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