Une perle.


Mais je vais trop vite.


Madame Wilberforce est une charmante vieille dame. Comme toutes les charmantes vieilles dames, elle est l'innocence incarnée dans de vieilles tenues et aux désuètes bonnes manières. Elle est seule, vit avec quelques perruches, et prend le thé avec ses vieilles amies. Elle loue une chambre que le professeur Marcus décide de prendre. Il avertit cette vieille dame qu'il sera accompagné de quelques amis musiciens, ils forment un groupe et souhaiteraient répéter. Ils ont l’air si charmants, comment leur refuser ? Mais il s'agit en fait de bandits, de petites fripouilles qui vont organiser un casse, avec la complicité involontaire de leur propriétaire. Mais de par sa nature trop pleine de bons sentiments, il n'est guère facile d'incorporer Madame Wilberforce dans n'importe quel plan criminel. Que faire, la tuer ?


The Ladykillers, c'est d'abord un casting 4 étoiles, la crème des acteurs anglais de cette époque, qu'il est impossible de détailler tous. Katie Johnson est une vieille dame charmante mais un peu trop présente, qui va se heurter à la nature de ses locataires, à moins que ce ne soit l'inverse. Alec Guiness est un professeur à l'allure inquiétante, le cerveau du groupe dans un physique ingrat. Citons un Peter Sellers encore débutant, qui incarne un gangster jeunot. Chaque membre du groupe est un malfrat mesquin, mais pas trop, avide d'argent mais malmené par l'idéal de Madame Wilberforce.


Tout ce beau monde est réuni devant la caméra d'Alexander Mackendrick, pour les studios Ealing, coupables, et qu'on les en remercie, de très bons films anglais de cette époque. Alexander Mackendrick sait placer sa caméra comme il faut, se jouant de l'espace étriqué de la maison de Wilberforce, le cadre où tout se jouera.


Car The Ladykillers est une œuvre incroyable, qui rejoue la traditionnelle opposition entre les générations en l'inversant, les personnes les plus jeunes n'étant pas les plus morales. Madame Wilberforce est l'innocence qui fait tout capoter, qui entraîne les malfrats à leur perte, à cause de sa candeur surannée, de ses valeurs très anglaises. Elle n'est pourtant pas idéalisée, ce n'est qu'une vieille dame, trop gentille, trop prévenante, bref, parfois trop agaçante mais malgré tout charmante. Cependant elle reste une gêne, le grain de sable bien trop élevé.


Il faut probablement une bonne dose d'humour british pour une telle comédie noire, drôle mais sombre, réalisée avec le plus grand des sérieux. Il aurait été impensable de le faire aux États-Unis avec la rigueur du code Hays de cette époque. L'erreur, si c'en est une, a été réparée en 2004, avec un remake par les frères Coen, qui possèdent le même humour noir. Cette nouvelle version a le bon goût de prendre de nouvelles directions, mais l’original reste meilleur.


Le film ne remporta aucun Oscar cette année là, même s'il fut nominé pour celui du meilleur scénario original, que Le ballon rouge d'Albert Lamorisse lui chipa. Il obtient quelques récompenses aux BAFTA de cette année, mais bien trop peu. Et, malheureusement, il me semble que ce film n'est pas aussi connu qu'il le mériterait. Une injustice pour un film au charme certain, éclatant de drôlerie, toujours surprenant, attachant d'un bout à l'autre.

SimplySmackkk
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le 20 août 2019

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