Un flic est le dernier film de JP Melville, un an avant sa mort soudaine. C'est un film qui ressemble beaucoup à son film précédent Le Cercle rouge, un polar/film de braquage avec les mêmes personnages de flics et voyous, les même lieux visités de Paris et un pitch presque identique.


Après le hold-up d'une banque, le commissaire Coleman (Alain Delon) est chargé de l'enquête. Il découvre que son meilleur ami Simon (Richard Crenna), ainsi que Cathy (Catherine Deneuve), sont impliqués dans l'affaire et que l'argent du braquage est destiné à financer l'opération d'un "encore plus" gros coup.


Un Flic c'est comme Le Cercle rouge, mais en pas bien. Jean-Pierre Melville a voulu pousser les potards à fond, une scène de casse beaucoup trop longue, des silences qui s'éternisent pendant des plombes et des personnages plus énigmatiques que jamais, qui n'ont aucune profondeur et dont on ne connait pas les motivations. Et puis, il ne pouvait pas s'empêcher de revisiter des lieux déjà vus dans tous ses films (le club de jazz), les voitures américaines qui n'ont rien à faire là, les prostituées indic, les personnages féminins qui n'ont aucune incidence sur le récit (la femme potiche, quoi).


Mais surtout, il y a la fameuse scène du vol de drogue dans le train avec l'hélicoptère, une catastrophe. Le choix de filmer l'hélicoptère et le train en maquette peut se justifier, mais les plans sont beaucoup trop rallongés dans le temps. Tout de suite on repère la maquette et au lieu de couper très vite pour faire illusion, comme sait si bien le faire Alfred Hitchcock, il rallonge la durée du plan avec l'hélicoptère qui se rapproche du train. Et à partir du moment où on repère la maquette (et on la repère immédiatement), on décroche complètement de la scène. Comment Jean-Pierre Melville n'a pas pu se rendre compte du désastre au moment du montage de la séquence ? Et en plus, la séquence dure en tout plus de vingt minutes et bien sûr toujours sans le moindre dialogue auquel se raccrocher. Et si vous rajoutez les facilités du scénario, ainsi que les nombreux faux raccords, on se dit que décidément Jean-Pierre Melville a bâclé le travail pour ce film.


Alain Delon est complètement désintéressé par son rôle de commissaire, qui plus est un rôle insignifiant au sein du récit. Et puis le casting qui mélange acteurs français et américains, ce qui oblige un travail de doublage en post production, ne fonctionne pas. Richard Crenna (aka le colonel dans Rambo) et Michael Conrad ne sont clairement pas à l'aise avec la direction d'acteur de Jean-Pierre Melville. Quant à Catherine Deneuve, elle est présente tout au plus cinq minutes sur 1h40 du film et elle ne prononce pas plus de deux ou trois mots en tout. A quoi bon engager une telle actrice pour la négliger à ce point ? Jean-Pierre Melville a la réputation d'être misogyne et son traitement des femmes à l'écran semble le confirmer, surtout sur sa fin de carrière. De ce fait, la tentative d'installer un triangle amoureux Coleman-Cathy-Simon est un terrible échec, Jean-Pierre Melville lui-même semble s'en désintéresser.


Un Flic est un polar fait de façon mécanique, sans idées, sans âme et sans envie de son réalisateur. Cette suite spirituelle au Cercle rouge, est aussi fastueuse qu'inutile. Jean-Pierre Melville étire les rebondissements d'un scénario au vide abyssal, jusqu'à la scène finale qu'il expédie en deux secondes. C'est comme s'il voulait s'en débarrasser et passer au film suivant, ne sachant pas que ce serait son dernier film.

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le 17 août 2021

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lessthantod

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