C'est bien dans l'inconnu que j'attendais de découvrir ce film de Mathieu Delaporte. Avec tout de même la crainte de voir une piètre copie d'Holy Motors. Les premières secondes tendaient à alimenter cette appréhension. Ballade dans le paysage désertique d'un quartier cosy. La comparaison peut s'arrêter à peu près là, si ce n'est le rôle pluriel de Mathieu Kassovitz.
Denis Lavant répondait à la profondeur et l'éclectisme de tous ses personnages. Ici, le cinéaste le plus pétri de haine est juste dans son interprétation mais peine à effacer ses mimiques. On voit l'acteur se cacher derrière un grimage plus ou moins efficace. Il enfile un piètre déguisement pour commencer, un premier costume qui ne trompe personne. Il est ridicule lorsqu'il essaie de se mettre dans la peau du fleuriste. Aucune ressemblance, une drôle d'allure et une répétition loufoque. Cet entraînement au mimétisme lui donne l'air d'un guignol. C'est bien plus troublant quand il se met dans la peau du violoniste.
Pas certain que ce soit pleinement intentionnel, mais le film est drôle par moments. On s'amuse bien de l'absurde du récit. Mathieu Kassovitz est bon dans le saugrenu. Ce Sébastien Nicolas se fait complètement dépasser par sa quête de personnalité et d'importance. Dérouté par la tournure que prennent les événements, il est drôlement paumé. La part de drôlerie du film fonctionne très bien. Un illustre inconnu est peut-être plus drôle que prévu car le fond du propos est ambitieux.
Le besoin de reconnaissance, de notoriété ou d'aventure humaine; ce sujet est intéressant. L'idée est de montrer le désespoir et la tristesse d'un oublié. La première erreur est peut-être le choix d'en faire un thriller moins psychologique que jouant avec le suspens. Le mélange entre dérision et sérieux ne fonctionne pas franchement. Pas sûr que le ton grave du propos eut été indispensable. En fin de compte le sujet n'est pas vraiment traité en profondeur. On reste en marge de cette histoire atypique. Pas vraiment d'empathie pour le personnage de Sébastien Nicolas. Son soit disant manque de personnalité n'excuse pas une absence de ressenti. Au contraire le personnage est accablé de frustrations. Mais le regard reste trop extérieur. L'intrigue est à la fois pas assez approfondie et trop imagée. Elle part surtout dans des divagations qui coupent de toute réalité et donc d'identification au(x) protagoniste(s). Quand l'histoire se retrouve pendue à un drame, les choix qui sont faits ne sont pas ceux escomptés. Néanmoins la construction du récit est maîtrisée.
Grosse qualité de mise en scène, sur le montage sonore en particuliers. Craquements, bruitages, volume et musique créent une ambiance assez saisissante et fidèle. Un illustre inconnu commence de manière explosive. Ce qui introduit l'histoire de manière assez intelligente. Un jeu temporel qui n'était pas indispensable mais qui relance très bien le film à sa moitié.
Après un triomphe comique avec Le Prénom, Mathieu Delaporte signe une œuvre intéressante mais ambivalente. Entre thriller trop poussé et farce poule mouillée, le film ne trouve pas sa voix. Quoique la part de burlesque est probante. La performance de Mathieu Kassovitz s'inscrit dans cette ambiguïté, il est drôle mais pas touchant.
Marie-Josée Croze est encore remarquable.
Le film aurait put être intimiste ou complètement absurde, mais se perd dans toute sa forme polar bizarroïde.