Amis de la gnôle, la gnôle nous attend !
Magasin Cultura, par un bel après-midi d'été. L'air conditionné est fort agréable et les stands de promo' DVD pullulent. Et voilà que je tombe sur "Machete", 9.99 euros. Un film WTF à ce prix là, why not ?
Je me le lance le soir même, je rigole toujours autant que lorsque j'étais allé le voir au cinéma (surtout lors des séquences de publicités de propagande pour la campagne politique de McLaughlin - De Niro tu es mon idole !).
Et je me dis : "Tiens, je me remettrais bien "Une Nuit en Enfer" !". Chose faite, d'où ma critique aujourd'hui.
Un film qui a mal vieilli, certes. Mais d'un autre côté, c'est le genre de film qui s'enrichit au fur et à mesure que les années défilent, car les intentions esthétiques de l'époque transpiraient déjà les références cinématographiques d'antan (grain de l'image, transitions grossières, zoom foireux, dialogues savoureux, etc.). Bref, n'oublions pas que Tarantino est à l'écriture, donc on connait bien le goût prononcé du Monsieur pour les oeuvres datées.
La scène d'ouverture en est un exemple clé. Supérette sur bord de route déserte, ambiance poisseuse, flic texan avec Ray Ban, bouteille de Jack Daniel et, enfin, dialogue aux petits oignons totalement imagé avec des termes culinaires et gastronomiques. Une séquence jouissive, surtout qu'elle se termine par une fusillade des plus improbables !
Mais le plus "marrant" avec "Une Nuit en Enfer", ce n'est pas son style "Old School", mais plutôt le fait que ce long-métrage se présente comme un pot-pourri de plusieurs styles, de plusieurs intentions créatives.
1/ Film littéralement coupé en deux, avec une première moitié filmique basée sur la cavale de deux hors la loi (ce qui implique flingues, alcool, hôtel miteux, bain de sang, otages, répliques verbales basées sur la menace, etc.). La deuxième moitié du film, quant à elle, part en mode "survival" total, avec des vampires hideux aux visages surhumains, un arsenal de survie improbable (le fusil à pompe - croix de Dieu est une merveille !) et son lot d’hémoglobine qui tâche le parquet.
2/ Des acteurs à contre-emploi : Clooney en bad boy nerveux ; Keitel en ancien curé pacifiste ; Lewis en gamine sage et posée ; Salma Hayek en bimbo fatale (ce n'est pas réellement un contre-emploi, en fait...).
3/ Des acteurs avec le rôle de leur vie : Tarantino en psychopathe tueur, violeur et obsédé (par le pied féminin, bien entendu) ; Tom Savini en "Sex Machine" (sa tête de mi autiste / mi loup-garou est un régal !).
4/ Pour sa séquence à part, mêlant émotion, excitation et évasion : la lap-dance de Hayek (une séquence légère, parfaitement montée et filmée). Un moment de rêverie pur !
5/ Une tonalité sérieuse dans l'écriture, lors du traitement de la folie, de la captivité, du statut d'otage.
6/ Une tonalité clownesque dans l'écriture, lors du traitement de la peur, du fantastique et du "happy end" (bin ouais, ça ne vous a pas fait de la peine de voir la petite Kate recouverte de sang, privée de son père et de son frère, complètement seule à côté d'un bar à vampires abandonné, à la fin du film ?).
7/ Une exigence esthétique variable, à vrai dire coupée en deux, elle aussi : soignée et maîtrisée dans la première partie du film. Plus folle et imprécise lorsque les vampires débarquent (mais c'est normal, Tarantino est mort...).
Du coup, dans "Une Nuit en Enfer", on retrouve du "Desperado", du "Kill Bill", du "Boulevard de la Mort", du "Planète Terreur", du "Machete"... Bref, du Tarantino, du Rodriguez, du "Grindhouse". "Une Nuit en Enfer" est donc leur film expérimental, leur coup d'essai dans le style "Film WTF, mais avec une belle intention derrière".
Un film à regarder pour ses phases verbales (toutes cultes !), pour son casting primeur, pour son grain pellicule et pour son esprit "Essayez-vous et détendez-vous".
Pourquoi pas ? Après tout, ça fait du bien...