Adam McKay remet le couvert à la table de la dénonciation délicieusement satirique des torts et travers du pays le plus influent sur la scène internationale. En reprenant les codes de The Big Short - montage vitaminé, vraies-fausses images d'archives, voix off omnisciente - ainsi que ses acteurs fétiches (Christian Bale, Steve Carell en grande forme), Vice parvient merveilleusement bien à amener le rire dans des situations de la plus haute gravité. Le scénario facétieux, jonglant entre fiction et réalité, tient à rappeler que le destin de chaque "grand" homme ne tient qu'à un fil (de pêche), qu'à une poignée d'actions qui peuvent changer le cours du monde. Christian Bale, ventripotent, gonflé à bloc, interprète avec justesse Dick Cheney, homme insaisissable, a priori peu charismatique, à l'aura surpuissante. Outre les mimiques, la posture avachie, l'aspect physique peu réjouissant, il restitue à merveille l'âme d'un tel personnage en lui prêtant une voix caverneuse, comme sortie des profondeurs d'un esprit qui se logerait dans la face immergée de l'iceberg. On notera que Dick ne rit qu'une fois pendant les 2h12 du long métrage - ce qui n'est pas le cas du spectateur (on peut en effet rire de tout). Un grand moment de cinéma politique, et de pêche au gros - on devrait gouverner un grand empire avec autant de simplicité que l'on fait cuire un petit poisson.