Demon’s souls fait figure de miracle dans le monde du jeu vidéo. Il était à la base prévu comme successeur de la série des King's Field (sur PS1 et PS2) et une commande de Sony au studio From Software. Le développement s’avéra calamiteux et faisait du surplace jusqu’à ce qu’Hidetaka Miyazaki rejoigne le projet et reprenne les choses en main. Il introduisit de nombreux remaniements pour arriver à la version que l’on connaît actuellement. Le président de Sony ne crut cependant pas énormément au produit et le jeu ne sortit dans un premier temps qu’en Asie. Mais le succès critique et auprès des joueurs (inattendu) conduisit à une distribution en Occident.
Cette petite introduction permet de souligner que certains jeux légendaires connaissent parfois une genèse très compliquée. Je dois dire pour ma part que je suis tombé complètement par hasard sur Demon’s souls, en farfouillant dans le rayon « occasions » d’un petit magasin.
Au départ, j’ai été un peu rebuté par le challenge extrême proposé, avant de peu à peu y prendre goût. L’aspect « oldschool » obligeant le joueur à recommencer un niveau dès son décès, m’a transporté assez vite plusieurs années en arrière, à l’ère sadique de la NES.
Il n’y a évidemment pas que cela qui explique cette attirance vénéneuse car Demon’s souls fait quasi un sans-faute. Tout y est si travaillé : le « level-design », les pnj, les monstres vicieux, les boss impressionnants, les bruitages inquiétants, la musique épique… Et le plus beau, c’est que tout cela s’imbrique parfaitement pour constituer un tout d’une grande cohérence. On pourrait arguer que l’histoire est un peu nébuleuse et en retrait, mais en réalité elle est portée par les dialogues et les descriptions d’objet. Donc, loin d’être hermétique, elle ne se révèlera qu’aux joueurs les plus curieux et désireux de la connaître.
Pour en revenir au « level design », ce qui m’a le plus frappé, c’est la verticalité des environnements. On monte des échelles, descend des escaliers, prend des ascenseurs…concepts directement hérités des jeux de plate-forme en « side – scrolling » mais ici repris dans un jeu 3D (à une époque remplie de GTA-like aux cartes toutes plates, j’ai trouvé cela assez rafraîchissant). Cela contribue à rendre le jeu très imprévisible, on ne sait jamais sur quoi on va tomber, d’autant plus que les ennemis sont disposés souvent de manière très vicieuse, attendant dans l’ombre, au détour d’un couloir ou derrière une porte le moment le plus opportun pour bondir sur le joueur. A cela s’ajoute aussi des balades au bord du vide particulièrement stressantes, où le moindre faux pas se conclut par une chute d’une centaine de mètres. C’est certainement cela la plus grande réussite de Demon’s souls, parvenir par son seul environnement à mettre une pression terrible sur le joueur manette en mains. Et pour ne rien arranger, l’ambiance graphique se veut glauque à souhait et typiquement lovecraftienne, ce qui ajoute évidemment un surplus de pression, comme si il n’y en avait pas déjà assez.
En conclusion, Demon’s souls demeure mon jeu préféré de tous les temps, pour ces qualités précitées, pour l’audace de son géniteur qui a su faire prendre une direction novatrice à une série alors moribonde, pour sa vision très personnelle et adulte de l’ « heroïc-fantasy » parfaitement transposée.
Pour tout cela, merci Monsieur Miyazaki