Un bon jeu qui pouvait être grand

Inutile de revenir sur les qualité du titre, (gameplay, direction artistique et level design), il y affectivement peu à redire sur ce qui a été dit très bien dans les nombreux articles parlant du jeu. Rien qu'avec ces points, le jeu est bon, très bon même, allez hop 9/10 et Cocorico on a le jeu de la fin de l'année au milieux de toutes les suites déjà vu qui vont sortir, c'est super, on est hype, emballé c'est pesé ! ... Ben non, moi j'marche pas !

Je ne peux m’empêcher de tiquer et de déceler un brin d'emphase médiatique dans des tests un peu trop euphoriques (et chauvins ?).

Peut être que les critiques regrettent l’époque ou Thief, Deus EX, No one lives for ever étaient rois. Peut être qu'ils étaient du coup un peu trop ravis d'accueillir un nouveau jeu du genre au point de perdre un peu en objectivité ? On peut les comprendre tant ce genre est joussif et offre des possibilités ... Sans parler que c'est une grande bouffée d'air frais au milieu des fps militaristes et nauséabonds à la mode dans les super marchés...

Hélas pour ma part la joie d'avoir pu mettre la main sur un nouveau fps d'infiltration/action ne m'a pas suffit. Non Dishonored n'est pas mon jeu de l'année ni même un grand jeu tout court tant certains défauts m'ont profondément déçu.

UN THIEF POUR LES NULS ?

Tout d'abord la richesse du gameplay et les possibilités "infinies" pour aborder les missions et venir à bout de ses adversaires : Oui on peut effectivement tuer de façon variées comme les trailers nous l'ont montré, vous pourrez poser une mine sur un rat, le posséder et l'envoyer s'exploser sur un garde ou bien ralentir le temps quand vous vous ferez tirer dessus et retourner la balle contre votre adversaire blablabla... Et ?... pas beaucoup plus au final... Cela est en plus bien peu utile dans le jeu et surtout très énergivore en mana. Le reste donc, les vrais méthodes que l'on va utiliser quand on veut jouer "efficacement" , elles sont tout ce qu'il y a de plus ordinaires pour le genre... In fine, on se retrouve le plus souvent à y aller à l'ancienne en étant en plus grandement aidé par le blink. une trouvaille assez jouissive qui apporte effectivement LA grande signature de gameplay au titre. Mais bon le blasé que je suis voit aussi dans cette téléportation avant tout une méthode pour casualiser le jeu et en faire un thief pour les nuls....

Bon ça, ce n'est pas méchant ce sont juste deux promesses de features un peu trop sur-vendu par le marketing ce n'est pas ça qui a gâché mon expérience sur le jeu. Mais je tenais à le souligner par rapport à ceux qui se montrent à mon avis un peu trop enthousiastes là dessus.

UN UNIVERS SABORDE PAR SA MISE EN SCENE

Non, le vrai gros défaut de Dishonored qui lui fait rater le coche. tient dans sa posture, le cul entre deux chaises, tiraillé entre la liberté que veut offrir son gameplay et l'univers magnifique que l'on ne pourrai vraiment savourer qu'avec un meilleur scénario, mieux mis en scène et peut être un poil plus dirigiste ?

En l'état même si je suis vraiment rentré dedans pour son gameplay j'ai eu sans arrêt un gout amer et la frustration de voir à quel point l'exploitation de leur univers est faible. Alors qu'il y a une direction artistique phénoménale un travail fou sur un background qu'on imagine colossale d'après les livres que l'on peut s'amuser à lire et les graffitis sur les murs...Pourquoi l'histoire est si pauvre, vite expédiée et surtout aussi peu impliquante ?

C'est une petite chose ? Je pinaille ? Certes, mais cette touche finale fait partie de la checklist actuelle de ce qui fait un grand jeu AAA de 2012 selon moi.

Uncharted est un exceptionnel simulateur de blockbuster et d'indiana jones car on a une vraie empathie pour le personnage grâce à sa mise en scène et ses dialogues. Sans eux il serai juste un bon tps techniquement beau et au gameplay fluide avec un personnage de jeu video stéreotypé de plus, pas l'épopée hollywoodienne qu'on connait.

Ici, bien que le jeu s'appelle Dishonored on n'a aucune empathie pour le personnage et on ne sent jamais ce déshonneur pour lui. L'introduction est à ce titre un piètre point de départ tant la mise en place de l'intrigue est abrupte et maladroite. Juste après l'assassinat de l'impératrice, une brève scène de procès (avec quelques réponses possibles montrant notre colère ou notre abattement) ou d'une foule nous jetant des tomates auraient suffit pour qu'on se sente plus impliqué.

En réalité on se retrouve immédiatement dans la cellule après un interrogatoire superficiel et rien vraiment ne nous fait ressentir les 6 mois écoulés, aucune idée de la souffrance du personnage, de son deuil, pas une larme (à peine un gémissement lors d'une petite scène de torture) rien dans le déroulement de la narration ne m'a prit à partie personnellement. Rien n'a joué sur mon affect pour me faire ressentir cette vengeance et pour m'inciter à la jouer plus bourrin que finaud. Rien n'est fait pour que je ressente moi même l'envie de ré-freiner ma pulsion vengeresse sur les auteurs de ce complot ! Je ne les ai pas haï, ils n’étaient que des cibles, des marqueurs visibles sur l’écran que je devais atteindre et éliminer. Comme je le voulais. certes, mais rien de plus.

UN RENDEZ-VOUS MANQUE AVEC L'HISTOIRE

Il y avait pourtant toutes les pièces pour ajouter cela a l’expérience de jeu, rendre le joueur lui même tiraillé entre la folie meurtrière et le sang froid. Cela aurai été formidable d'immersion et de puissance évocatrice voir même, allez je le dis : du jamais vu dans un jeu ! Mais non, au final c’était "joue la finaud et sans trop tuer pour débloquer la bonne fin" ou "bourrin pour te défouler, débloquer les trophée qui vont bien et la fin cracra." Très dommage à mon sens et comme vous avez du le comprendre pour moi ce fut très très frustrant !

Rah quand je repense à la fin - la dernière récompense pour un joueur après des heures d'aventures - qui est honteusement expédiée en laissant plein de points de compréhension en suspend...soupir !

En outre je pense sincèrement que le choix de faire un héros muet est une mauvaise idée et un bon gros gâchis du potentiel de l'univers du jeu. Qu'on ne me cite pas bioshock comme contre exemple, le jeu a 5 ans et le fait que le futur héros de bioshock infinite semble bavard et interagisse régulièrement avec l'autre héroïne prouve qu'il est nécessaire aujourd'hui d'aller dans ce sens pour intensifier l'immersion et magnifier le monde qui a été créé.

Après je pense que c'est une question de partie pris, les gars d'Arkane ont surement fait un choix narratif qui découle de l'héritage (habitude?) de leur deux précédents jeux. Mais perso je ne trouve pas que cela fonctionne dans un univers aussi novateur et marqué. Surtout comparé à Arx fatalis ou Dark Messiah qui étaient des RPG à l'univers heroic fantasy plus lambda et où la relative transparence du personnage est une habitude du genre.

Donc voilà un petit 7/10, qui hésitait même a être un 6 quand j'ai fini le jeu après 20h. Mais un 7 qui veut quand même dire à Arkane Studios (que j'aime d'amour) : faites moi un 2, faites moi rêver !