Randonnée pédestre d'un quinquagénaire nostalgique.

Le Spartan-II de cette jaquette trone depuis longtemps dans la liste des idoles masculines de mon enfance.
Si beaucoup d'autres ont perdu de leur superbe à mes yeux, les années passant, le matricule 117 reste lui cet éternel enfant soldat devenu trop vite grand et pour lequel ma sympathie n'a jamais été mise à mal.


Cela tombe bien car de John il est entièrement question dans ce sixième épisode [principal] de la série l'ayant vu naître...


En prélude une question peut se poser.
Que vaut Infinite en tant que jeu, hors contexte chaotique du marketing, en faisant abstraction du teasing et des espérances de chacun ?


L'on exagère assez souvent son mépris pour un produit de divertissement quand la frustration et la déception ont pris le pas sur une certaine objectivité. On se concentrera alors moins sur ses qualités pour exacerber ses défauts. Sans nuance, du fait de l'agacement qu'aura engendré le fantasme déçu du jeu qui se "devait" d'être parfait. Irréprochable...


Alors on ne va pas se mentir, oui il y a des problèmes. Majoritairement des défauts relatifs à la façon dont on abordera notre périple. Soit un manque de rythme du à ce monde ouvert que l'on peut d'ailleurs considérer comme convenu et dépassé, des graphismes absolument pas à la hauteur d'une production de cette envergure, une écriture certes pas des plus fine (quoique Halo n'a jamais été un manifeste aux psychologies complexes), une certaine redondance des objectifs optionnels, puis un manque de finition globale qui se ressent plus le temps avance. Comprenant quelques bugs éparses aux degrés d'agacement divers, des arbres fait d'un alliage si indestructible que même un Big Fucking Scorpion serait incapable de les égratiner,
un beau travail sur la lumière compensant une excécrable gestion des ombres, ainsi qu'une optimisation technique à revoir ; ces textures au-delà de l'ignoble en cas de zoom avec le sniper sur les structures en acier me hantent encore quand j'écris ces lignes.
Apres je précise jouer sur One S...


Malgré cela, je prends personnellement grand plaisir à explorer Zeta. Il concrétise un vieux souhait de gamer ayant émané du second niveau de Combat Evolved, l'opus fondateur sorti en 2001.


Vingt ans bordel, je me sens vieux.


Pour ceux qui prennent le train en marche, il s'agissait d'une gigantesque map ouverte ou le joueur devait enfourcher son quatre roues motrices pour chercher et récupérer des rescapées du crash de notre vaisseau afin d'élaborer une résistance face à une hégémonie extra-terrestre composée de plusieurs espèces issues d'autant de planètes, réunies sous une même théocratie ; le Covenant. Tout ceci sur une structure antique nommée Halo, un Anneau-Monde alors seulement découvert par l'humanité.


Déjà les bases d'un univers toujours en expansion étaient posés et l'ambition sans égale pour un FPS en ce temps-là, que divers médias auront approfondi au-delà de ce qu'a jamais pu produire la concurrence, Mass Effect en tête avec ses rares tentatives littéraires...
Les choses ont cependant changé dans le paysage vidéo-ludique en deux décennies. Et pour la license fétiche de Microsoft il y a eu des hauts, beaucoup de bas, de franches réussites et de beaux ratages.


Pour les qualités de ce nouvel opus au pitch assez semblable à la description ci-dessus, sorte de retour aux sources, citons d'abord une Bande-Originale plus convaincante que dans l'opus précédent et toutefois aux antipodes de celle, fabuleuse mais souvent inaudible (en jeu) de Halo 4 par Neil Davidge, et sa mitraillette de thèmes somptueux balancés façon Best-Of sans le moindre recyclage ; achetez ce disque, c'est un ordre.


Ici elle s'avère moins grandiose (malgré une omniprésence bienvenue du piano) et néanmoins constante tout le jeu, même les périodes pédestres ou de calme prolongé.
Mélangeant d'anciennes sonorités et de nouvelles compositions, certaines apportent une dimension plus profonde à des personnages autrement écrits en demi-teinte.


Le trio principal sort d'un lot relativement quelconque malgré un antagoniste pas unidimensionnel hélas inexploité.
Quant aux dialogues, d'aucuns pourraient les trouver niais ou forcés mais dans le contexte ils passent bien et m'ont paru crédibles.


D'entrée on nous met dans le bain et John est battu.
S'il lui est arrivé d'échouer dans ses missions, il n'avait encore jamais perdu le moindre combat individuel. Et cet échec associé à d'anciennes blessures auront dès lors souvent raison de sa neutralité de façade.


Si l'on peut s'en plaindre, il m'apparaît depuis longtemps implicite qu'il s'agit d'un Spartan raté vis-à-vis de l'implication émotionnelle qu'il manifeste malgré son éducation strictement militaire. En cela aucun de ses "frères" ne lui ressemble et Infinite est le prolongement cohérent de cette idée constamment survolée jusqu'à aujourd'hui.


Militaire endurci depuis ses six ans, voir notre héros déchu s'agenouiller pour se mettre à hauteur d'homme devient l'aboutissement d'un parcours qui aura mis à bout l'humain fragile qu'il a toujours été sous l'armure massive, la différence significative entre cette aventure et les antérieures étant qu'il lui arrivera d'exprimer ses émotions plus frontalement via un récit global qui se veut l'antithèse de la première trilogie. Sobre, sans artifices pompeux, rarement explosif.


Dans les anciens jeux de Bungie, hormis la relation naissante Cortana / 117 et le parcours de Vadamee, il n'y avait rien à quoi se rattacher véritablement. La mise en scène épique alliée à des dialogues souvent (trop) hollywoodiens (j'exècre affectueusement Halo 3) ne sauvaient pas un scénario basique exposant les derniers mois d'une guerre qui aura duré trop longtemps et sur laquelle on ne s'apensantit jamais humainement, les scénaristes préférant pousser le curseur fun et grand spectacle au maximum.


Ce n'était pas un mal, ça se suivait avec plaisir et le récit était même jalloné de moments forts, mais l'on ne s'embarrassait pas suffisamment du facteur psychologique de notre héros. Tout l'inverse de ce qu'offre la campagne de Infinite.


L'exécution fait parfois un peu peine mais il y a du fond. Et si l'on peut legitimement arguer qu'il vaut mieux ne rien en faire que d'en faire mal, disons que je salue la tentative personnellement ; les échanges tiennent la route considérant le parcours de 117, la nature naïve de Weapon et celle plus lâche du pilote Echo.


Non, le vrai souci de la campagne se pose ailleurs.
Comme il se veut être un soft reboot de l'opus fondateur, il en reprend une structure similaire. À savoir une recherche d'une vérité et la mise en place d'une résistance éparpillée des suites d'un accident.
Un accident qui fera se résoudre hors-champ beaucoup d'anciennes intrigues mises en place dans Halo 4 et Halo 5 : Guardians.


La différence c'est qu'il n'y avait pas d'attente particulière sur Combat Evolved !


Ici, le scénario se veut le prolongement d'une fresque ayant vu apparaître de nombreux personnages dont il est légitime qu'on veuille connaître leur destin. En plus de proposer un élargissement de l'univers pour les années à venir...


Moi ça me choque pas. Il y a une toile de fond qui se tisse au fur et à mesure de nos découvertes, des logs pour comprendre le postulat de départ et même le paysage qui parfois donne des indices
Puis c'etait tellement attendu que ce soit la suite directe de Guardians... Ce partis-pris donne de la personnalité à cette campagne qui se distingue des quatre précédentes par une manoeuvre intéressante du studio, quoiqu'un poil trop audacieuse, oui, surtout pour ceux qui avaient espérer assister en live à certains événements, les vivre ou les voir prendre forme par une mise en scène léchée.
Mais bon c'est ce qu'a fait le grand frère en nous mettant au coeur de toutes les intrigues majeures de la galaxie, et autant que je sache c'est l'un des épisode le plus conspué. Bref.


Concernant le game design, un Open World peut être vide d'activités, tant que sa géographie est cohérente et le visuel un minimum avenant je pourrais juste marcher comme un con des heures durant.
Je suis de ceux qui apprécient la contemplation primaire, pouvant relier deux avant-postes sans courir, ni véhicule.


Il n'y a aucun collectible futile ou cinquante feuilles d'érables à dénicher pour débloquer une armure.
Juste un point d'intéret pour un item, un log pour une information, un campement ennemi à reprendre pour de la Bravoure visant à augmenter son arsenal, voilà ! Rien de superflu.


Aussi l'unique biome ne me dérange pas. Il y a de la variété dans l'environnement en fait, pas mal de détails, des trucs à voir. Des pics, des marais, des cascades, de petites forêts...
Les Banished n'ont certes aucun sens esthétique, plutôt pratique, mais la façon dont est justement pensé le monde explorable est difficilement critiquable, cette faction étant dominante sur l'anneau et les options d'armements assez folles au fur et à mesure qu'on libére des zones et des marines.
Marines qui oscillent entre crétinerie absolue et Q.I 230, oeil de lynx optionnel.


Ils m'ont aussi souvent été utiles que l'inverse et certaines de leurs interventions m'ont même sauvé la vie. Mais faut pas se leurrer, ça mériterait d'être plus constant.


Du reste, terminant le niveau Observatoire, je me suis revu parcourant les intérieurs de l'Arche dans Halo3.
L'ambiance, l'architecture, les lieux envahis de Jiralhanae, le côté solitaire et la musique, tout y est.
343 Industries revient aux fondamentaux, à la direction artistique originelle, sans pour autant abandonner le contexte géopolitique qui reste dans la continuité des deux histoires précédentes et le ton plus intimiste de Halo 4. Tel un bon mix des deux studios ayant possédé la license.


Les missions plus dirigistes sont d'ailleurs plus abouties techniquement, mieux maîtrisées. On comprends alors que s'il y avait plein bonnes intentions, le moteur est totalement inadapté à l'open World qui reste joli.


Pas de quoi crier à l'émerveillement, mais non plus à l'outrage cosmique.
Il y a un juste milieu quoi.


Passé les attentes et la hype considérable engendrant forcément des désaveux... Passé le budget et le temps de développement (très exagéré par le public), on est face à du grand Halo en terme de level design, de gameplay et d'ambiance sonore.
Reste qu'il est très moyen à regarder, que le monde ouvert n'était franchement pas nécessaire et que le scénario aurait pu être plus ambitieux même si ça reste relatif.


La production du projet Halo 6 a bien commencé en 2015 mais le projet fût remanié plusieurs fois en plein parcours. On parle plus de pistes de réflexions précédant une idée fixe ; pratiquement tout ce qui a été fait avant 2019 n'est donc pas dans la mouture finale dont le développement concret aura pris deux ans.


De l'argent a été dépensé, beaucoup et moins que 500 millions, mais les deux tiers n'ont servi à rien.


Ceci considéré, je trouve le résultat moins foutraque qu'on pouvait le craindre. Même plutôt honorable, avec une ligne directrice qui se tient.


Sachant que la campagne n'est que le point de départ d'une histoire plus vaste qui sera agrémenté de nombreuses extensions, supposément, j'ai hâte de continuer l'aventure ; on fait table rase d'un passé envahissant pour emprunter de nouvelles directions. Vivement.


-> Complément idéal de cette critique ne décrivant que l'expérience solo, je vous renvoie à celle d'un confrère Sens Critique concernant le multi-joueurs et avec laquelle je m'accorde parfaitement.


https://www.senscritique.com/jeuvideo/Halo_Infinite/critique/259286795

Vince_Axl
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le 11 déc. 2021

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Vince_Axl

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