I’m gonna show you where its dark, but have no fear.

On peut le dire, Hotline Miami a réussi a faire son trou dans le milieu du jeu vidéo indépendant. En effet, entre son gameplay nerveux, son ambiance "trip psychédélique" et son ultra-violence, le jeu a su faire parler de lui. Et rendons à César ce qui appartient à Napoléon, tout cela est mille fois mérité car le premier bébé des deux créateurs de Dennaton games est une tuerie (dans tous les sens du terme).


Tout d'abord, il réussi à se démarquer par une ambiance complètement hallucinée. Dès l'écran titre, le jeu impose son style : titre écrit en russe, nappe de couleur ondulante aux couleurs flashy capables de tuer un épileptique en deux secondes… l'ambiance est donnée, rappelant un mélange funky entre les premiers GTA et un jeu vidéo de Suda 51. Le jeu donne ainsi l'effet d'un trip sous ecstasy, somptueusement cru et violent. Mais cette violence omniprésente , hors des meurtres sans implication émotionnelle d'un GTA ou d'un quelconque jeu de guerre, réussi à marquer le joueur, en le plaçant quelque part entre l'attrait meurtrier et le dégoût pour chaque mort. On n'est loin d'une violence banalisée et sans jugement. En effet, Hotline Miami, tant par sa volonté de montrer crûment les morts infligées que par son scénario, donne une conséquence à ses assassinats à la chaîne, en montrant la lente déportation du héros dans la folie. Cette violence est particulièrement ancrée dans le scénario : on est à chaque fois rappelé à nos actes sanguinaires, tant par les visions du jeu que par les dialogues qui semblent presque autant adressés au joueur qu'au personnage (d'ailleurs lui-même très en retrait, tel un avatar du joueur, muet face à tout ce qu'il provoque).


D'ailleurs, c'est pour ça que je préfère la « fausse» fin à la vraie. Elle nous met vraiment plus en face de nos actes, grâce à cette matérialisations des créateurs du jeu. Oui, tout cela est un jeu. Oui, tu es un meurtrier, ce qu'on t'as proposé n'a aucune importance. Seul ce que tu as fais en a : « On a tué personne. Toi, si. »
Mais la vraie est bien aussi, hein. Elle est juste vachement plus basée sur l'intrigue.


Les graphismes du jeu donnent un cachet old-school. On se retrouve ainsi avec un mélange psychédélico-arcado -punk aussi délicieux qu'une crêpe fromage-banane-nutella (sisi, testez, c'est truculent ). Ce mélange est présent aussi dans le gameplay en un shooter vu du dessus avec des mécaniques simples, mais parfaitement huilées, maîtrisées et d'une redoutable efficacité. Tout va à sang à l'heure, sang qui coule d'ailleurs à flow, flow qu'on atteint d'ailleurs très vite. Une sorte de frénésie envahit le joueur durant ses massacres, perpétués mille fois grâce aux joies du die & retry. Le jeu n'est pas dur, mais il est exigeant : il faut s’imbiber du gameplay, étudier chaque pièce, hiérarchiser les mouvements qu'on va faire (je choppe la batte, j'enfonce la porte sur le mec, en tue un deuxième, envoies la batte sur le troisième et achève ceux qui rampe), et enfin appliquer. On meurt souvent, sans que la mort ne soit trop punitive, et au final, on réussit vite la vingtaine de niveaux que propose le jeu. Trop vite ? Sans doute, et même si on sera encouragé à refaire le jeu pour optimiser notre parcours ou pour découvrir tous les secrets du jeu (voir pour le scoring), il faut reconnaître que le tout est un peu court, et qu'une fois la dizaine d'heure passée à ratisser les divers motels, la replay-value n'est pas assurée. Mais patience, un deuxième volet arrivera bientôt.


Finalement, Hotline Miami porte et même assume sa dualité : jeu hyper-violent critiquant l'hyperviolence et shooter décérébré remarquable d'intelligence. Rarement un jeu ne se sera autant servit de son médium pour transmettre son message : ici, on ne peut juger l'hyperviolence, car c'est nous qui la commettons, et c'est le jeu qui nous critique tout en nous obligeant à la faire. Au final, c'est tout un rapport à l'autorité qui est critiqué, et même notre rapport au ludique . Ainsi, Hotline Miami est tout à la fois un étrange essai vidéo-ludique, et un jeu extrêmement plaisant.


PS : Pour ceux qui ont fini le jeu (ou n'ont pas peur de se faire spoiler), je ne peut que vous inciter à lire l'excellente critique de K4rma qui analyse dans le détail le rapport entre ludicité et narrativité dans le jeu, et en fait une critique que je ne saurai égaler, même en rêve…
Critique-ception, une critique dans une critique…
Comme la vache qui rit.

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le 21 févr. 2015

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Daevaorn

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