Blue is the warmest paradox

Pour écrire ma première critique, il me fallait quelque chose de grand, de beau, de magnifique, quelque chose qui m'avait chamboulé et torturé l'esprit. Et Life is Strange apparaît la, tel le Messie du jeux video narratif. Plus tellement un simple jeu, et pas tellement une bête série non plus, cet OVNI nous prouve que le jeu vidéo est bel et bien un forme d'art. J'ai pour principe de mettre un nombre minimum de 10 aux œuvres que je note ( la perfection n'existe pas ) mais pourtant, celle ci le mérite sans hésiter.

Alors LiS c'est quoi ? C'est un jeu épisodique ( au nombre de 5 ) où vous suivrez les déboires temporels de Max Caulfield, une jeune étudiante en photographie fraîchement arrivée à Arcadia Bay pour entrer dans l'école de ses rêves. Mais c'est finalement la déception qui gagnera Max, entre une ville ennuyeuse, les habituelles garces gloussant dès qu'une occasion se présente ou encore un établissement finalement pas si intéressant que ca... Mais l'apparition de pouvoirs ( remonter le temps sur une durée relativement courte ) et les retrouvailles avec Chloe Price, une punk un poil rebelle qui était autrefois votre amie d'enfance, vous entraîneront dans une enquête autour de la disparition mystérieuse de la meilleure amie de Chloe, Rachel. Sachant que vous n'avez que peu de temps, puisque vous avez eu la vision d'une tempête qui détruira la ville dans 5 jours !

Je passe rapidement sur le gameplay, relativement simple, qui se base la plupart du temps sur des choix de dialogues ou de situation. Le coeur du jeu n'est pas là.

Le jeu est avant tout très beau, avec une direction artistique formidable, et des couleurs assez pastels rendant le tout très agréable à observer. Les jeux de lumières sont d'ailleurs exceptionnels.

Le véritable centre du jeu repose sur les personnages ( très attachants ) et leurs intéractions, ainsi que sur l'enquête. Tout semble tellement cohérent, réfléchi et sincère. Une réelle ambiance à la fois légère et triste se dégage, peut être celle d'une mélancolie adolescente. Le jeu se montre intelligent et propose de réelle sources de réflexion ( sur le mal-être, la mort...) pouvant vous confronter à des pics dramatiques assez intenses, certains choix cornéliens ne vous laisseront pas toujours indemne, vous forçant d'ailleurs à remonter le temps pour voir les conséquences de l'autre choix... Bon nombre de passages mémorables m'ont laissé anéanti, les bras ballants et les larmes aux yeux. On a toujours peur de faire mal, de blesser quelqu'un, mais il n'y a pas tellement ( ou rarement ) de vrais "bons" choix. Plus vous avancerez dans le jeu, plus l'ambiance sera d'ailleurs pesante et sombre, quittant l'aspect pastel des premiers épisodes...

Et puis, il y a Chloe Price... Vous ( c'est à dire Max Caulfield ) passerez votre temps à sauver ce personnage intenable, assez bipolaire, et aussi relativement fragile. L'amitié qui se dégage entre les deux personnages est tellement bien dirigée, écrite, qu'on y croit sans hésiter, et vous ferez tout pour protéger cette fille aux cheveux bleus coûte que coûte. Le personnage de Chloe est d'ailleurs le meilleur que j'ai pu voir depuis longtemps dans les jeux vidéos.

Ce jeu dépasse son simple statut de divertissement, c'est une véritable ode à la vie et à l'amitié : il est à la fois rafraîchissant et aussi très émouvant. Certains passages assez contemplatifs se rapprochent du cinéma et apportent une vrai poésie à l'ensemble, qui est d'ailleurs bardé de références ( assez geek ) et de symbolique.

Et il ne faut pas oublier la BO, qui colle parfaitement aux situations, et qui est simplement magistrale.

Dontnod signe ici une expérience narrative exceptionnelle, transportant le sujet dans son univers, toujours avide d'en savoir un peu plus, et le faisant passer par toute sorte d'émotion. Un sorte de grand 8 poétique et émotionnel en fait.

En plus, le pire, c'est que ce truc là agit un peu comme une drogue : je l'ai fait d'une traite ( tous les épisodes étaient sortis ) et il m'a cruellement manqué. Difficile de se remettre à un jeu "normal" après celui-ci...

Ainsi LiS surpasse Walking Dead ( même type de jeu narratif ) sur bien des domaines. On pourrait bien sûr reprocher le manque d'importance de certains choix, la synchronisation labiale pas forcement parfaite et d'autres défauts relativement minimes, mais le résultat est pour moi sans équivoque : une réussite totale, qui touche en plein cœur.