LizardCube nous avait offert en 2017 le merveilleux remaster de The Dragon’s Trap. C’est encore un studio français, Game Atelier, qui balance de l’amour fin 2018, avec un nouvel héritier adoubé par les créateurs originaux de la série Wonder Boy eux-mêmes. Ce titre, c’est Monster Boy et le Royaume Maudit, et c’est de la bonne. Épicée certes, mais surtout extrêmement goûtue.


Au royaume animal, le lion est roi, l'homme devient fou


Au-delà de toute considération nostalgique, le jeu vidéo n’est peut-être jamais aussi bon que quand il s’éprend d’aventure, qu’il vous équipe d’une épée et d’un bouclier, et vous demande de sortir d’un cocon tranquille, en vue d’accomplir une grande destinée. Le fameux mono-mythe de Joseph Campbell qui prend dans Monster Boy les traits de Jin, un jeune garçon aux cheveux bleus vivant tranquillement sous les palmiers. Son royaume est bientôt touché par une malédiction transformant tous les habitants en animaux. Il n’échappe évidemment pas au sort que l’on doit à… l’oncle de Jin, devenu un peu fada. Le garçon est désormais un cochon pouvant dénicher des éléments cachés grâce à son flair, et écraser ennemis et mécanismes avec son postérieur.


Et c’est parti pour une odyssée, à la recherche des différentes orbes animales qui doivent permettre de sortir le royaume du pétrin. Monster Boy jouit d’un authentique et doux parfum d’aventure, où se mêlent les senteurs mystérieuses des ruines et des temples, la lumière des côtes et l’obscurité des souterrains. Le jeu sait se faire aussi horizontal que vertical, et varie les plaisirs des yeux. Des oreilles également, l’équipe japonaise derrière l’OST (dont fait partie le légendaire Motoi Sakuraba) ayant accompli un travail délicieux, réarrangeant les thèmes classiques et inoubliables de Wonder Boy tout en en proposant des originaux qui restent en tête sans jamais agacer.


Si The Dragon's Trap avait pris le parti du dessin à la main, du crayonné, Monster Boy opte pour une identité plus colorée, plus chaude. Tout est fait avec soin, des décors travaillés aux personnages qui bénéficient d'expressions attachantes. La réalisation joue parfois avec l'arrière-plan pour quelques phases de plates-formes amusantes, bien que trop rares. Le ton se veut léger, voire même comique. Certaines réparties et autres calembours font mouche, et Monster Boy n'hésite pas à parodier les codes du jeu d'aventure pour mieux leur rendre hommage.


Pour ce qui est des arcanes de la série dont il se veut le successeur, le titre a tout bon. Le gameplay suit l'évolution des transformations de Jin (il y aura aussi le serpent, le crapaud, le lion et le dragon) et le challenge proposé s'adapte évidemment aux nouvelles capacités. Il faudra jouer des atouts des uns et des autres pour progresser dans l'aventure qui se révélera bien délicate par moments.


C'est bon comme là-bas, dis


En effet, Monster Boy est exigeant, parfois pute. Dans une optique “à l'ancienne”, le défi est bien présent que ce soit sur les phases de plates-formes, de combat et surtout, des énigmes qui grilleront plus d'un neurone. On associe cela à un level design intelligent, et on obtient un cocktail excitant.


Tous ces éléments font donc de Monster Boy un épisode digne de la saga, notamment en termes de game design. À la différence notable que la quête principale connaît un pic incroyable de difficulté environ à la moitié de l'aventure, et duquel il ne redescend pas. C'est comme avec un plat relevé : c'est bon, mais mieux vaut être prévenu avant d'y goûter. Heureusement, pas mal de checkpoints sont là pour pouvoir retenter presque instantanément sa chance.


Autre distinction avec ses aïeux, le soft de Game Atelier a une construction et une progression plus verbales, moins cryptiques et moins centrées sur le village hub, même si c’est là que l’on viendra prendre l’information sur la prochaine destination. Petit à petit, le jeu réussit le tour de force de se tourner vers un metroidvania plus contemporain. En d’autres termes, une synthèse réussie entre classicisme et modernité, entre actualité et hommage.


Par exemple, on retrouve le système de pouvoirs et items limités en nombre et achetables en boutique (boules de feu, bombes, éclairs, boomerangs). Mais les transformations se font désormais à l’envi, il n’est plus besoin de passer par un autel. L'amélioration de l'équipement se fait par un système simple et intéressant, avec des runes à récolter et à faire installer par un forgeron. Cela a aussi un impact sur le gameplay parce qu'on pourra par exemple gagner en rapidité avec les bottes, ou lancer des projectiles de flamme ou de glace avec une épée.


Monster Boy finit de vouer un culte aux épisodes originels, en multipliant les références. Parmi celles-ci, il y a le temple, accessible dans le village central, représentant sur ses vitraux les héros des opus de l'époque, mais également quelques passages en pixels bourrés de nostalgie. De quoi finir de dresser un tableau des plus mignons.


Monster Boy et le Royaume Maudit est de ces petites douceurs au goût rétro réconfortant, mais pas désuet. Un an et demi après le délicieux The Dragon’s Trap, on ne se lasse décidément pas de ces jeux d'aventure/plates-formes/puzzle (voire même shoot par moments). Surtout quand on sent à la fois un vrai amour de l'œuvre originale et une réelle volonté d'offrir une expérience avec sa propre patte. Patte de cochon, cuisse de crapaud, on s'en fiche après tout : l'essentiel, c'est qu’on en redemande encore et encore.

Christophe_Zemmour
6

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le 1 avr. 2019

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