No Man's Sky
5.7
No Man's Sky

Jeu de Hello Games (2016PlayStation 4)

Vers l'infini et au-delà, on décolle pour No Man's Sky (NMS) !



Avant-propos



Je dois bien l'avouer, avant sa sortie, NMS n'avait aucun intérêt à mes yeux, et je n'avais même jamais vu le fameux trailer de l'E3 2014 qui a tant fait couler d'encre. Par contre, dès lors que j'ai commencé à suivre les let's play de At0mium, un gars que j'aime beaucoup et qui m'alimente en jeux indés depuis plusieurs années, je me suis tout de suite dis : "wow, il faut que je joue à ça", qu'importe le prix et les premiers retours très négatifs. Et ce serait injuste de dire que l'expérience ne vaut pas le coup, même si la déception est assez grande. Mais NMS fait aussi partie de ces jeux difficiles à critiquer, tant on peut y trouver plusieurs degrés de lecture.


Je dois aussi dire que je n'ai pas "fini" le jeu, c'est-à-dire que je n'ai pas atteint le centre de ma galaxie, encore moins le centre de l'univers, parce que c'est vraiment trop long et que j'ai envie de passer à autre chose (et puis de toute façon je me suis fait spoilé sur la "fin").



Alone in the universe ...



Le principe du jeu est on ne peut plus simple : parcourir un univers généré de manière procédural, de planètes en planètes et de systèmes en systèmes, avec au total un peu plus de 18 billiards (!) de planètes, autant dire quasiment l'infini. Pour vous rendre compte de la puissance de cette génération, sachez qu'il vous faudrait pas loin de 584 milliards d'années (en vrai) pour rester ne serait-ce qu'une seule seconde sur chaque planète du jeu, ça donne le vertige... L'univers est donc composé de plusieurs galaxies (plusieurs billions à priori), elles-mêmes constituées de milliers de systèmes, chaque système possédant de une à six planètes, et une planète peut ou non posséder une lune. Dans chaque système, vous trouverez également une station spatiale, et parfois une anomalie spatiale, un trou noir, ou une interface atlas.


Vous commencez l'aventure sur une planète située plutôt au bord d'une galaxie, votre vaisseau spatiale est endommagé après un crash, et votre but premier sera de le réparer pour quitter la planète. Cette phase de tutoriel vous apprend les bases du jeu : récupérer des ressources sur une planète, crafter des objets et des technologies, analyser la faune et la flore, parler et/ou commercer avec les races extraterrestres, et simplement se perdre un peu dans l'exploration. A votre disposition : un vaisseau assez basique, un multi-outil faisant office de pistolet laser collecteur de ressources, et une exocombinaison essentielle pour partir en excursion. Chacun de ces trois éléments possède un nombre défini de "slots" (un slot = un objet ou un type de ressource), dont le nombre pourra être augmenté au cours de l'aventure. Ainsi l'exocombinaison peut gagner un slot moyennant finance, un meilleur multi-outil peut être acheté ou échangé à un alien, et de meilleurs vaisseaux pourront être achetés dans les station spatiales, ou trouvés sur un site de crash.


Concernant les ressources, il y a une petite vingtaine d'éléments différents, du plus commun (carbone, fer) au plus rare (omegon, murrine), chaque élément appartenant à une catégorie définie (isotopes, oxydes, silicates ou métaux précieux). Tous ces éléments servent à crafter des objets utiles (recharges d'énergie, puces de piratage...), à créer diverses technologies pour votre exocombinaison, votre multi-outil ou votre vaisseau, ou enfin à recharger directement vos systèmes de survie (combinaison, bouclier...). Les technologies sont nombreuses et toutes utiles, il vous faudra par contre trouver les "recettes" pour chacune. Une grande partie de ces recettes s'obtient d'ailleurs en parlant avec les aliens. Ces derniers ont souvent besoin que vous leur donniez une ressource particulière, ou une réponse à une énigme.


Vous trouverez trois races aliens : les Gek (des marchands), les Vy'keen (des guerriers), et les Korvax (entités électroniques). Le truc, c'est que chaque race possède sa propre langue, et qu'au début du jeu vous ne connaîtrez aucun mot. Il sera alors essentiel d'explorer les planètes à la recherche de monolith, sortes de monuments commémoratifs propre à chaque race, qui vous apprennent toujours au moins un mot. Les aliens eux-mêmes pourront vous apprendre des mots.


Enfin, l'exploration d'une planète est à chaque fois unique. Je ne vous cache pas que la plupart des planètes que j'ai exploré étaient plutôt désertiques et caillouteuses, et il n'y en a eu peut-être que cinq ou six (sur environ soixante) sur lesquelles j'ai pu trouver de l'herbe ou de l'eau. Chaque planète possède aussi ses propres conditions climatiques (chaleur extrême, froideur extrême, toxicité, etc...) et sa propre faune et flore. Sur ce dernier point, la faune est particulièrement décevante. Non seulement certaines espèces sont incroyablement moches (là aussi générées de manière procédurale), mais surtout il n'y a quasiment aucune interaction possible, ni même de logique telle que des relations prédateurs et proies entre espèces. En l'état, toutes ces bestioles se contentent d'exister et de se balader en cercle sans jamais s'arrêter.



... among the stars ...



Déjà, sans même parler de voyager dans l'espace, il y a un nombre affolant de trucs à faire sur une seule planète. Entre les rencontres avec les aliens, la découverte de bâtiments abandonnés ou d'épaves de vaisseau spatial, les grottes remplies de ressources, ou les scans de créatures, il y a de quoi faire. Et pour peu que trouviez une belle planète, certains panoramas et couleurs sont complètement ouf. Du coup, pendant les premières heures de jeu et malgré l'inventaire un peu restreint, les effets "wow" sont nombreux, et l'on se sent vraiment l'âme d'un explorateur avide de découvertes et de connaissances. Malheureusement, le fond du jeu et le but conseillé au joueur va vite rendre la chose très répétitive et routinier.


Le jeu vous incite en effet fortement à deux objectifs : atteindre le centre de l'univers et finir la "quête de l'atlas". Ce deuxième objectif est facilement atteignable, car il s'agit de trouver des anomalies spatiales (elles se mettent d'elles-mêmes sur votre chemin régulièrement), d'y choisir la "voie de l'atlas", et de se rendre à l'endroit nouvellement indiqué : une interface atlas (ces fameux "losange" flottant dans l'espace à la Oblivion). Dans ces interfaces, on trouve un petit texte de scénario bien badant, une pierre atlas, un paquet de mots et une ou deux technologies. Il ne reste plus qu'à répéter l'opération dix fois pour avoir dix pierres atlas et déclencher la fin de la quête. Je ne spoilerai pas, mais attention ne vous attendez pas à une finalité à la hauteur des efforts fournis. Et c'est là mon plus gros problème avec le jeu, j'ai passé facilement plus d'une cinquantaine d'heures à parcourir l'espace, à suer pour essayer de m'en sortir correctement, à découvrir petit à petit un univers riche et une trame scénaristique profonde ; et tout ça pour quelques lignes de texte et un truc qui dit à peu de choses près : "voilà, maintenant, t'as plus qu'à aller au centre". Sauf que non, car atteindre le centre me paraît franchement impossible. Et là je risque de spoiler un peu : la distance au "centre" qui s'affiche dans votre carte de l'espace est en réalité la distance au centre de la galaxie dans laquelle vous vous trouvez, mais pas au centre de l'univers tout entier... Même les trous noirs, censés vous rapprocher du centre, ne semblent pas si efficaces que ça. Bref, j'ai l'impression d'avoir été pris pour un idiot, et que tout cet accomplissement était bien futile, même si vu sous un autre angle, la démarche est intéressante, l'univers étant bien trop vaste pour la compréhension des pauvres mortels que nous sommes.


Sinon, il y a quand même quelques trucs à faire dans l'espace. Vous pouvez par exemple vous faire attaquer par des pirates si jamais votre cargaison contient trop d'éléments précieux. Les premiers combats ne sont pas passionnants, mais une fois votre vaisseau amélioré en terme d'attaque, de défense et de manœuvrabilité, les combats peuvent être assez plaisants. Vous pouvez vous-mêmes jouer les pirates en attaquant les vaisseaux cargos, riches en ressources. Et si le cœur vous en dit, le suicide est possible en volant directement vers le soleil du système dans lequel vous vous trouvez. Oui, bon d'accord il n'y a pas grand chose à faire dans l'espace...



... and forever lost



Alors voilà, oui c'est grand, oui c'est riche, oui c'est magnifique (niveau direction artistique en tout cas, pas toujours techniquement à cause de l'énorme aliasing), oui le concept est fort, mais qu'est-ce que ça change si on répète inlassablement le même cycle de jeu ? La routine est toujours la même : visiter une nouvelle planète, récupérer des ressources, revendre le trop, apprendre quelques mots et recettes, repartir, et recommencer sur une autre planète, etc, etc... Cela accroît d'autant plus le sentiment d'impuissance et de futilité face à ce que vous essayez d'accomplir.


L'un des éléments qui fait oublier cette routine réside dans le concept du jeu assez puissant, notamment au niveau du multijoueur. Personnellement, je ne trouve pas ça dommage de ne pas pouvoir rencontrer d'autres joueurs "physiquement", puisque le multijoueur "passif" est déjà assez fort. Si l'on ne peut pas se croiser, on peut par contre tomber sur un système, une planète ou une bestiole déjà découverte, voire renommée par un autre joueur ; et la première fois que ça arrive ça fait un sacré effet de se dire que quelqu'un est arrivé dans le même système que vous, mais que vous n'êtes pas venu du même endroit, et que vous ne repartez pas sur le même chemin. Se dire aussi que chaque joueur aura une expérience unique est assez fou ; car tandis que certains comme moi commencerons leur aventure sur une planète rocheuse, avec une faune agressive, et avec une température de 45°C le jour et -75°C la nuit, d'autres débuteront sur une planète paradisiaque, où il fait bon vivre et où le sable est chaud. Et l'expérience de jeu est radicalement différente, car elle passe du "il faut que je me casse d'ici avant de crever !" à "tiens, et si j'allais voir par là-bas ?".


Et puis en plus de ça, le jeu possède tout de même quelques gros points forts. Première chose, la musique du jeu est très certainement l'une des plus magnifiques BO de jeu de tous les temps, et je pèse mes mots. Si vous aimez des groupes comme Mogwai, vous risquez d'apprécier. Deuxième chose, la musique va de pair avec les moments "wow", où vous n'arrivez plus à bouger face à un panorama qui déchire du bois. Et même si la répétitivité est là, il y aura toujours une petite découverte qui vous enchantera. Dernière chose, l'immersion en terme de gameplay est totale, et ça faisait bien longtemps que je n'avais pas joué à un jeu qui ne vous tient pas par la main toutes les dix minutes. C'est en effet à force d'expérimentations et de découvertes que vous allez pouvoir optimiser votre aventure et gagner un temps précieux : donner à bouffer aux animaux pour qu'ils vous indiquent un point d'intérêt, créer une technologie à côté d'une autre de même type pour en augmenter l'effet, creuser dans le sol pour trouver des ressources cachées, etc... Cet esprit de découverte est unique et restera la grande force du jeu.



Conclusion



Malgré l'indéniable déception de la "fin", la répétitivité et le sentiment d'un univers et de mécaniques cruellement sous-exploités, No Man's Sky a été une expérience délirante et jouissive, où chaque découverte et chaque panorama incroyable a fait renaître en moi l'âme de l'explorateur. Et finalement, la fin, bien que décevante du point de vue du joueur, est assez adaptée au sentiment d'immensité que procure le jeu. Que peut bien espérer un homme à explorer l'infini ? Quelle futilité que de vouloir obtenir le sacro-saint 100% lorsque l'on ne peut pas ou presque revenir sur ses pas ? Peut-être que c'est cela No Man's Sky, une épopée artificielle, sans retour possible, sans fin, sans but, et dans laquelle on se replongera volontiers quelques heures, de temps à autre, avec pour unique volonté de continuer à se perdre dans l'immensité de l'espace, tel un Ulysse des temps modernes à la recherche d'un chez-soi qui n'existe déjà plus.


P.S. : si jamais vous tombez sur les systèmes Vash ou Vash Prime, ce sont les miens :p. J'ai dû faire un Fistiland aussi quelque part...


[EDIT août 2018]


Après peut-être un an de mises à jour, de corrections et d'ajouts, No Man's Sky est quasiment devenu un autre jeu... en tout cas sur la forme. De mon humble avis, les mises à jour ont certes rajouté beaucoup de possibilités, mais elles n'ont en rien changé la finalité du jeu.


Pour faire bref : la vue par défaut est maintenant une vue à la troisième personne, et votre avatar est entièrement customisable (en vrai je trouve ce dernier point dommage car il restait une interrogation sur votre propre nature...) ; il est possible de construire ses propres bases et de recruter du personnel pour développer tout plein de technologies ; on peut acheter d'immenses cargos et collectionner des dizaines de vaisseaux ; les mystérieux portails sont activables et ne sont finalement que de banals téléporteurs ; les désignations des éléments ont changé et il est possible d'en raffiner certains pour en obtenir de plus précieux ; etc... Un ajout non négligeable est la présence d'un mode multijoueur dans lequel vous pouvez croiser des gens POUR DE VRAI. Bon, c'est ce que tout le monde demandait après tout.


Il faut bien s'en rendre compte, le travail des développeurs a été hallucinant. Chapeau les mecs. Et en vrai, les joueurs qui commencent le jeu maintenant sont dans les meilleures conditions pour le parcourir. Par contre, malgré cette cascade d'ajouts, le jeu conserve selon moi son défaut fondamental : dans quel but faire tout ça ? Sauf erreur de ma part, la finalité du jeu est toujours la même (désolé si je me trompe, je n'avais pas envie de refaire 35h de jeu...), et est toujours aussi frustrante.


Qu'est-ce qui restera à faire au joueur quand il aura la meilleure combinaison, le meilleur multi-outil et les meilleurs vaisseaux ? Et quel prix aura-t-il payé pour en arriver là (comprenez du temps précieux dans la vie réelle) ? Autant de questions très intéressantes qui, je l'avoue, continuent de faire de No Man's Sky un jeu similaire à aucun autre. Et je suis finalement content d'avoir découvert le jeu dans sa première version, bancale et non finie, mais peut-être un peu moins lisse que l'actuelle.

Vash
5
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Les meilleures OST de jeux à écouter au travail

Créée

le 1 sept. 2016

Critique lue 941 fois

Vash

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