Autant s'accorder d'emblée sur quelque chose: il y a les jeux qui définissent un genre et les autres qui tentent de les égaler et ici, on va plutôt s'intéresser à ces autres dont les heures de gloire éphémères nous renseigne sur la marche à suivre pour s'imposer une place au soleil parmi les immanquables, souvent au prix d'un reboot d'idée qui casse bien plus souvent qu'il ne passe.


Pour les rares qui s'y sont frotté, les débuts de la licence Saint Row n'ont jamais été qu'une version de GTA vidée de toute sa substance narrative et s'il y avait bien quelques bonnes idées de missions principales comme secondaire, force était de constater qu'on était tout de même assez loin du soin de réalisation légendaire de Rockstar et clairement le titre de THQ manquait cruellement de panache pour faire de l'ombre à son rival de toujours.
Donc puisqu'il était tout bonnement impossible de concurrencer le roi sur la colline, il semblait tout naturel de partir dans l'escalade vaseuse et le n'importe quoi savamment orchestré, c'est-à-dire en somme le concept de GTA, poussé à son plus haut paroxysme au détriment parfois de toute cohérence scénaristique.


Ce troisième opus se veut avant tout fun et bien nerveux, quitte parfois à en faire un peu trop et à virer dans un côté "remplissage" notamment vers le milieu du jeu. C'est un peu le problème quand tout repose sur un concept ou une "bonne idée": on tombe rapidement (et surtout pour les gros studios) dans une répétition inlassable d'une formule à la longue nauséeuse. La plupart des missions du jeu consistent à tirer dans des ennemis dans des situations toujours plus absurdes, certes, mais il n'en reste pas moins qu'à la fin mon expérience de jeu s'est résumée à conduire des voitures et frénétiquement appuyer sur le bouton de tir comme un vulgaire pigeon conditionné.


Et là on tombe dans le paradoxe de la standardisation des triples A, il y a plein de chose à faire pour terminer le jeu dans sa totalité mais en réalité, plus le temps de jeu s'accumule et plus la sensation de vide se fait sentir. Je dirais donc à ce titre que Saint Row III est un bon jeu, mais peut-être pas un bon jeu vidéo.


Par exemple, si le fait que l'histoire ne se prend pas au sérieux et se lance dans le nanardesque est en soi une approche intéressante du GTA-like et a pu m'arracher deux ou trois sourires d'exaspération bonne-enfant, au bout de 20h de jeu, ça devient rédhibitoire. Comment donner une substance à un open-world avec un semblant de scénario si rien n'est sérieux ni propre à créer des enjeux, des tensions et des résolutions ?
Concrètement, pour résumer le peu d'histoire, on se retrouve à la tête des Saints qui n'ont plus rien du gang des rues des premiers opus et qui sont parvenus à une notoriété qui provoque rapidement la convoitise d'autres gangs et autant vous dire qu'on s'en contre-balance de tout ça en vérité parce que tout cela n'est qu'un prétexte pour vous faire conduire un attelage composé d'hommes vêtus de cuir. Là où je voudrais amener ma critique, c'est sur le fait que le jeu est amusant mais qu'il n'est pas intéressant parce que sûrement que la direction qu'il a prise se voulait la moins "réaliste" possible pour aller dans le sens d'un open world à moitié vide qui ne donne aucune "crédibilité" à l'univers créer. Mais soyons honnêtes, le jeu approche vigoureusement de la décennie et clairement à son époque, les réflexions de game design sur les mondes ouverts n'en étaient peut-être qu'à des balbutiements de couloirs.


La carte du monde est en réalité complètement inutile et repose sur un système de quartiers qu'il faut conquérir en achetant des bâtiments et en faisant quatre ou cinq activités qui sont aussi fastidieuses que chiantes, il faut se le dire. Le reste du temps, il s'agira de voler un véhicule pour se rendre sur le les lieux de la mission principale, effectuer celle-ci et se déplacer entre les échoppes achetables et les missions secondaires (codées avec toute la flemme du monde) pour y dépenser l'argent obtenu et ensuite se rendre de nouveau à la mission principale. La résultante: un rythme complètement au fraise qui ne sait plus du tout sur quoi danser entre des guns fights endiablés et des phases de déplacements interminables. Clairement, on ne pouvait pas afficher d'autant plus le désir aveuglé des développeurs à faire durer le jeu, qu'en remarquant que l'un des succès est d'avoir une partie d'une cinquantaine d'heure alors que clairement, il en faut trois fois moins pour terminer la mission principale.


À bien y regarder, Saint Row à un petit goût d'inachevé et en même temps comment aurait-il pu faire mieux. Ces mécaniques nerveuses et l'aspect light-RPG auraient pu s'étaler plus en longueur et le scénario aurait alors proposé des missions vraiment intéressantes et je pense notamment à la zone zombifiée qui ne s'explore qu'une seule fois alors qu'il y aurait pu y avoir bien plus de choses à faire là-bas. Un soin plus poussé aurait pu être apporté à l'open-world comme les interactions sauvages avec les passants, des missions aléatoires plus poussées que des fusillades à l'autre-bout de la ville, etc, etc.
C'est ce qui me fait dire que l'ensemble est plutôt superficiel alors qu'on pourrait très bien voir tout ça comme un florilège tragique de bonnes idées exploités dans les standards faiblards d'une époque vidéoludique bien précise. Mais il n'en reste pas moins qu'en solde sur steam ou dans un vieux bac de magasin poussiéreux, Saint Row mérite qu'on s'y laisse prendre quelques heures.

Thepunkowl
7
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le 20 mars 2019

Critique lue 106 fois

Engy Near

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