Ne pas lire si vous n'avez pas fini le jeu
J'adore Spec ops the line.
Si on le prends seulement en tant que tps c'est un jeu sympa qui remplis son travail. Le gameplay est basique. On évolue dans un Dubai détruit, immergé par le sable et le chaos. Les niveaux consistent généralement en des couloirs. Il faut avancer et tuer les ennemis, comme les autres tps. Il y'a un certain plaisir à donner des ordres à ses alliés(grenades, armes lourdes, snipers). Les phases de jeux sont différentes(tourelle, hélico, les tempêtes de sables). Les différentes situations et la courte durée du jeu le rendent moins lassant. La dessus il est relativement classique.
C'est un jeu qui sort dans un contexte intéressant car il se démarque de tous les tps et jeux militaires génériques de l'industrie. Ce qui différencie spec ops des autres: ses différents niveaux de lecture.
Il y'a une citation dans le jeu qui résume parfaitement la situation en une phrase:Tuer pour soi-même est un meurtre, tuer pour son gouvernement est héroïque, tuer pour se divertir est anodin. C'est donc dans les détails, l'histoire et la symbolique que ces niveaux de lecture prennent sens.
Dans Spec Ops, j'y vois d'abord une critique des comportements égoïstes. Walker va petit à petit oublier ce pourquoi il est venu, à savoir sauver les civils. Son obsession aveugle pour Konrad lui fait oublier son objectif. Plus le jeu avance, plus Walker va chercher à tuer Konrad. Son égoïsme à un impact direct avec la relation qu'il entretient avec ses camarades. Des disputes finissent par éclater au sein du trio car les objectifs de Walker ne concordent pas avec celui de ses alliés. Walker a une réelle évolution. Il y'a donc la première partie de la phrase "tuer pour soi-même est un meurtre", en pensant accomplir justice de manière égoïste, Konrad sombre dans la violence. Mais il faut corréler ce comportement avec la deuxième partie de la phrase: "tuer pour son gouvernement est héroïque"
La critique la plus évidente de Spec Ops the Line, c'est son message antimilitariste. Le jeu ne lésine pas sur les horreurs de la guerre. Massacres de civils, armes interdites, bizutage, le jeu n'hésite pas à être violent. La violence du jeu est au service de son message. Le jeu cherche à montrer l'impact de la guerre chez les soldats. D'une part le traumatisme physique est présent. Les trois compères qui arrivent en bonne forme. A la fin du jeu ils sont épuisés et marqués physiquement. Ce détail est particulièrement visible dans le physique de Walker. Plus le jeu avance, plus son visage devient sombre et brûlé. Cette brulure qui prends de l'importance symbolise la folie qui envahie Walker. D'autre part l'impact de la guerre se ressent directement sur le comportement des personnages. D'abord généreux, le groupe a un esprit de camaraderie. Les alliés répondent aux ordres de Walker, et de manière indirecte à ceux du joueur. Plus tard, épuisé par les combats, ils n'obéissent plus et répondent mal à Walker. La fatigue des personnages se ressent directement dans le langage. D'abord très militaire dans le langage, les trois personnages tombent dans l'agressivité et les insultes. L'enfer de la guerre se ressent dans tous ses aspects, le jeu insiste sur toutes les pertes et la folie qui gagnent les personnages(et surtout Walker).
Enfin le jeu a un caractère méta dans son discours. La critique de la guerre n'est pas le seul sujet. Les caractéristiques de cette critique sont aussi au service du métadiscours. Le jeu dénonce la violence banalisé des tps et des jeux militaires, le ''"tuer pour se divertir est anodin". C'est l'aspect le plus subtil du jeu qui passe vraiment par des détails. Pour ce postulat, Spec ops reprends le fait que les soldats se perdent dans leur objectif. Le comportement du joueur est remis directement en question, car il est lui-même acteur de cette boucherie. Par exemple la séquence du phosphore blanc: le joueur est content de voir une arme de destruction de masse pour tuer un maximum d'ennemi, mais le jeu remet ses actions en cause lorsqu'il montre le massacre de civils. Le questionnement des actions du joueur est aussi visible durant les derniers écrans de chargement:"pourquoi êtes vous venus ici ?", ou bien par des répliques. Un moment Walker exécute un soldat de manière violente, Konrad rétorque que les jeux l'ont rendu comme ça. A la fin Konrad dit à Walker qu'il est dans la réalité, et non dans un jeu.
Tout comme la critique du militaire, le jeu critique la figure du héros des jeux de guerre. Le jeu met à mal la glorification des héros de ces jeux en l'a mettant à mal. Au lieu de montrer un gentil soldat qui va tuer du terroriste, spec ops met en scène des soldats américains tuant des soldats de leurs patries, complètement fous.
Au final je m'en fiche un peu que le jeu soit basique sur son gameplay(bien qu'efficace). Le tour de force de Spec Ops, c'est d'avoir su parfaitement utilisé son médium pour traiter de la guerre, tout en prenant du recul sur ce dernier.