Stories Untold
6.9
Stories Untold

Jeu de No Code et Devolver Digital (2017PC)

Ne réglez pas l’écran de votre ordinateur, ils contrôlent les horizontales et les verticales…

J’y suis allé sans trop savoir…
Je m’y suis juste risqué parce qu’il était gratos sur Epic et parce que j’en avais entendu du bien. En plus de ça, je savais qu’il était court. Alors pourquoi pas….
 
Eh bah franchement, merci à ce « pourquoi pas » parce que, l’air de rien, j’avoue que je ressors plus que satisfait de mon expérience de « Stories Untold ».
Alors c’est vrai, ce jeu présente beaucoup de limites et une partie est essentiellement constituée de frustration mais, l’un dans l’autre, au regard de la courtesse, de son habile travail sur l’atmosphère mais aussi de son astucieuse narration : j’accepte.
 
Parce que oui, « Stories Untold » c’est quatre épisodes qui aiment à se présenter comme une vieille émission des années 80. L’esthétique générale est très imprégnée d’une culture revival à la « Stranger Things » tandis que la structure épisodique de ces aventures épouvanto-fantastiques n’est pas sans rappeler le remake de « Twilight Zone » des années 90. Or, ne serait-ce que pour les atmosphères proposées, chacun des quatre épisodes mérite d’être parcouru.
 
L’atmosphère est d’autant plus prégnante que les espaces de jeu que chaque épisode propose nous confortent dans notre posture de joueur assis devant un appareil à bidouiller. Qu’il s’agisse d’un vieil ordi sur lequel on se risque à une partie de jeu d’aventure textuel, ou bien dans un labo où mener des expériences chelous, on incarne toujours un gars assis sur sa chaise qui doit appuyer sur des trucs. Et même si le premier épisode est assez déroutant (jouer un gars qui joue, qui plus est en regardant l’écran qui se trouve dans notre écran), celui-ci parvient à poser habilement l’état d’esprit d’un épisode : sans cesse nous inciter à remettre en cause les cadres fixés, sans cesse prendre du recul sur la nature de l’expérience proposée, sans cesse questionner la mise en abyme dans laquelle ce jeu tend à vouloir nous piéger…
Personnellement, c’est clairement ça qui m’a incité à persévérer parce que – on ne va pas se mentir non plus – jouer à « Stories Untold » est bien plus que déconcertant. Parfois c’est juste gonflant.
 
Car il faut savoir que l’essentiel d’une partie de « Stories Untold » consiste à apprendre comment on joue à « Stories Untold ». Chaque épisode nous largue comme ça, sans préambule, dans une situation donnée, et c’est à nous, joueur, de comprendre ce qu’il faut faire et surtout ce qu’on PEUT faire.
Et franchement : c’est la galère.
 
A part le dernier épisode, tous les autres j’en ai chié des bulles.
Premier épisode : n'ayant jamais joué à un jeu d’aventure textuel de ma vie, il m'a par exemple fallu farfouiller sur Internet pour comprendre l’importance cruciale du « look around ».
Deuxième épisode : une notice est présente dans l’ordinateur, mais au lieu de la mettre AVANT le descriptif des expériences à mener, le jeu nous le met APRES. Si bien que moi je l’ai découvert qu’à la toute fin de ma partie, une fois que j’avais déjà tout découvert par moi-même après de longues heures d’errance intellectuelle.
Troisième épisode : j’ai perdu deux dizième à chaque œil en essayant de lire les fiches codées jusqu’à ce que – encore une fois à la toute fin – je découvre qu’il y avait des réglettes pour agrandir les vignettes et faire le point dessus. Aaaaaah…. Mais… Mais bande de batards vous ne pouviez pas le dire plus tôt NON ?!!!
 
D’ailleurs je vous inviterais à remarquer que je n’ai mis aucune bande spoiler sur ces trois informations car j’estime clairement qu’il n’y a AUCUN intérêt à être bloqué dans sa partie par des conneries aussi ridicules. Surtout qu’il y a suffisamment d’autres choses pour nous empêcher d’avancer.
Et pourtant, malgré cette purge là, eh bah j’ai fait l’effort.
J’ai fait l’effort parce que j’ai vite compris que chaque épisode allait être assez rapide à accomplir.
J’ai fait l’effort parce que l’air de rien chaque épisode parvient à créer une condition qui donne envie de voir ce qui se passe tout de suite après.
J’ai fait l’effort pour les « Oooooooui ! » et autres « C’est qui le patron ?! » que chaque difficulté surmontée suscitait chez moi.
Mais en fin de compte, ce qui a définitivement fini par m’emballer, c’est quand j’ai commencé à comprendre…


…comment les épisodes s’articulaient entre eux.
D’abord présentés comme des épisodes indépendants, le troisième épisode glisse soudainement le doute en nous appelant du même nom que le personnage de l’épisode 2. Se pose dès lors la question de la place occupée par l’épisode par rapport à tout ça ; épisode qui, justement, se finissait d’une manière que je trouvais un peu trop abrupte. Et toutes les réponses sont dès lors apportées par un épisode 4 que j’ai trouvé vraiment, mais vraiment très malin.


Et c’est peut-être ça la plus grosse qualité de ce « Stories Untold » : son écriture.
Parce qu’au fond, c’est grâce à cette écriture que ce jeu parvient à donner du sens à l’ensemble de la démarche, épisode après épisode.
C’est aussi grâce à cette écriture que le jeu parvient à nous prendre à défaut à plusieurs reprises, jouant la carte de la mise en abyme jusqu’au bout et avec beaucoup de filouterie.
Moi, en tout cas, c’est clairement l’écriture de ce jeu qui m’a amené parfois à lâcher pendant ma partie « Ah bien joué les gars… Bien joué parce que c’est malin… »
 
D’ailleurs, à la fin, cette écriture justifie presque tout.
Elle justifie qu’on ait galéré. Elle justifie certains passages cryptiques. Elle justifie même ces quelques absurdités qu’on aura tous relevées.
J’étais tellement séduit à la fin de ma partie que je ne pouvais pas renier la satisfaction que j’en avais tirée, malgré les plâtrées de frustrations.
C’est pour cela que, l’un dans l’autre, j’ai tendance à le valider des deux mains ce jeu.
J’ai beau reconnaitre ses limites, je ne peux ignorer le plaisir que j’en ai tiré et la marque que ça a laissée.
Car au fond ce jeu ne nous ment pas quand il décide de s’appeller « Stories Untold ».
Des histoires comme ça, dans le jeu vidéo, c’est vrai que, l’air de rien, on nous en avait encore jamais racontées…

lhomme-grenouille
7

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste 2020 : mes jeux de confiné, de déconfiné et de reconfiné...

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le 18 avr. 2020

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