The Last Guardian est l'essence même de l'expérience qui alterne le chaud et le froid. Quelques qualités majeures qui tentent de camoufler la pauvreté de l'ensemble.


Autant le dire tout de suite : The Last Guardian se repose essentiellement sur son animal vedette : Trico. Et le joueur tentera de se dire "Oui mais il y a Trico" tout au long de l'aventure pour continuer à avancer et justifier la frustration qui monte progressivement. Une session de jeu pourrait se résumer de la façon suivante.


Le joueur se retrouve avec Trico dans un couloir. La bête est majestueuse et pleine de vie, indomptable et imposante. Le joueur veut l'admirer pleinement tout en avançant. Malheureusement la caméra part en vrille et fait un flash noir à chaque fois qu'elle rencontre le moindre obstacle. La visibilité est douteuse.



"Bouarf c'est pas grave, Trico est grave cool !"



Heureusement le joueur trouve un levier à activer, ce qui constituera d'ailleurs l'un des seuls moyens de passer d'une zone à l'autre tout au long du jeu en dehors des moments où Trico nous fait avancer en pilotage automatique.
Une fois ce levier activé, l'enfant (protagoniste principal) et Trico se retrouvent dans une grande salle. En moins d'une minute, le joueur comprend qu'il doit atteindre un point surélevé à l'aide de Trico. Cette opération peut prendre entre 2 et 20 minutes (véridique) selon la bonne volonté de l'IA qui décide ou non d'écouter les quelques ordre que l'on peut donner. Quand elle ne décide pas de faire exactement l'inverse et de retourner en arrière.



"Oui mais bon, c'est parce que Trico est super sauvage et super cool !"



Une fois le miracle obtenu et le personnage principal élevé à la bonne hauteur pour atteindre son objectif, plusieurs cas classiques vont se présenter.
Soit le comportement douteux du personnage va le faire sauter dans le vide malgré le côté évident et simple du mouvement.
Soit il faut descendre de Trico ce qui implique d'appuyer au bas mot 3 à 4 fois sur la touche qui est censée avoir cet effet, l'enfant se raccrochant à Trico une seconde après l'avoir lâché. Cette situation peut fortement augmenter les risques de faux mouvements ou de chutes.
Soit un autre miracle arrive et l'enfant saute tant bien que mal au bon endroit et le joueur peut continuer l'aventure. Au final, enclencher un levier et traverser une salle lambda aura pris en moyenne entre 15 et 30 minutes.



"Ouais mais ce sont des minutes passées avec Trico donc c'est cool !"



Dans la salle suivante, un choix apparaît directement aux yeux du joueur. Des feuillages parcourent un mur et semblent, de toute évidence, mener à une autre partie de la pièce. Le joueur s'élance et s'accroche, et pars à l'aventure. Pas de chance, c'était un cul de sac complètement inutile. Le level design est souvent maladroit et non seulement n'oriente pas correctement le joueur de façon naturelle, mais a aussi tendance à le perdre. Les problèmes de caméra en rajoutent évidemment une couche.


En plus, l'esprit du joueur est désormais perturbé. A force de voir des bugs mineurs ou majeurs (certains empêchant la progression, un en particulier) et surtout des soucis de scripts ne se déclenchant pas, il ne sait plus si ce qu'il fait est juste et s'il suffit d'attendre qu'un script se lance ou s'il est dans l'erreur. Il m'est arrivé plusieurs fois de lancer un guide sur internet pour vérifier si je n'étais pas totalement perdu avant de réaliser que j'avais bel et bien la bonne solution mais qu'il fallait que le jeu se décide à me donner le droit de continuer l'aventure.



"Oui mais cette aventure se fait avec Trico, c'est déjà ça !"



Et voici enfin un combat ! Contre des armures bleutées, le gameplay est riche et prenant. Soit le joueur doit monter sur Trico et attendre qu'il fasse le combat à lui tout seul, soit le joueur s'ennuie et décide de descendre et se fait agripper par ces fameuses armures. Et là toute la subtilité du gameplay se ressent. Pour échapper à l'emprise de ces ennemis, il faut appuyer sur toutes les touches le plus rapidement possible, avant de s'effondrer au sol et repartir péniblement se faire attraper par une autre armure. Qui de toute façon se verra massacrée par Trico tôt au tard, que le joueur y fasse quelque chose ou non.



"Mais franchement les animations de combat de Trico elles sont classes !"



Tout ceci se répète régulièrement, et le joueur passe au final plus de la moitié de son temps à se battre contre le jeu plutôt qu'à y jouer. L'aventure dure environ 12 heures, mais son seul challenge est de résister à ces nombreux défauts et de réussir à accomplir des tâches évidentes de la manière la plus laborieuse qu'il soit.
Alors oui, Trico est superbe, oui Trico est particulièrement attachant et est une petite prouesse dans un jeu vidéo. Oui le visuel est assez attirant et l'ambiance globale du titre impose le respect. Oui les compositions musicales se prêtent parfaitement bien à l'aventure et rythment des scènes pourtant confuses (caméra, je ne t'oublierai jamais). On a malgré tout envie d'en savoir plus, de profiter un maximum de ces quelques qualités. Mais à quel prix ? Peut-on réellement accepter tout ces défauts pour savourer quelques instants le talent des artistes entourant Ueda ? Pour 10 minutes de plaisir, une bonne heure de labeur. Chacun se fera son avis mais The Last Guardian est une oeuvre terriblement boiteuse qui flatte le joueur avec sa grandiose créature mais qui le frustrera la majorité du temps.


Je ne vais pas m'étendre sur tous les défauts, malheureusement il y en a d'autres. Je pense à la dernière partie du jeu qui a véritablement failli me faire arrêter ou au framerate souvent inconstant et parfois carrément anémique.


Je mets néanmoins un petit coup de coeur à ma note de 5/10, la première fois que cela m'arrive. Car au delà des décombres qui gisent dans les traces d'un développement douloureux et houleux, il y a une oeuvre rare qui essaie d'apporter quelque chose de différent au paysage vidéoludique. Et rien que pour ça, il ne faut pas ignorer The Last Guardian.


Mon Let's Play est visible sur Youtube : https://www.youtube.com/playlist?list=PLP-35-RtBtguUzOSvIJA2zYihbt6ejqKq

zoruninho
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le 13 mars 2017

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zoruninho

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