Le nazi, une valeur sûre, que ce soit au cinéma, dans le jeu vidéo ou la littérature et qui ne lasse jamais. Tuer du méchant soldat de la Wehrmacht, ça procure toujours un plaisir singulier, rendant l’allemand mort unique en son genre. Et inimitable.


«Si les Ricains n’étaient pas là, vous seriez tous en Germanie. A parler de je ne sais quoi, à saluer je ne sais qui.» Ces paroles signées et chantées par Michel Sardou il y a presque 50 ans, les développeurs de Wolfenstein: The New Order, le studio MachineGames, s’en sont peut-être inspirés pour créer leur jeu. La mythique saga, qui a inventé le genre du jeu de tir à la première personne avant qu’il ne devienne FPS, a traversé des époques plus ou moins difficiles avant son retour en 2014. Un excellent Return to Castle Wolfenstein en 2001, son extension multijoueur Enemy Territory reconnue pour sa qualité, puis un autre FPS de Raven Software (pourtant connus pour Jedi Knight ou Soldier of Fortune) en 2009 complètement raté. Une fois la licence reprise par Bethesda, The New Order est annoncé et déplace le conflit contre les nazis dans le temps.


Nos premières impressions à l’automne 2013 étaient plutôt mitigées. Un bon feeling, des combats assez violents, mais une lourdeur globale, dans les déplacements ou l’infiltration, rendait l’expérience de jeu peu agréable et plutôt quelconque, un comble pour Wolfenstein et son style unique. Six mois plus tard, le constat n’a pas vraiment changé, malgré la très sympathique et décalée campagne de promotion autour de la sortie du jeu, axée sur le second degré et les «goodies oldies» à gagner. Sauf que cela ne reste que de la forme et ne change rien au contenu du soft. Wolfenstein: TNO nous place dans les années 60, époque de la chanson de Sardou mais qu’il n’aurait pas eu le plaisir de chanter, car dans cette uchronie, les nazis ont gagné la guerre et règnent sur toute la Terre, grâce notamment à une source d’énergie mystérieuse, probablement extraterrestre. Le joueur incarne l’agent Blazkowicz, qui se réveille vingt ans après la guerre et découvre que la situation a empiré. Il ne va évidemment pas se laisser faire et se rebeller contre les nazis des sixties pour renverser la vapeur, ce qui le fera voyager partout sur le globe et même sur la Lune.



London Grammar Nazi



Pourtant, tout au long de l’aventure, le dépaysement n’aura lieu que sur le satellite naturel de la Terre, le reste du temps, le joueur ne pourra admirer que du béton, qu’il soit anglais, français ou d’ailleurs, cette singularité du style nazi post-guerre laisse peu de place au rêve. Dommage, car en dehors de la bande-son, excellente ou quelques affiches ici ou là, on ne ressent pas du tout les années 60. Manque de pot pour MachineGames, ou oubli lors du développement, le joueur aura le temps d’observer le décor car Wolfenstein a troqué son bourrinage continu contre un peu d’infiltration l’éloignant un peu plus du Doom-like qu’il fut auparavant. Armé d’un pistolet silencieux étonnamment puissant et précis, Blazkowicz n’aura qu’à se faufiler entre les gardes aveugles et/ou idiots sans même devoir tous les tuer pour atteindre son objectif. Au pire, si jamais les renforts arrivent, il suffit de reprendre une arme plus adéquate à la situation pour s’en sortir sans trop de bobos. Les SS se placent mal, ils ne détectent rien, Wolfenstein devient le favori pour le prix du jeu avec la plus mauvaise IA de 2014.



Nazis pour la vie



En soi, l’infiltration demeure une bonne idée mais s’avère finalement incompatible avec l’univers de la série et en correspond pas aux héros, plutôt gros balourd et peu enclin à la finesse. En dehors de ces quelques phases, le jeu propose, à l’instar de Metro 2033, des moments libres dans lesquels le joueur pourra effectuer des quêtes secondaires ou discuter avec ses compagnons résistants. En dehors de ces moments, on prendra un pied d’enfer à suivre l’aventure un peu décalée et volontairement pleine de clichés et à tirer sur tout ce qui bouge. Sur ce point, pas de déception, les armes détonnent, les explosions pleuvent et le sang coule par hectolitres. S’il faudra tout de même penser à se cacher de temps à autre pour laisser passer la pluie de balles ennemies, bouger restera la priorité, rien que pour se soigner ou récupérer des munitions. Car, ô surprise et fait rare dans le jeu vidéo moderne, la santé de Blazko ne se régénère pas d’elle-même, n’oubliez pas les médikits, même lorsque la santé est au max parce qu’il est possible de faire monter la barre de vie au-delà de son maximum théorique. Principal intérêt du jeu, le côté gunfight plaira aux amateurs du genre et c’est bien là l’essentiel. Un système de compétences permettra d’obtenir des capacités comme un rechargement plus rapide, assez pratique sans être indispensable. Petit bémol cependant pour le loot, il faut nécessairement appuyer sur une touche pour ramasser un kit ou des munitions, ce qui coupe l’action plutôt mal, notamment quand on se retrouve sous le feu ennemi.


En plus de ça, le jeu propose aux joueurs un choix supposé cornélien dès le début, à savoir une capacité à choisir, entre le crochetage de portes ou le hack de systèmes électriques. Qu’importe le choix, cela ne changera pas vraiment l’aventure qui suit et n’offre pas suffisamment d’intérêt pour relancer le jeu une fois terminé. Dommage. Les ennemis, idiots, sont plutôt variés, et pour changer du SS classique, des mechas-chiens, des robots impressionnants et quelques boss jamais trop compliqués. Petit ajout charmant, le Laserkraftwerk, un fusil à énergie capable de bouleverser le monde du FPS, ou presque. L’arme peut découper certains matériaux, d’ouvrir des passages imprévus ou de dézinguer de l’ennemi blindé très facilement. Cette bonne idée s’avère mal exploitée car le Laserkraftwerk sera peu pratique à utiliser, son rechargement est très long et il ne permet malheureusement pas autant de liberté qu’on aurait pu l’envisager. Techniquement au point, Wolfenstein: The New Order ne révolutionne pas le genre et n’éclate pas la rétine graphiquement parlant.


La pilule Wolfenstein s’avale difficilement, selon la capacité à accepter les défauts d’un jeu. Pour le côté positif, on a apprécié l’excellente ambiance sonore, complètement en accord avec l’univers nazi des sixties, les gunfights sont plaisants, il y a deux ou trois moments sympas mais le contre vient peser lourd dans la balance. L’infiltration est ratée, l’IA à la ramasse, le level design moyen, pas de multijoueur et une durée de vie plutôt courte, moins de dix heures pour un jeu solo exclusivement.

RobinBeaugendre
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le 17 juin 2016

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Robin Masters

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