Yakuza 6: The Song of Life
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Yakuza 6: The Song of Life

Jeu de Ryû ga Gotoku Studio et Sega (2016PlayStation 4)

..// OVERVIEW //..


Développé et édité par Sega.


Temps de jeu : 26h pour 54% des Trophées.


..// PROS aka La Fureur du Dragon ... de Dojima //..


Une narration toujours au top. S’il est un point sur lequel un Yakuza reste inattaquable, malgré des vilains pas franchement charismatiques cette fois, c’est la qualité et la longueur de ses cinématiques. Certes, on a toujours l’occasion de casser quelques milliers de dents et de briser des centaines de nuques entre deux pauses cinéma, mais une fois encore, on est face à un scénario qui tient la route, appuyé par une volonté de ne jamais faire de concessions. Je suis même assez épaté de voir que les scénaristes des Yakuza ont toujours ce chic pour trouver des histoires assez inattendues, dont je peine à deviner le pourquoi du comment en cours de route, même si je préfère me laisser porter par l’intrigue et attendre que les réponses tombent d’elles-mêmes. Paradoxalement, si je n’ai encore une fois rien vu venir puisque tout a été fait pour rester dans le flou, je trouve l’ensemble assez tiré par les cheveux, Kiryu étant un poissard qui attire à lui toutes les emmerdes du monde et dont tout le monde semble vouloir la mort alors que ça fait un bail qu'il a raccroché son costard de "Fourth Chairman of the Tojo Clan". Cela semble d’ailleurs se propager à Haruka puisque cette dernière joue aussi de malchance depuis… sa naissance. C’est moche.


Un système de combat simplifié mais toujours aussi défoulant, qui met enfin au placard les Boss avec 15 barres de vie, entre autres défauts des anciens épisodes. Certains trouveront, à juste titre, dommage d’avoir perdu en variété de coups de latte, mais j’avoue que ça ne m’a pas vraiment dérangé. En difficulté normale, on ne rencontre pas réellement d'obstacle insurmontable, et si les Boss finissent toujours par se mettre en colère, avec une bonne réserve de potions de soin ça passe toujours. On n’évitera toutefois pas les affrontements contre des personnages que l’on pense assez faibles, mais qui se révèlent en fait être étrangement puissants. Il faudra également prêter attention à ceux armés car on peut voir sa barre de vie fondre en moins de deux, sans parler des ennemis surréalistes qui attaquent au bazooka… à bout portant. Mais bien sûr. Cela étant, ce nouveau système uniformisé demande quand même un minimum de prudence, d'autant que la barre de vie ne remonte pas automatiquement, et qu'ils ont l'étrange idée d'ajouter une jauge de satiété qui nous empêche de trop manger, et donc de trop facilement se remettre en pleine forme. Reste que je n'ai jamais vu passer l'écran de Game Over, donc si moi j'y arrive hein... ça devrait plutôt bien se passer.


Une évolution technique appréciable. Laissant enfin de côté le vieux moteur des précédents épisodes, qui a hélas fait son baroud d’honneur sur Ken le Survivant (dont j'espère quand même une sortie chez nous, parce que Hokuto No Ken quoi), le nouveau Dragon Engine met enfin un pieds dans l’ère moderne, avec un niveau de détail et de précision qui fait plaisir à voir. On peut ainsi rentrer dans tous les lieux principaux sans aucune transition, aux ascenseurs près (qui sont des téléporteurs), prendre son café ou une bonne ratatouille (si si), puis repartir au karaoké pousser la chansonnette avant d’aller taper la discute avec son hôtesse préférée. Il ne faut toutefois pas s’emballer, les murs invisibles et coins inaccessibles restent légion, mais on note l’effort vers plus de fluidité de déplacement, avec même parfois quelques accès inattendus vers certains toits. Pour autant, en dépit de ce rendu global fort plaisant et de quelques évolutions appréciables, un œil averti décèlera assez vite les étonnantes limites de ce moteur.


..// CONS aka Nous partîmes cinq ; mais par un prompt Toshihiro (2) - Nous nous vîmes tout seul en arrivant à Kamurocho //..


Un Dragon Engine aux faiblesses surprenantes. La plus visible est l'aliasing assez prononcé pour ne pas dire incompréhensible, compte tenu de ce qu’affiche le jeu. Même notre menu en forme de smartphone y passe, avec un détourage qui pique les yeux. Et si la physique tient bien la route avec des corps qui volent sous les coups et rebondissent d’une manière généralement crédible, à quelques envolées improbables près, on ne peut pas en dire autant de l’IK des pieds qui montre toute l’étendue de sa marge de progression dans les marches d’Onimichi. Surtout visible sur les passants, on profitera ainsi de leurs démarches assez particulières et peu naturelles qui confirment que le Dragon Engine n’est pas encore au niveau de ce que l’on pourrait en attendre, pour peu que vous ayez une sensibilité technique à satisfaire. Par ailleurs, on serait a priori en droit d'attendre du 60fps sur la PS4 Pro, mais aucune option dédiée n'a été prévue pour justifier son surplus de puissance. Bon ben... une version PC ? Non ? Tant pis.


Qui peut le plus peut le moins, m’enfin faut pas se sentir obligé non plus hein. Alors que Yakuza 5 était d’une générosité hors norme avec ses 5 personnages jouables et ses mini-jeux en pagaille qui faisaient déborder notre agenda, Yakuza 6 fait le ménage dans ses placards pour revenir à une forme plus épurée de son concept. N’avoir que Kiryu de jouable réduit d’autant le nombre de choses à faire (ou refaire) puisque s’il existe toujours les vieux jeux d’arcade Sega, cinq hôtesses à séduire, les jeux classiques japonais, et qu’en prime on a à présent du Live Chat avec deux actrices porno japonaises connues (cela reste soft hein), on expédiera l’ensemble beaucoup plus vite, cela va de soi. Il en va de même avec la partie combat, relativement allégée jusqu’à l’équipement qui fait table rase de toutes les armes et éléments de défense que l’on pouvait acheter et faire évoluer. Même les clés à trouver çà et là, n'ouvrent que quelques coffres indiqués sur la carte (bonjour l’exploration), qui contiennent les accessoires dont on pourra s’équiper.


Kiryu, cet éternel rebooté. Je vois venir les défenseurs du « oui mais sinon y a pas d’jeu en fait », qui m’opposeront la nécessité d’un système de progression. Soit. Juste qu’au bout d’un moment, c’est lassant de retrouver un personnage qui a de la bouteille, et se retrouve une fois encore presque vierge de tout son savoir en arts martiaux, le temps de refaire le plein d’XP à distribuer dans les bonnes cases. Plutôt que de chercher à rendre Kiryu toujours plus fort, rapide, efficace, on le réinitialise en permanence, cassant l’impression de continuité d’un épisode à l’autre. On finit par redevenir la véritable machine à baffer que l’on a été, mais en repartant du bas de cette échelle que l’on ne connait que trop bien. Problème connu et récurent, l’industrie du jeu vidéo peine toujours à trouver une solution satisfaisante dans les jeux à suites mettant en scène un personnage central censé gagner en puissance ... ou pas, puisque dans les DLCs c’est généralement le cas. Alors pourquoi pas d’un épisode à l’autre ?


Troublr. Derrière ce nom ô combien explicite d’une application smartphone pensée pour vous faire chier, se cache une source de missions annexes qui vous donnera peut-être envie de l’effacer de votre téléphone sans jamais pouvoir le faire. Parfois totalement muette pendant des heures, cette application se rappelle à votre bon souvenir et ne vous lâche plus avec un SMS tous les 50m parfois. Couple en péril, femme en danger, énième personne qui va tomber d’un toit, jeune passé à tabac, ou plus caustique, homme d’affaires coincé aux WC sans papier-toilette, seront autant d’âmes à secourir pour un monde meilleur, ou surtout pour éviter un SMS moralisateur du genre « Pauvre femme, je ne veux même pas songer à ce qu’ils lui ont fait. Encore une victime de plus… #Tristesse #FeignasseDeJoueur #DragonDeDojirien ». Bref, du harcèlement qui transforme parfois un simple trajet dans Kamurocho en véritable supplice. Ca n’est pas la première fois qu’un jeu japonais me gonfle avec ses intrusions smartphones pénibles (Tokyo Mirage Sessions et Persona 5), et j’ai du mal à comprendre que l’on trouve fun d’être spammé de SMS dans un jeu vidéo. C'est déjà chiant dans la vraie vie alors pitié, lâchez-nous dans les jeux quoi.


..// CONCLUSION //..


Les années passent, et à l’instar d’un Monster Hunter qui a mis des plombes à évoluer à petits pas, Yakuza fait preuve d’un immobilisme qui pourra décevoir ceux qui comme moi espèrent une véritable évolution de la licence, où Tokyo ne serait plus cet éternel quartier de Kamurocho (+ le tout petit Onimichi de Hiroshima cette fois). A l’inverse, si la formule vous convient depuis le premier épisode, que vous n'ayez toujours rien contre l'anglais (une VF ? En 2018 ? AH AH AH), et que vous ne souhaitez pas changer cette lessive que vous aimez tant, vous nagerez sans doute en plein bonheur tokyoïte.


Toujours au sommet de son art narratif, Yakuza reste également en éternel décalage avec ses activités secondaires qui collent de moins en moins à Kiryu. Difficile de croire que notre Dragon de Dojima lâche des « I LOVE YOU » sur le Live Chat, compte tenu des évènements dramatiques qui se jouent du début à la fin de cet épisode. Décompresser ? Oui c’est sûr… Plus que jamais la dissonance ludo-narrative joue des tours à Yakuza, comme ces ennemis qui se relèvent parfois après avoir pris un coup de couteau mortel, ou trois balles dans le bide (à ne pas tester à la maison bien entendu, vous finirez juste agonisant dans une mare de sang, si vous en doutiez).


Yakuza 6 clôture ainsi l’histoire de notre Yakuza qui ne voulait jamais tuer personne (euh...), à travers cet épisode assez court. Là encore, si vous trouviez Yakuza 5 beaucoup trop long et le chapitre Idol Pop de Haruka hors propos, vous devriez être satisfait. Si vous le trouviez trop court et vouliez six personnages jouables, refaites ce dernier épisode six fois. P’tête que ça fera illusion. Ainsi, la comparaison avec Monster Hunter World (que je ferai sur PC) me saute aux yeux : une technologie qui évolue enfin, mais un contenu qui s’est vu fortement allégé au passage. Ou alors est-ce de la lassitude du côté des développeurs ? Un coup du graphiste qui n’en peut plus de refaire Kamurocho encore et encore ? Mystère...


(1) Ben quoi ? Moi aussi je peux me la jouer Xenosaga hein ^^.
(2) Toshihiro Nagoshi est le producteur des Yakuza, aussi connu pour son côté bling-bling fashion tendance qui roule en Ferrari (pour de vrai).

Dark_Inquisitor
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le 15 mai 2018

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Dark_Inquisitor

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