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Bertrand Blier - Commentaires

Je pense avoir vu suffisamment des jalons de Blier pour cerner la personnalité d’un auteur que j’estime sans toutefois l’adorer, un moraliste tonique qui ne dédaigne pas de recourir à la provocation, au cynisme, voire à l’absurde afin de traduire sa vision à la fois tendre et grinçante du monde.

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10 films

créee il y a presque 12 ans · modifiée il y a environ 3 ans

Les Valseuses
7

Les Valseuses (1974)

1 h 57 min. Sortie : 20 mars 1974. Comédie dramatique, Road movie

Film de Bertrand Blier

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Le film-archétype qui rendit Blier célèbre vint à point nommé après seize ans de gouvernement gaullo-pompidolien, comme pour entériner les valeurs anarcho-libertaires d’une génération qui entendait brûler la vie par tous les bouts, avec une joie immense et une vitalité communicative. Il en reste aujourd’hui une œuvre gentiment subversive et iconoclaste, dont la verdeur ne produit plus tout à fait le même effet mais dont la fraîcheur de ton et des comédiens demeurent communicatives. Par la cocasserie grinçante de ses dialogues, la sincérité d’un propos qui capte quelque chose de la jeunesse insouciante et fragile de son époque, le cinéaste parvient à imposer un ton nouveau, spontané et provocant, une forme d’humour grinçant, conjuratoire, dont la roublardise n’est que l’autre face de la naïveté.

Calmos
6.8

Calmos (1976)

1 h 47 min. Sortie : 11 février 1976. Comédie

Film de Bertrand Blier

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

C’est le burn out conjugal pour Paul et Albert. Étouffés, épuisés, harassés par les exigences de leurs épouses, ils prennent la tangente afin de profiter à la campagne de plaisirs rustiques, de tripes et de bon vin. Au premier abord, le film exprimerait donc le ras-le-bol d’une masculinité castrée par les revendications furieuses et les hystéries nymphomanes de ces dames : on appellerait cela un film réactionnaire, doublé d’un exutoire misogyne. Mais c’est bel et bien sur le registre de la farce truculente et savoureuse qu’il faut le prendre, tandis que grisé par son propre délire il s’aventure dans des terres toujours plus burlesques et outrancières, renvoyant littéralement la guerre des sexes à la bouffonnerie. Le plaisir est (peut-être) coupable mais bien réel, surtout avec une telle brochette d’acteurs.

Préparez vos mouchoirs
7

Préparez vos mouchoirs (1978)

1 h 48 min. Sortie : 11 janvier 1978. Comédie dramatique, Romance

Film de Bertrand Blier

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Un homme propose sa femme à un homme de rencontre, puis tous deux la proposent à un voisin pour essayer, en vain, de la dérider. Elle s’éveillera enfin lorsqu’aura trouvé, d’elle-même, une vraie relation – avec un gosse de treize ans. S’il joue de la provocation, le principe de Blier est assez malin : il ne tombe jamais dans le piège de la critique de mœurs ou de l’étude sociale mais compense en donnant à ses personnages des existences qu’on pourrait qualifier d’extrêmes. Surtout, il ne va pas au bout de ce qu’il veut démontrer (la dissolution du couple et l’impossibilité de le reconstituer une fois qu’il a été brisé) et au lieu de se livrer à une analyse de cette réalité, emprunte avec désinvolture le chemin des écoliers afin d’éluder bien des questions et de mieux provoquer le rire des spectateurs cyniques.

Buffet froid
7.5

Buffet froid (1979)

1 h 29 min. Sortie : 19 décembre 1979. Comédie, Policier

Film de Bertrand Blier

Thaddeus a mis 8/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Un quidam se fait poignarder sans se plaindre dans le métro, un commissaire se comporte comme s’il attendait le Jugement dernier, un assassin craint son ombre… Aucun point commun entre ces éléments, aucune logique, pas de psychologie ni de réalisme, on est en plein nonsense britannique, en pleine fable irrationnelle, quelque part entre Edward Lear et Buñuel. Blier invente un style fondé sur la liberté de narration et le rejet du cartésianisme. Le décor urbain impose une déshumanisation glacée, l’humour noir se fait sinistre, les acteurs se régalent dans des rôles de morts-vivants en proie au doute existentiel. Sa tonalité lugubre, son écriture particulièrement précise dont le vitriol découle d’une sèche ironie, son sens inné de l’absurde beckettien ont fait de ce film insolite un classique singulier.
Top 10 Année 1979 :
http://lc.cx/AwU

Beau-Père
7

Beau-Père (1981)

2 h 03 min. Sortie : 16 septembre 1981. Comédie dramatique, Romance

Film de Bertrand Blier

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

L’histoire d’un trentenaire plutôt raté (Dewaere, pathétique, attirant les coups durs comme l’aimant la limaille) qui, subrogé suborneur, couche avec sa belle-fille, une pucelle de quatorze ans plutôt rouée, bourgeon de femme plus forte qu’un arbre, pas minette pour deux sous. Détournement de mineure corsé d’inceste. C’est du joli. Miracle, c’est joli. Et mieux que ça, tendre, drôle, pudique, évident. Car Blier bouscule les tabous reçus et navigue entre les écueils prévisibles de la complaisance, en lavant à son insu le spectateur de ses plus mauvaises pensées. C’est un drôle de film d’amour, un triste blues à la française où la solitude et la mort mènent la vie dure à la jeunesse, et où les passions s’éteignent "in the rain", dans un parfum de détresse badine. Imparfait, inégal, mais d’une inflexible douceur.

Notre histoire
6.2

Notre histoire (1984)

1 h 50 min. Sortie : 23 mai 1984. Drame

Film de Bertrand Blier

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Le cinéma de Blier fonctionne comme un tourniquet où plus les personnages sont arrimés à leur être ordinaire de Français moyen, plus ils paraissent saisis par l’ange du bizarre et incarnent la sordidité sans espoir de leur condition. Les représentants de commerce, les julots, les retraités pavillonnaires, les instits sportifs, les fleuristes, les divorcées BCBG, tous les spécimens défilent le long de cette rêverie triste où chacun est déprimé, hagard, égaré, et dont la déréalité est un moyen retors d’esquiver le misérabilisme et le lieu commun, d’accentuer jusqu’à l’expressionnisme les traits du mal-être affectif. Parce que c’est moins l’amour qui triomphe au terme du récit que la conjugalité, il est difficile de ne pas y percevoir la vision glacée d’un univers qui n’a aucune raison objective d’envisager le bonheur.

Tenue de soirée
7.1

Tenue de soirée (1986)

1 h 24 min. Sortie : 23 avril 1986. Comédie dramatique, Policier

Film de Bertrand Blier

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Où un loubard taillé comme un taureau s’éprend d’un petit être fluet au visage pâle. Le premier sa balade dans la vie avec la grâce d’un char d’assaut, l’autre a l’habitude de se laisser ensevelir sous les coups et les injures. Ils se lient, emménagent et finissent au tapin et au turf, minijupe, talons aiguilles et pause café. Pas une seule image indécente, juste le délice des mots qui fusent, la verve folle d’un texte qui multiplie les allusions frénétiques au bonheur, au sexe, à l’insupportable besoin d’aimer autant que d’être aimé, qui rappelle surtout que le désir est sans frontière, sans genre, sans dogme, et que les femmes libérées devraient s’occuper de celle qui dort dans le cœur des hommes. Un film tendre et provocant, triste et chaste, porté par un trio d’acteurs jouant sans filet, à la vie comme à l’amour.

Trop belle pour toi
6.6

Trop belle pour toi (1989)

1 h 28 min. Sortie : 12 mai 1989 (France). Comédie dramatique, Romance

Film de Bertrand Blier

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Parsemé de ralentis et de retours en arrière, de clins d’œil et d’apartés où les personnages fixent la caméra et soliloquent sur leurs états d’âme, de scènes qui se répètent et se répondent, ce film subtil et douloureux, très délié, nous dit ces choses de tous les jours, comment on tombe amoureux, comme la pudeur recule, trébuche et se reprend, comment les banalités sont touchantes et pourquoi la vie des belles n’est pas si drôle. Drame conjugal dispensant une forme d’anesthésie triste, il médite sur l’éternel dilemme amoureux, sur le mystère du coup de foudre et l’épuisement des sentiments, sur la déroute de protagonistes pris au piège de "pourquoi" sans réponse, et fait naître une émotion sourde mise en relief par des saillies drolatiques qui sont autant de soupapes dérisoires et désespérées.

Merci la vie
6.4

Merci la vie (1991)

1 h 57 min. Sortie : 13 mars 1991 (France). Comédie dramatique, Road movie

Film de Bertrand Blier

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Des bords de mer sinistres, des toubibs véreux, des parents déglingués, des mariées battues, des amours pourries, des enfances dévoyées, des vigiles armés, merci la vie ! Mais au désespoir qu’elle génère, l’auteur répond par une salve d’audaces et d’insolences. À l’insupportable, par l’hypothèse d’un fantasme ou d’un cauchemar qui réserverait une porte de sortie : ce n’est que du cinoche… Et le pèlerinage vindicatif de ces deux filles de se lire comme l’allégorie flamboyante de tous les fléaux du siècle, en un carambolage de ruptures de ton, de variations de couleur, de mises en abyme, un maëlstrom sacrément inventif, gonflé et ambitieux, qui convoque des fragments d’œuvres consanguines (Fellini, Godard, Buñuel, Lelouch) pour mieux se livrer l’auto-analyse. Lorsque Blier est bon, il ne l’est pas à moitié.

Le Bruit des glaçons
5.9

Le Bruit des glaçons (2010)

1 h 27 min. Sortie : 25 août 2010 (France). Comédie dramatique

Film de Bertrand Blier

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Petite comédie noire très caractéristique de son auteur, autour des motifs de la maladie et de la finitude. Si la mise en scène incorpore le fantastique dans le drame avec une certaine habileté, si à une idée de scénario originale, via l’allégorie classique de la personnification de la mort, suit un message de réconfort banal, et si les figures funestes et voyeuristes s’envoient des piques d’un comique macabre, souvent satiriques et justes, on peut regretter le caractère programmatique de cette joute de ripostes entre le reclus morose et l’intrus méphistophélique. Reste que la façon dont le réalisateur prend le parti de tourner la gravité de son sujet en dérision sans pour autant s’en moquer est plutôt sympathique, et que l’ensemble marche assez bien même s’il n’a vraiment rien pour rester en mémoire.

Thaddeus

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