Cover Jia Zhang-ke - Commentaires

Jia Zhang-ke - Commentaires

Considéré comme le chef de file des réalisateurs chinois de la sixième génération, Jia Zhang-ke a su imposer un regard pénétrant, pictural, sociologique et poétique à la fois, et enregistrer l’évolution radicale de la marche de son pays. Ce cinéma m’intéresse, me stimule parfois, et parvient même ...

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10 films

créee il y a environ 11 ans · modifiée il y a plus d’un an

Xiao Wu, artisan pickpocket
6.9

Xiao Wu, artisan pickpocket (1997)

Xiao Wu

1 h 53 min. Sortie : 13 janvier 1999 (France). Comédie dramatique

Film de Jiǎ Zhāng-Kē

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Jia dit s’être inspiré du fameux film de Bresson mais c’est plutôt du côté du néoréalisme italien qu’il faudrait chercher la source de son premier essai. Car si l’on ne saura rien de la technique du jeune pickpocket aux manches trop longues, il nous est donné une image désabusée d’une petite ville provinciale de la Chine contemporaine : un morceau de tiers monde, avec ses escrocs et ses entraîneuses, ses haut-parleurs menaçant de sanction les ennemis de l’ordre social, sa télévision régionale qui exalte la réussite des entrepreneurs, ses petits trafics et ses quartiers délabrés qu’on finit par démolir pour ne rien construire à la place. Soit la chronique d’un pays en transition, partagé entre marché noir et respect dû aux traditions, dont la langueur et l’absence d’enjeu dramatique peuvent user la patience.

Platform
7.2

Platform (2000)

Zhantai

2 h 34 min. Sortie : 29 août 2001 (France). Drame

Film de Jiǎ Zhāng-Kē

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

De la représentation de pièces patriotiques chantant la gloire de Mao dans un village de la Chine profonde aux concerts de rock donnés dix ans plus tard par la même troupe ambulante, le cinéaste raconte la lente bascule du pays vers un capitalisme à peine masqué, une mutation sociale et culturelle qui ne se défait jamais du désenchantement. Le ton sarcastique de la satire du régime des années noires filtre à travers une mise en images contemplative, lente, presque amorphe, tentant de cerner l’inexprimable des secrets cachés, des espoirs tus, des bonheurs impossibles. Faute de repères précis, d’éléments descriptifs, il est permis de ne pas être emporté par ce portrait désillusionné de la jeunesse chinoise, et par le destin de cet ado à grosses lunettes dont on devine qu’il est le double de l’auteur.

Plaisirs inconnus
6.8

Plaisirs inconnus (2003)

Ren xiao yao

1 h 53 min. Sortie : 22 janvier 2003 (France). Comédie dramatique

Film de Jiǎ Zhāng-Kē

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Radiographie de la Chine provinciale moderne, suite. L’ironie du titre évoque les mille délicieuses nouveautés qui bombardent un écran télé continuellement présent : explosions terroristes, campagnes publicitaires, persécutions politiques, boom des modes et des consommations occidentales. Tournant en numérique avec les sujétions d’un micro-budget, JZK extrait dans des décors réels le quotidien désintégré de deux Vitelloni à la chinoise qui flânent, fument et tentent d’aimer les filles – une chanteuse, une étudiante. Le scénario est dans l’objectif de la caméra, très mobile après le statisme théocratique de "Platform", mais aussi erratique, aussi incertain que l’avenir de ces jeunes corrompus par l’accumulation des fausses valeurs. En prime, le hold-up le plus foireux de l’histoire du cinéma.

The World
7.2

The World (2005)

Shijie

2 h 13 min. Sortie : 8 juin 2005 (France). Drame

Film de Jiǎ Zhāng-Kē

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Ce parc-univers, qui emblématise le présent chinois et abolit dans un même arc de contrefaçon la fatigue de l’itinéraire et la valeur même de l’Histoire, enregistre la poussée anarchique de la mondialisation, de l’exode rural, de l’appétit de croissance et de consumérisme. Des shows absurdes à l’exotisme pailleté et futuriste y caricaturent en carton-pâte la globalisation qui avale les personnalités, mixe les cultures et broie une jeunesse écartelée entre la dure réalité économique, l’âpre solitude affective et la poudre aux yeux d’une irréelle occidentalisation. Ne reste alors à la génération perdue des années 70-80 que le réconfort d’une amitié (celle entre Tao et la Russe Anna, par-delà la barrière de la langue), et le rêve d’un ailleurs inaccessible qui aurait pour nom Ulan Bator ou Belleville.

Still Life
7.3

Still Life (2006)

Sanxia Haoren

1 h 48 min. Sortie : 2 mai 2007 (France). Drame

Film de Jiǎ Zhāng-Kē

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

La traversée historique et géographique de la Chine contemporaine trouve un point d’ancrage saisissant dans le gigantesque chantier du barrage des Trois-Gorges, qui engloutit une région entière, expulse et arrache des millions de gens à leurs racines au milieu d’un paysage où la splendeur de la nature se mêle à la ruine industrielle, et entérine à ciel ouvert la transformation physique du pays et sa conversion douloureuse à l’économie de marché. S’il se positionne dans le sillage d’un Rossellini, le film s’en démarque à travers le recours à la caméra numérique, car ici le réel est vu de si près qu’il devient de la science-fiction, l’hyperréalisme de la fresque ouvre sur de troublants effets de distorsion, et la bascule de l’ancien dans le nouveau suinte la beauté d’un temps irrémédiablement perdu.

24 City
6.8

24 City (2009)

Er shi si cheng ji

1 h 52 min. Sortie : 18 mars 2009 (France). Drame

Film de Jiǎ Zhāng-Kē

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

La ville de Chengdu. Une gigantesque usine militaire, sorte de matrice économique autour de laquelle la vie de la cité s’organise. En lieu et place sera bientôt construit un centre urbain ultramoderne, conforme à l’image rutilante et dynamique que les dignitaires chinois aiment à renvoyer de leur pays. Avec patience, le réalisateur interroge des ouvriers de plusieurs générations, recueille des bribes de souvenirs, des réminiscences intimes, les idylles, les amitiés, les joies simples et les peines profondes. Documentaire ? Pas si simple, car il se risque vers une plasticité nouvelle de la notion de personnages, vers une forme hybride qui associe les puissances du reportage et celles de la fiction. Jia veut ainsi lire dans le passé les signes de l’avenir, et refléter dans cette page d’histoire son propre processus créatif.

I Wish I Knew - Histoires de Shanghai
6.2

I Wish I Knew - Histoires de Shanghai (2010)

Haishan Chuanqi

2 h 18 min. Sortie : 16 mai 2010 (Chine). Historique

Documentaire de Jiǎ Zhāng-Kē

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

La frontière poreuse entre fiction et documentaire est l’une des grandes questions du cinéma. Si l’auteur officie cette fois dans la deuxième catégorie, il poursuit son analyse des changements souterrains de la société chinoise et redonne à Shanghai, cité protéiforme filant vers l’avenir mais lestée d’un passé qui se réverbère dans l’histoire personnelle de chacun, sa dimension séculaire. Le film s’inscrit bien dans ce vaste tableau en mouvement qu’est l’œuvre du cinéaste, mais le recueil de témoignages et d’entretiens finit par générer, dans sa litanie programmatique, un véritable ennui. On peut aussi regretter qu’il endosse si docilement la position officielle du conglomérat politique réunissant la RPC continentale, le régime de Taiwan et l’administration de Hong Kong, en évitant les sujets les plus polémiques.

A Touch of Sin
7.1

A Touch of Sin (2013)

Tian Zhu Ding

2 h 13 min. Sortie : 11 décembre 2013 (France). Drame, Sketches

Film de Jiǎ Zhāng-Kē

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

On peut reconnaître la maturité d’une œuvre à la façon dont elle commence à réfléchir sur elle-même, pratique l’autoréflexion, retravaille consciemment ses motifs de l’intérieur. D’une certaine manière ce long-métrage tripartite en est à ce point, qui réorchestre le grand tableau moderne de l’Empire du milieu à la lecture distanciée des films de genre asiatiques. Fonctionnant comme la détente cathartique des laissés-pour-compte du capitalisme sauvage, gangrenée par une violence de plus en plus intenable, la fresque panoramique ose une choralité unanimiste et affiche autant d’ambition que de maîtrise, mais elle reste figée par l’artificialité et le symbolisme de son dispositif. En d’autres termes, le geste est beau mais un peu calculé, et même franchement inégal dans l’intensité de ses épisodes.

Au-delà des montagnes
7

Au-delà des montagnes (2015)

Shan He Gu Ren

2 h 06 min. Sortie : 23 décembre 2015 (France). Drame

Film de Jiǎ Zhāng-Kē

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Trois parties, trois formats, trois chapitres développés avec une fructuosité qui témoigne d’un appétit romanesque assez impressionnant. Particules égarées dans un espace trop grand, les héros personnalisent une Chine aimantée par le capitalisme et la technologie, par la marche forcenée d’une société en pleine transformation. Ils éprouvent un changement de civilisation qui les coupe de leurs racines et de leur mémoire sauf par bouffées de nostalgie dérisoires, à l’image de la danse conclusive sur laquelle neige toute la tristesse du monde. Ce pourrait n’être qu’un soap banal avec coups du destin, déchirements sentimentaux et filiations problématiques, mais Jia substitue aux facilités de la telenovela un sentiment de perte et de regret diffus insufflant à ce très beau mélo un lyrisme inconsolable.

Les Éternels
6.8

Les Éternels (2018)

Jiang Hu Er Nu

2 h 15 min. Sortie : 27 février 2019 (France). Drame, Romance, Film noir

Film de Jiǎ Zhāng-Kē

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Si l’on considère l’entrée de la Chine dans le XXIème siècle comme l’évènement planétaire le plus important depuis la découverte de l’Amérique, alors Jia est l’historiographe crucial de notre époque. Pour nouvelle preuve cette ample fresque composée avec un œil d’esthète, filant comme une flèche, agençant au gré d’ellipses fluides une multiplicité de tonalités qui courent du film noir au mélodrame, et accompagnant sur quinze ans la trajectoire d’une femme habitée par un amour sans retour, des principes implacables, avec à ses côtés l’écriture au présent d’une civilisation. Soit, des mines du Shanxi au chantier des Trois Gorges, la colossale mutation urbanistique et l’enlisement des espoirs, l’écoulement du temps et la perte des illusions, dans une dérive bordée d’horizons de ruines et d’engloutissement.

Thaddeus

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