Livres Lus 2018

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Dans cette chronique familiale démantibulée et où se multiplie les points de vue et les distortions temporelles, on se sent souvent plus chez Faulkner que chez les compatriotes baroques de Arenas (Lezama Lima, Cabrera Infante). Au plus près de la vie misérable, pas vraiment moins pénible au soleil, des vies étriquées, des destins tragiques, la folie qui rode et la tentation de la Révolution, peu d'espoir et de couleurs mais le matérialisme désabusé d'une génération sacrifiée par une dictature finissante.

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Avec un élan pour le modernisme qui ne nuit pas à son implacable lucidité, Mina Loy composait des poèmes virtuoses qui trouvent toute leur place dans le panthéon déjà encombré de l'Entre-deux guerres. Symbolisme fulgurant, métaphores vertigineuses, et une intellectualité sans pose, entre élégie et proclamations, et la fantastique amnamnèse autobiographique de son grand poème épique "La Rose Métisse" voilà une oeuvre une oeuvre qui me semble bien meilleure que son mythique mari (Arthur Cravan). Une excellente édition.

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Modernisme nous voilà encore une fois, avec un texte assez indéfinissable de bon docteur WCW, à lire doucement pour ne pas se perdre dans la narration schizophrénique car voici un roman qui essaie de se raconter lui-même, un processus d'écriture qui s'écrit, se rature devant nos yeux, mais aussi dans la suite de son "Au Grain d'Amérique" c'est l'histoire des Etats-Unis qui se rejoue dans ce livre, dialoguant avec l'écriture de Williams dans sa péiode la plus expérimentale.

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Un livre étrange, une sorte d'enquête de science-fiction, parasité par de l'autofiction un peu absurde, truffé de références culturelles plus ou moins sincères, on a du mal à svoir où Setz, parfois écrivain brillant, parfois un peu brouillon, veut nous emmener. On pensera peut-être à une grande métaphore sur la modernité, l'angoisse existentielle et le rapport à la technologie, le conspirationnisme, bref tout n'est pas entièrement satisfaisant mais il se passe des choses intriguantes dans ce livre.

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Faulkner encore, oui des plantations et des esclaves, mais c'est à la MArtinique, et Glissant se détache des ombres du Mississippi pour écrire cette chronique familiale forcément sanglante et tourmenté, tout le destin d'une île et sa longue filiation avec une institution est déplié. Le style est volontairement assez lourd à digérer, les inflexions panthéistes ou les références martiniquaises pas toujours évidentes à saisir.

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En général la pensée par aphorismes n'est pas vraiment ma préférée, souvent on réduit un sujet, ou bien on fait un bon mot, comme une tentative de fermeture de la pensée, quelques phrases et puis c'est fini, sujet suivant. Or ici pas du tout, ces courts paragraphes sont là pour ouvrir notre esprit à de nouvelles perspectives, de nouvelles perceptions. Tel un prophète Benjamin partage sa vision en une invitation à penser l'Histoire sur ces bases fragiles mais fertiles

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Un peu lourd le père Jean-Jacques, même quand il se lance dans des réflexions philosophiques potentiellement interessantes, le lecteur est tellement assommé par les longues pages de jérémiades et de paranoia qui les ont précédé qu'il a du mal à vraiment faire attention au déploiement de la pensée de Rousseau. Quelques belles pages sur la nature toutefois.

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Il y a une double dynamique dans ce livre. D'un coté, un point de vue plutot académique, Susan Howe re-situe Dickinson dans l'histoire de l'Amérique et celle de la littérature universelle, relevant ses nombreuses influences (de Shakespeare à Robert Browning, en passant par Fenimore Cooper ou Jonathan Edwards). De l'autre Howe essaie d'établir une 'connection' poétique entre elle et Disckinson, il s'agit d'exprimer, en poète, le ressenti à la lecture de la poésie Disckinson, et en quoi cette poésie re-définit la Poésie elle-même. Les deux courants ne se mèle pas toujours bien, on aimerait parfois que le poète laisse parler l'universaitaire, ou l'inverse, mais dans l'ensembleli livre est suffisament riche pour laisser cohabiter les deux.

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Forcément quand on se plonge dans Celan, Holderlin et dans Heidegger, la limpidité et la clarté ne sont pas les maitres-mots de l'étude, Lacoue-Labarthe réussit tout de même à expliciter efficacement ses thèses et ses remarques, mais tout de même ce n'est pas simple à suivre si on a pas le background philosophique adéquat. Le point clé est l'explicitation de la non-parole (au sujet de l'extermination) de Heidy à Celan lors de leur rencontre, Lacoue-Labarthe est un heideggerien, nul n'est parfait, mais un heideggerien lucide, conscient des apories du petit Martin.

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Fable dure et,presque cruelle, voire même cruelle, chronique d'une famille pauvre de Suède au 19e siècle, accablées par les difficulté matérielle et la figure d'un "diable protecteur". La langue mèle l'expression archaïque d'un prolétaire de l'époque à des accents bibliques, tout le roman peut se lire comme une nouvelle parabole ou une réécriture de Job

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Nicanor Parra, connu pour son 'anti-poésie", son influence sur Bolano, sa longévité (mort à 103ans l'année dernière), avait du attendre 2017 pour voir son oeuvre traduite en français, malgré sa célébrité en Amérique du Sud (et du Nord aussi). Si le terme d'anti-poésie semble en soi un peu exagéré, Parra s'est bien lancé dans une entreprise de re-fondation de la poésie en écartant le lyrisme, les métaphores, le prophétisme, mettant en avant le commun, la matière, le langage populaire, et l'humour aussi, c'est avant tout donc une tentative de modernité négative comme l'a définie Hocquard, il s'agit de dépouiller la poésie de ses vieux habits oraculaires et mystiques auquel le lecteur du XXe (et XXIe) siècle ne croit plus, la beauté, elle, résiste toutefois.

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J'ai un peu hésité sur la note, Simmons est un peu lourd avec ses références littéraires superfétatoires, son style un peu surécrit, ses détails trash et autres. Mais l'ensemble, conçu comme une somme historique des divers courants SF et fantansy, a de l'ambition et la construction via les différents laisse habilement monter le suspense sans affaiblir l'intrigue. On verra la suite...

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Tout part d'une fascination et d'un manque, tous deux créé par la puissance destructrice de l'Histoire et de la Technique, fascination de l'image, de la mort filmée par le meurtrier, et manque, absence du témoin capital de cette expérience unique et nouvelle, alors Bergounioux prend sa langue et essaie de combler ce manque, il se met à place d'un membre de l'équipage du bombardier abattu par le chasseur, et déplie l'histoire sans oublier sa propre fascination. Bergounioux est ici à la fois hiératique (cotoyant la métaphysique et la philosophie de l'Histoire) et immersif (ré-inventant la subjectivité du canonnier), ses phrases sonnent comme des déflagrations, le livre est court mais explosif. Son ami Michon intervient en post-face, plus joueur, et presque trop bavard. Dans l'ensemble un grand livre.

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Ouh, fait pas bon passer après Bergounioux (+ Michon), Rolin est un nain après ça, et il donne le baton pour se faire battre. Entre un style pseudo-classique compassé, avec métaphores qui tombent à plat et longues descriptions qui tirent à la ligne, une somme de clichés sur à peu près tous les sujets, un discours de vieux con(nbattant) 68ard enfilant les clichés, sur notre époque, tout sonne faux, en particulier les scènes africaines qui tiennent du mauvais fantasme de faux aventurier, et puis avant tout cette posture en creux d'un Rolin à la recherche de l'absolu (politique, amour, littérature) mais qui ne nous donne à lire que sa médiocrité. Assez désagréable au final.

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Pas toujours facile à lire cette avalanche de noms propres, une carte de l'époque et un dictionnaire sont conseillés. Bon après qui sommes-nous pour critiquer Hérodote, ou lui mettre une note, étrange coutume de notre époque, qu'il aurait sans doute jugé avec mansuétude, car anticipant sur nos anthropologues, c'est sa neutralité axiologique qui frappe souvent, lui qui raconte les horreurs de l'histoire et les moeurs barbares d'une voix égale, sans jugement, on y verra une succesion d'anecdotes, ou bien l'exposition de la diversité de l'homme, de sa volonté de puissance et de ses limites (car toujours les dieux veillent).

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Un livre qui aurait fait couler beaucoup d'encre, pourtant l'approche de Browning n'a rien de spectaculaire ou de polémique. Il s'agit tout d'abord de suivre au plus près le parcours d'un bataillon de policiers et son role dans l'extermination à l'aide de documents et de témoignages précis. Ensuite le dernier chapitre vient proposer différentes pistes d'explications au comportement des membres du bataillons. Clair et convaincant.

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Pamphlet sur le reniement de certains intellectuels, on reconnaitra en filigrane différents personnages non nommés, ex-gauchistes reconvertis dans le néo-conservatisme. C'est aussi une analyse assez générale du système de 'domination' actuel, mais bon ça reste un pamphlet, in fine un peu creux.

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Court roman déinissant le picaresque, énorme parodie très drole de diverses sociétés espagnoles de l'époque, mais qui du coup ne dépasse jamais vraiment la parodie, mais comme c'es tcourt ce n'est pas très grave.

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Bizarre non-roman voulant s'attaquer à la subjectivité bourgeoise, alternant critique littéraire et scènes pornographiques, répétitives comme le genre le veut souvent, puis d'innombrables visites de sites néolithiques, puis un twist final déstabilisant. Pas mal dans sa conception, un peu lassant dans son exécution.

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Roman-pamphlet de l'ére Internet, avec déconstruction jouissive du modèle de la Silicon Valley et de ses conséquences toxiques. Mais bizarrement un peu trop sous influence de ce qu'il dénonce, il multiplie les punchlines qui sonneraient bien sur Twitter, les analyses un peu simplistes, les indignations un faciles, une forme un peu trop éclaté entre différents onglets mais ça reste très plaisant.

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Défense exalté dans le style emphatique de Péguy d'un certain esprit républicain, d'un idéalisme révélé dans l'affaire Dreyfus, en passe de liquidation par les manipulations politiciennes diverses. Un peu dépaysant de se replonger dans cette époque dont on avait oublié les turpitudes, surtout via l'intransigeance de Péguy (Jaurès en prend pour son grade par exemple), qui est un mélange assez unique de lucidité et de naiveté.

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Cioran en mode "gentil", enfin pas complètement, le premier article, de loin le plus long, est une longue préface aux oeuvres de Joseph de Maistre, où Ciroan analyse sa fascination contradictoire face à la pensée infréquentable de ce réactionnaire par excellence, les affects et les tropismes de ce courant y sont parfaitement dépliés. Sur le reste du livre, de courts portraits souvent touchants, et plein d'esprit, c'est Cioran le styliste plus que le penseur systématique.

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Un court roman du 17e siècle, plongée dans un monde encore plus exotique qu'on le croit, où se mélange le théatre et la prostitution, la bisexualité et l'amour passionnel, le tout régi par le code d'honneur des samurais. Bien mais on aurait aimé un texte plus long, pour mieux s'imprégner de tout ça.

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Un livre bien peu aimable, trop long, obscène, dépressif, auto-complaisant. Gass se plonge dans les noirceurs de sa psyché, de l'Histoire, de l'humanité, ce qu'on y trouve n'est pas beau à voir, c'est la mise à jour du ressentiment universel, de la médiocrité aggravé par la nostaligie de l'espoir du bonheur. L'exercice titanesque, écrasant son lecteur, car Gass a sculpté chacune de ses phrases avec un soin minutieux, cherchant sa rédemption dans les beautés du langage, sa survie dans la puissance transcendante de la prose et à sa capacité d'incarnation d'un monde décevant mais vivant.

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Une poésie qu'on pourrait presque qualifier de moderno-archaïsante. On passe étrangement, du prosaisme le plus simple, la poésie comme simple hommage, à des subtilités langagières moins accessible, surtout pour celui qui ne connait pas bien le contexte italien ou l'oeuvre globale de Zanzotto.

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Une courte histoire du surréalisme, écrite très töt et par un 'compagnon de route' elle a le mérite de la clarté, de l'absence de reconstruction historique truquée ou de surinterprétation. On suit jour après jour le mouvement dans sa puissance et ses contradictions, la ligne de Breton semble claire, son énergie impressionne malgré ses erreurs et ses fausses routes.

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Roman d'initiation (féminin) au désir dans l'Orient fantasmé. Festin de l'érudition et de la prose luxuriante. Ducornet réveille ses sens et ceux du lecteur dans ce roman délicieux.

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Sorte d'hyper-romantisme, tourmenté par une figure féminine, Blok reprend les différents thèmles classqies pour les porter à leur haut point d'intensité, c'est le finisseur d'une époque, avec bien sur le pressentiment d'un évenement qui une fois arrivé lui coupera presque la parole (ce recueil ne contient pas ses derniers poèmes pour lesquels il est le plus connu).

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Vaste fresque du début du Siècle, de Londres à la Russie, toujours proche du réalisme magique, du fantastique du 18e siècle, des contes pour enfants réécrit par la vision moderne (ou post-moderne), avec Angela Carter ça foissonne, peut-être même un peu trop ici pour en retirer une satisfaction complète, un peu moins fort que "La Compagnie des Loups" ou "La Machine àDésir du Dr Hoffman"

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C'est un roman du 19e siècle bien sur (pas 2003 comme le dit SC...), mais dans l'esprit on est au 18e siècle, par ce format époistolaire et les allusions aux Liaison Dangereuse, Swinburne écrit ce livre comme une attaque contre la société victorienne trop hypocrite, délicieusement écrit et trop lucide.