C'est une curiosité ce petit bouquin qui provoque un peu, avec un titre moins subtil que son sujet. Il nous raconte le parcours d'un jeune homme qui souffre - croit-il - d'un trop-plein d'intelligence qui l’empêche de vivre une vie sereine et heureuse. Il décide donc de se rendre con, en se coulant dans le moule de la culture de masse et en absorbant les préjugés de tous.


J'ai assez aimé le propos de ce court roman qui nous prend moins pour des jambons qu'on pourrait le penser. Ce n'est pas d'intelligence bien sûr qu'il est question ici, mais plutôt d'une forme d'overdose de connaissances qui mène à l'impossibilité de nier la réalité des choses. A trop lire, à trop s'intéresser à tout, à trop s'informer tout simplement, Antoine en vient à ne plus éprouver qu'une angoisse sourde face à la vie, un phénomène qui me rappelle l'éco-anxiété qu'éprouvent parfois ceux qui aujourd’hui sont trop conscients de la crise climatique et biologique. L'auteur fait aussi la part entre "s'intéresser à quelque chose" (comme la prose de Proust ou l'écologie) et "se passionner pour quelque chose" (comme le foot).


Martin Page grossit le trait à loisir ici pour régler des comptes non avec une supposée bêtise du monde mais définitivement avec un certain style de vie, celui de ceux qui rendent les armes et s'abrutissent devant des sommités comme Hanouna, Alain Minc, Alain Finkelkraut . Il transforme son sensible héros en brute de Wall Street, qui trouve dans le pognon le néant qu'il cherchait au début du livre dans l'alcool ou le suicide...


Les amis du personnage "en perdition" (pensez, il devient super riche, par le miracle des algorithmes, et sombre dans l'oubli organisé du monde qu'est la "télé-réalité", la bien mal- nommée...), ses amis donc essaient d'intervenir en lui envoyant des livres par exemple pour le retenir du côté de la "culture", mais je crois surtout du côté de la conscience.
Antoine, lui, va couper le poire en deux, en revendiquant enfin de compte, et je trouve ça tout à fait jouissif, le droit de traiter de sale con un monde qui s'abrutit et qui semble de nos jours revendiquer sa connerie avec délectation. Faites, dis Antoine, mais laissez-moi alors le droit de dire ce que j'en pense. Pas faux, pas faux.


Bref un livre plus subtil que je ne le suspectais, et probablement plus cathartique pour l’auteur que pour nous. J'ai trouvé ça anecdotique mais très lisible, guys et guysettes!

nostromo
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le 29 nov. 2019

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nostromo

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