Bram Stocker nous livre une œuvre studieuse, bien construite, racontée par l'intermédiaire de ses personnages sous forme de correspondance, ou encore par le biais de coupures de presse. Cette forme de narration sied particulièrement bien à l'histoire qui nous est contée.
Cette histoire justement apporte une pierre fondatrice à la mythologie et à l'univers (jusque là plutôt féminin) du vampire, bien que de nombreux ouvrages en avaient fait référence avant celui-ci. On y retrouve nombres de caractéristiques déjà connues relatives aux façons de détruire la créature (ou plutôt la libérer) mais on y apprend aussi force détails quant à ses pensées, sa façon d'agir, ses buts, ses transformations et les limites de ses pouvoirs. Au final on découvre moult détails concernant le vampire en général et qui épaississent considérablement l'aura du personnage Dracula.
Mais la force du livre de Stocker ne provient pas seulement de l'intérêt porté au personnage du comte. Il est en effet plus qu'appréciable d'y trouver une atmosphère soignée, parfaitement retranscrite, du Londres brumeux à la Transylvanie glaciale en passant par la cellule de Renfield et le château cloisonné du vampire.
Le fait que l'on ait plusieurs points de vue selon les personnages et que l'on vive les évènements comme s'ils étaient décrits en temps réel renforce la cohésion de l'ensemble et immerge plutôt bien le lecteur.
Le problème vient du fait que Dracula aurait gagné à être "dégrossi" de quelques passages rébarbatifs s'étirant en longueur. On sent bien que l'auteur a voulu créer un effet de tension croissante mais cela ne fonctionne que par intermittence et l'on s'agace parfois devant les propos du professeur Van Helsing nous répétant que la fin du vampire approche alors qu'il reste 100 ou 200 pages ! Les répétitions (comme avec les séances d'hypnose) sont fréquentes et la traduction n'aide pas toujours (avec des répétitions de mots par moment un peu gênantes).
Sans faire de Dracula une nouvelle, l'épurer aurait été une bonne idée finissant de rendre l'œuvre plus culte qu'elle ne l'est déjà.
Dans l'absolu cela reste un livre fortement conseillé à tout lecteur, a fortiori pour les amateurs de récits angoissants (surtout pour le début au château) et ceux avides de connaissance relatives aux créatures vampiriques.