Lorsqu'on ouvre les premières pages de ce roman chorale, c'est pour être, comme la plupart des personnages, passablement désorientés, un peu hors du temps, en quête de quelque chose d'encore difficile à nommer. Aventure, évasion ? Chaque voix, d'abord anonyme, ou difficile à discerner, se sciende au fur et à mesure des chapitres, des liens tissés avec d'autres dans cette vaste prairie fantasmatique, où tout est lent et infiniment observé (la plaine est vaste, ouverte, on s'y oriente grâce aux mirages, aux oiseaux, aux pistes mystérieuses de prédécesseurs disparus et l'on observe longuement s'approcher les menaces et les opportunités). Sauvage, oui, un peu mystique sans doute, mais réussi, vraiment.
L'univers du sauvage côtoie dans ce roman celui de la ville qui s'implante - et toujours les mêmes jeux de regards, les canons de fusils qui fument, les frousfrous de mirages de tous ceux qui partent (et qui sont partis).
Se tricote petit à petit les liens qui les relient sur la plaine, puis dans la ville, et s'effilochent ceux qui les retenaient. Reste, après lecture, un sentiment étrange de liberté et d'avoir trouvé quelque chose, qu'on ne sait pas forcément mieux définir.
Peut-être le plaisir de lire un western, plein de tout ce qu'on aime dans les westerns, mais florissant dans un univers et une langue littéraire, dépouillée d'artifices et de raccourcis trop faciles. Un petit sentiment de transgression, d'évasion et de bonne humeur.