Je fais totalement partie de la "génération Harry Potter", c'est à dire qu'après avoir lu les premiers tomes, j'attendais chaque année le suivant pour savoir ce que devenaient les héros qui avaient à peu près le même âge que moi. Cependant, contrairement à beaucoup de "Potterhead", je ne les avais jamais relus jusque là. Ma critique va donc se concentrer sur certains aspects que j'ai remarqués lors de cette relecture à une dizaine d'années d'intervalles de la précédente. Elle ne sera donc pas exhaustive et passera sous silence tout ce qui a été dit maintes fois, pour se concentrer sur quelques aspects moins évoqués, tellement il est vrai que cette série est riche en significations.


Le cinquième tome est probablement mon préféré de. Parce qu'il est celui de la rébellion, mais aussi parce qu'il est le plus épais, ce qui laisse le temps à J.K.Rowling de complexifier son univers, les intrigues et thématiques secondaires, la psychologie des personnages... A l'époque de sa sortie, je me rappelle qu'il marquait une rupture avec les livres précédents moins sombres et plus orientés vers des préadolescents et je l'ai ressentie à nouveau car je suis en train de relire toute la série. Ce qui est marquant tout d'abord c'est la violence des sentiments éprouvés par Harry Potter et qui est prégnante dès les premières pages : colère, tristesse, deuil... C'est évidemment la réaction d'un adolescent "confiné" dans une famille d'accueil qui le méprise, une conséquence du lien entre notre héros et Voldemort, mais aussi ce que je n'avais pas vraiment perçu auparavant l'expression d'un vrai trouble de stress post-traumatique suite au meurtre devant ses yeux d'une personne qu'il connaissait à la fin du tome quatre. Chose tout à fait cohérente étant donné ce qu'il a subi et l'absence de prise en charge psychologique par les adultes suite à ce choc. Donc bien joué Joanne !


Deuxième point, je ne m'étais pas rendu compte à quel point l'auteur était féroce envers la presse, ou plutôt ce que cela signifiait de son regard sur nos sociétés de moldus (dont le monde des sorciers est un écho déformé). C'était déjà le cas dans le livre précédent concernant les torchons de la presse people (qui sont une spécialité anglaise), avec le portrait au vitriol de la journaliste Rita Skeeter, mais ce sont cette fois les mensonges politiques colportés par les revues prétendument sérieuses comme "La Gazette du Sorcier" qui sont dénoncés et forment les jeunes lecteurs à se méfier de la presse "mainstream"... Difficile de ne pas penser par exemple aux prétendues "armes de destruction massive" soi-disant détenues par Saddam Hussein et qui ont embarqué l'opinion britannique dans la guerre en Irak en 2001. C'est aujourd'hui presque une mode de taper sur les médias traditionnels, mais ce n'était pas encore le cas (en tout cas beaucoup moins) au moment de la sortie du lvire.


Ensuite, qu'est-ce que cela veut dire sur la politique ? La propagande des médias envers la population de sorciers dont Harry est victime (beaucoup ne le croient pas, cela le pousse à refuser l'aide de ses amis et par la même occasion le met en danger), sujet majeur qui court tout le long du livre, est orchestrée par le ministre de la magie, qui s'est convaincu lui-même que Voldemort n'est pas de retour. Le fait que presque tous les sorciers n'osent pas prononcer son nom est évocateur : "vol de mort", alors que la mort est un des tabous les plus présents dans notre société. Le déni de Cornélius Fudge est un comportement similaire mais à l'échelle politique qui est malheureusement assez crédible, quand on voit par exemple l'absence de prise en compte sérieuse des dangers du réchauffement climatique par les dirigeants du monde entier. Certains penseurs écologistes ont déjà souligné ce parallèle entre le déni de la mort et déni de la crise environnementale (Pablo Servigne, George Marshall...), tandis que des spécialistes d'Harry Potter ont étudié la différence de comportement face à la mort entre ce héros qui l’accepte et son ennemi qui la refuse.


Enfin et je ne m'étendrai pas là dessus pour ne pas faire trop long, lire Harry Potter et l'Ordre du phénix tout en étant un adulte c'est éventuellement mieux comprendre pourquoi Mrs Weasley a tellement du mal avec le comportement de Sirius Black un brin immature (même s'il est attachant par ailleurs et que cela s'explique parfaitement), alors qu'il s'agit probablement du plus "cool" du point de vue des jeunes. C'est se demander ce que Harry peut bien faire avec Cho plutôt que de sortir par exemple avec Luna Lovegood (oui, c'est mon crush personnel), même si c'est tout à fait crédible qu'à son âge il choisisse une fille mignonne plutôt que juste bizarre. Enfin c'est lever les yeux au ciel devant le manque de prises en compte d'Hermione qui sous ses airs agaçants est vraiment le personnage que tu rêverais d'avoir avec toi comme PNJ dans un jeu de rôle car elle a presque toujours raison (non mais vraiment, pas que sur les cours, on ne s'en rend pas compte c'est tout).

LecteurAzerty
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le 30 mai 2020

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