Just Kids
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Just Kids

livre de Patti Smith (2010)

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Voilà déjà quelques années que j’ai eu l’aspiration épiphanique de lire ce livre qui demeurera pour moi l’image, l’atmosphère, l’ambiance de mon été 2012 pour des raisons personnelles que je n’exposerais pas ici. Mais parce qu’il est de ces livres qui n’ont pas disparus dans les méandres de la mémoire, je crois qu’il faudrait lui rendre une certaine forme d’hommage, parce qu’il est aussi de ceux vers lesquels on revient régulièrement pour voler encore un fragment par-ci par-là, au gré des pages, ou que l’on se promet de relire un jour tout en craignant de le faire car cela n’entacherait-il pas la force du souvenir de sa première lecture ? La relecture serait nécessairement une nouvelle lecture (puisque je ne suis plus tout à fait la même, que chacun change au gré de nouvelles expériences de vie qui modifient nécessairement la perception que l’on a du monde) qui n’aurait donc rien à voir avec la première lecture (il y avait un contexte, il y avait un besoin de rencontrer ce livre qui m’est apparu par hasard, que j’ai choisi parmi tant d’autres sur les rayonnages de la librairie puis sur les rayonnages de ma bibliothèque, puis parmi les livres que j’avais emporté en voyage), mais après tout pourquoi pas.


A la lecture de Just kids, je me suis sentie comme Patti dans cette scène : « Je suis certaine que lorsque nous avions descendu le grand escalier, l’un derrière l’autre, j’étais en apparence la même qu’à l’accoutumée : une gamine de douze ans tout en bras et en jambes qui se traînait derrière les autres. Mais, secrètement, je savais que j’avais été transformée, bouleversée par la révélation que les autres humains créent de l’art et qu’être artiste, c’est voir ce que les autres ne peuvent voir. » (p. 27) J’ai été transformée par ce livre, j’ai été elle, Patti, pendant le temps de ma lecture (toujours trop court, on s’en rend compte a posteriori, alors que son aura a englobé dans le souvenir ces deux mois d’été entiers, la lecture en tant que telle n’a duré vraisemblablement que trois ou quatre jours).


Mais je m’arrête là, prise d’une hésitation, car je ne saurais véritablement quoi dire d’objectif à propos de ce livre pour vous en faire une critique plus fine ou vous donner envie de le lire ; tout ce qu’il me reste, ce sont ces souvenirs, ces images intérieures que je ne saurais mettre en mot ici et que je préfère de toute manière préserver dans le secret de mon intime. Et puis, même, vous partagez mes souvenirs de lecture de toute façon vous serait-il utile à vous ? Le meilleur engagement que je puisse encore vous tendre est celui-ci :


« Il m’a regardée, de ses yeux pleins d’amour et de reproche. Mon amour pour lui ne pouvait pas le sauver. Son amour de la vie ne pouvait pas le sauver. C’était la première fois que je réalisais vraiment qu’il allait mourir. Physiquement, il souffrait un martyre que personne ne devrait avoir à subir. Il m’a regardé avec l’expression d’un regret si profond que c’en était insupportable et j’ai fondu en larmes. Il m’a grondée, mais m’a prise dans ses bras. J’ai essayé de me ragaillardir, mais c’était trop tard. Je n’avais rien de plus que mon amour à lui donner. Je l’ai aidé à se traîner jusqu’au canapé. Par bonheur, il n’a pas toussé et il s’est endormi la tête sur mon épaule.


La lumière ruisselait à travers les vitres sur ses photos et ce poème silencieux que nous formions, assis ensemble une dernière fois, Robert mourant; il créait le silence. Moi, destinée à vivre, j’écoutais attentivement le silence qu’il faudrait toute une vie pour exprimer. » (p. 370)


Je vous souhaite de faire d’aussi belles rencontres que celle que j’ai avoir avec Patti, et peut-être votre rencontre avec elle sera-t-elle tout aussi inoubliable.

Justine-Coffin
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le 7 sept. 2016

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