Vaine tentative de connaitre l'autre ou unique moyen de faire un portrait je n'ai pas tranché.

L’autre qu’on adorait fait partie de ses livres auxquels il est impossible de ne pas se confronter dès lors qu’on en connait l’existence. Pourtant le risque est grand.
Catherine Cusset se propose de raconter Thomas; « celui qu’on adorait à qui on pardonne tout et qui s’enfonce dans une solitude qu’il tisse, comme malgré lui, à coups de sautes d’humeur, d’inadvertances, d’imprudences, d’accès d’impatience ou de caprices, qui ruinent infailliblement ses amours naissantes et ses projets professionnels – il est universitaire, passionné de Proust. »


Nous savons et elle aussi qu'autrui est une "ombre où ne pouvons jamais pénétrer" et dans un éclair de lucidité, l’auteur écrit : « tu les connais, ces romans écrits par des khâgneux : ça se veut intelligent, ça se regarde le nombril, c’est chiant. Mieux vaudrait s’abstenir ; la curiosité l’emporte ».
Elle juge sévèrement son précédent portrait de Thomas : « C’est à la cime du particulier qu’éclot l’universel. » [Proust] Mon livre n’atteint aucune cime. Il ne t’atteint même pas en profondeur. Il reste au ras des pâquerettes. J’ai transformé ta vie en un fil chronologique dont j’ai ôté toute substance pour la juger à l’aune du succès en suivant des critères purement sociaux. »
Celui-ci n’est guère différent…


Pour autant, elle réussit son pari. Malgré la faiblesse du style rehaussée de citations de Proust assez justement choisies, le roman a occupé mon lundi de Pâques plusieurs heures d’affilée. Néanmoins, il faudra faire le boulot à sa place et y mettre toute votre âme si vous voulez que Thomas ne soit pas réduit aux faits de son existence publique.
Qu’il existe des gens comme Catherine Cusset devrait vous dissuader du suicide de peur qu’ils prétendent décrire l’homme que vous êtes à partir de fragments, de fait et de citations empruntées

FranckDaloz
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs livres de 2017

Créée

le 20 avr. 2017

Critique lue 353 fois

Franck Daloz

Écrit par

Critique lue 353 fois

D'autres avis sur L'Autre qu'on adorait

L'Autre qu'on adorait
borychanski
3

L'autre moi que j'adore

"Tu les connais, ces romans écrits par des khâgneux : ça se veut intelligent, ça se regarde le nombril, c'est chiant." Catherine Cusset fait involontairement preuve d'une grande lucidité quand elle...

le 1 nov. 2016

13 j'aime

1

L'Autre qu'on adorait
mallorie
7

Critique de L'Autre qu'on adorait par mallorie

*L'autre qu'on adorait* est l'histoire de Thomas Bulot, racontée par sa meilleure amie Catherine. Dans ce roman, Catherine est la narratrice, elle utilise un "tu" pour désigner Thomas, et non un "il"...

le 8 oct. 2016

5 j'aime

L'Autre qu'on adorait
RaphPec
8

Non-assistance à ami en danger

On suit la descente aux enfers d'un ami (et ex amant) de la narratrice (et de l'auteure?). Le livre s'ouvre sur 5 pages présentant le suicide de cet homme. Puis on reprend le fil de sa vie,...

le 2 nov. 2016

5 j'aime

1

Du même critique

Désintégration
FranckDaloz
7

Un cri de rage pure qui ne faiblit pas d'un bout à l'autre du roman.

Emmanuelle Richard se revendique de l'autofiction en invoquant Dustan en début de bouquin. Il faut donc prendre avec des pincettes ce cri de rage pure qui ne faiblit d'un bout à l'autre du roman. Son...

le 30 sept. 2018

3 j'aime

120 battements par minute
FranckDaloz
9

Un beau fragment de l’histoire des mouvements revendicatifs LGBT

27/05/2017 Très bon film en rien putassier ni larmoyant. On est loin du cinéma américain. On retrouve parfaitement l’ambiance associative, ses débats, son fonctionnement. L’énergie et la force que...

le 15 juil. 2017

3 j'aime

Le Puy du faux
FranckDaloz
7

Falsification de l'histoire au profit d'une idéologie au moins antirépublicaine et sexiste.

Rappelons que pour Philippe de Villiers, scénariste de tous les spectacles, le Puy du Fou aurait bien un usage militant. Il déclare: « Je pense que la métapolitique a plus d’influence que la...

le 1 mai 2022

2 j'aime

1