Tome I : Tomek.


C'est l'histoire de Tomek, un jeune homme qui avait tout. Mais qui ayant tout n'avait rien. Ni l'incertitude, ni la suprise. Aucun plaisir de la chose heureuse que l'on n'attend pas. En sommes, une existence monotone dénuée d'aventure. Et le jeune Tomek en avait soif d'aventure !


La rivière à l'envers et son premier tome "Tomek" est tendre, drôle, mélancolique, joyeux et apaisant. Apaisant car malgré sa légèreté La rivière à l'envers traite presqu'avant tout du dueil et de la mort. Mais à la hauteur de ce qu'elle est : une douce et imperceptible traversée.


Lecture de jeunesse qui transcende les âges et peut plaire autant aux enfants qu'aux adultes ayant su conserver leur part d'innocence. Jean-Claude Mourlevat a une plume agréable. Très sobre. Mais pas dénué de poésie, au contraire. Elle est à l'image de sa créativité débordante qu'il sait exprimer avec beaucoup d'humilité.


On pourrait croire a l'aune des premières pages que Tomek serait une bizarrerie en tant que livre de jeunesse car vantant l'amour du passé. Dans une sorte de nostalgie déplacée. Il n'en est rien. Ce passé n'a jamais existé et cette nostalgie est fausse. Quand Mourlevat écrit que "tout était pour le mieux dans le meilleur des mondes", la référence à Leibniz est évidente et offre un double niveau de lecture a l'adresse des adultes. Tomek devenant par la même un conte à caractere davantage philosophique. Si bien que j'ai pu avoir l'audace de croire que Jean-Claude Mourlevat allait nous offrir le "Candide du XXIeme siècle". J'etais trop enthousiaste, sachant que j'ai parfois une forte tendance a surinterpreter.
Non, La riviere à l'envers est un conte plus modeste. Mais pas moins beau !
Certes, Marie est une critique des mariages de convenance et Icham celle du travail (éloge très convenue du droit a la paresse). Il n'en demeure pas moins que ce conte reste un voyage de l'imagination. Tout en étant le cheminement entre une question et sa reponse. Celle du jeune Tomek, celle du jeune lecteur.


Mais La rivière à l'envers est aussi une ode à la liberté et a l'insouciance. À la vie, à l'amitié, à l'amour. Tomek nous exhorte au courage de vivre !
Car comme nous, Tomek doit s'arracher à son passe et à son heritage voire meme tout simplement au Passé avec un grand P. Tendre les bras vers l'avenir et ne pas fixer eperdumment son regard derriere soi, au risque de ne pas vivre. D'être déjà mort. Or peut-être est-ce parce que Tomek souhaite vivre qu'il est irremediablement tourné vers l'action et vers demain.


Tels sont, en tout cas pour moi, les messages de Jean-Claude mourlevat.


Le regret peut-être que beaucoup soit lâché dès les premières pages, avant même qu'on ne parle de cette fameuse rivière Qjar et de son pouvoir. Un tome plus dense aurait été préférable même s'il brille neanmoins par sa simplicite, dans tout ce que cela a de noble évidemment.
Le rythme est parfois mal mesuré mais s'adapte davantage à un public jeune aussi ce n'est pas vraiment préjudiciable.


Pour finir je dirais que dans les quelques cent page de La Rivière à l'envers il y a de l'altruisme (l'eau n'est pas pour soi), du progressisme, de l'anticonformisme, du spiritualisme (l'idée d'appartenir à un Tout), du voltairien dans l'approche, du stoïcisme bien sûr et même du Sartrien. C'est tres fort. C'est tres beau.
Or personnelement j'aime picorer çà et là dans un livre et y piocher une part de ce qu'il propose ou ce sur quoi mon regard se focalise. Laissant le temps et la maturité m'offrir un autre voyage lors d'une nouvelle lecture. Inevitable relecture, et c'est la plus grande force de cette Rivière à l'envers.


Tome II : Hannah.


Quelle déception... ce second tome est une succession, plus marquée, de contes grossiers. Certains abordant de maniere étrange des thèmes deja abordés dans le premier tome et de facon parfois si maladroite que cela peut en devenir glauque (Iomri...).
Cela offre un peu d'ampleur supplémentaire à l'univers du premier tome. Le rythme est encore plus rapide voire expéditif. Je craignais de me lancer dans une suite publié seulement deux ans apres le premier. Et malheureusement c'est un deception. Avec l'impression finale d'un tome bâclé ou en tout cas écrit par un autre auteur que Jean-Claude Mourlevat. Sa plume étant beaucoup moins belle...
Dommage.

Dirini_
8
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le 1 oct. 2019

Critique lue 2.3K fois

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Dirini_

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