Ce premier tome de la saga du Sorceleur est tout de même assez surprenant.
Moi, je suis passé par la "mauvaise porte" pour rencontrer Geralt et toute la bande de monstres à mandibule qui puent de la gueule. J'ai regardé la série sur Netflix, et alors que je trouvais ça assez extasiant, je ne faisais que tomber sur des gonzes ou des critiques affirmant que c'était finalement une bien belle daube. Alors ça fout toujours un coup à l'égo d'apprécier les oeuvres "à chier" de façon aussi unanime, mais vous voyez, je n'en suis pas à mon premier coup.
Je ne connaissais pas les jeux vidéos (j'avais bien entendu le nom, mais n'ayant jamais été "un gros gamer"...) ni les livres. Je me suis donc procuré ces huit tomes, tout majestueux avec leurs blasons tape-à-l'oeil, et me suis donc attaqué à l'errance solitaire et mouvementée de Geralt de Riv.
Et force est donc de constater que le contrepied amusant pris par l'auteur. Ce "Dernier Voeu" est en fait un recueil de nouvelles, vaguement contorsionné par un fil conducteur assez dispensable. Et on découvre donc notre bon vieux "Loup Blanc" à-travers une suite d'aventure, toutes aussi évocatrices les unes que les autres des contes traditionnel, et se faisant discrètement écho. Et je dois bien avouer que le tout est très bien exécuté, tant l'univers et les personnages se dessinent sans peine et gagnent en charisme à chaque page.
Pour Geralt, les dés étaient déjà jetés, tant l'idée de sorceleur était de base excellente. Prendre une brutasse à la Conan et lui rajouter le look de Legolas ne suffisait pas, Sapkowski a donc construit un personnage tout en nuances et en mystère. Si l'on veut se cogner la fantasy pure, le choix est assez amusant: Geralt est un mutant, abusant d'alchimie pour doper ses capacités et de sorts en tous genres qui tombent plus sous une "magie de dépannage" que de vrais pouvoirs qui brûlent des forêts en un clin d'oeil. Aux proies avec ses sentiments (que lui-même décrit comme inexistants, mais vous savez bien que Geralt au fond c'est un coeur qui fond), on découvrira ses déboires amoureuses, ses réflexions quant au monde et sa place, lui qui est systématiquement stigmatisé à chaque village rencontré...
Et on amorce donc quelques gros thèmes de la saga (en tous cas, après avoir lu les 3 premiers...) que sont notamment notre rapport à l'altérité et la tolérance.
Rajoutons à cela que la puissance narrative est bien présente et les récits bien assez mouvementés pour ne pas s'ennuyer.
S'il fallait retenir une ou deux en particulier, je soulignerais l'intensité dramatique et le déroulé narratif de la nouvelle "Le Moindre Mal" qui à-travers un abattage en règle du manichéisme explore la triste histoire de la Pie-Grièche, jeune femme bien secouée par la vie qui touchera Geralt et le lecteur par la même occasion. "Le Dernier voeu", donnant son titre au recueil, est également une histoire originale semant les bases de la relation entre Yennefer et Geralt, et avouons-le, cette relation me semble suffisamment intriguante et en retenue pour déjà l'apprécier fortement...
Donc vous pouvez lire sereinement "Le Dernier Voeu", que vous soyez gamer, amateur de la série ou juste un lecteur curieux. L'univers déployé par Sapkowski a le mérite d'être bien pensé et haut en couleur, ce qui promet de jolis moments de lecture.