Nous sommes loin d’American Gods, pourtant le propos pourrait s’y prêter, mais il y a énormément de points de divergence entre l’œuvre de Neil Gaiman et ce court roman du finlandais Arto Paasilinna. D’abord, il n’est pas question des Ases, des dieux des mythes nordiques qui ont inspiré tant d’auteurs, dont l’illustre Tolkien. Non, les dieux mis en avant dans Le fils du dieu de l’Orage sont les dieux antiques de la Finlande, un créneau donc très spécialisé dans les croyances scandinaves.


Ainsi, les anciens dieux finlandais n’ont plus beaucoup de fidèles. C’est Jésus et la foi luthérienne qui ont pris le marché. Lorsqu’un dieu explique qu’il serait bien que le dieu suprême de ce panthéon peu ordinaire envoie son fils sur Terre comme le fit jadis celui des luthériens, l’idée est aussitôt mise en œuvre.


Pendant ce temps, sur Terre, Sampsa Ronkainen est persécuté par les femmes qui hantent son existence. Dans sa vie de propriétaire terrien, il doit supporter les fêtes que donne sa sœur. Cette dernière est toujours accompagnée de sa meilleure amie, la maîtresse de Sampsa. Certes, il l’a honoré dans le passé, mais ce fut surtout un prétexte pour lui permettre de squatter avec son frère la demeure de Sampsa.


Pour fuir ces tensions, Sampsa a bien sa boutique d’antiquité à Helsinki, mais il a eu le malheur d’avoir une aventure avec celle qui depuis s’occupe de l’intendance de la boutique. Sauter de Charybde en Scylla fait donc partie de la vie bien morne de Sampsa. Lors d’un de ces jours de grand désespoir, il se remémore les prières anciennes que lui avait apprises son père. Et c’est en sacrifiant aux anciens dieux finlandais que surgit le fils du dieu de l’Orage, Rutja.


L'homme et le jeune dieu conviennent d’échanger leurs enveloppes charnelles et c’est sous l’apparence de Sampsa que Rutja va faire le rude apprentissage de la vie d’homme. Sa découverte des contingences humaines sera une suite de scènes cocasses pleines de cet humour propre à Arto Passsilinna. Puis, il va s’attaquer à sa mission principale : reconquérir le cœur des Finlandais pour restaurer la foi en son père.


Nous ne sommes pas dans une guerre des dieux, car tout se passe fort pacifiquement et même, avec une candeur volontaire. Comme dans la plupart de ses ouvrages, Arto Passilinna nous convie à poser le regard de l’étranger sur notre monde et les règles ridicules qui le régissent. Le lecteur avisé, connaissant ce fin observateur, ne manquera pas de s’interroger tout du long pour se demander comment cela va bien pouvoir finir. Et, étonnamment, c’est une fin inhabituelle qui nous est proposée ici.


Nous avons donc avec Le fils du dieu de l’Orage une belle fable moderne et vivifiante qui ne manquera pas d’éveiller l’intérêt des lecteurs qui découvrent ce grand monsieur de la littérature finlandaise.

Bobkill
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le 6 juil. 2018

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Bobkill

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