Précédé par la réputation de son auteur, "Les Particules élémentaires" ne déçoit pas. Il est aussi sale, méchant, pessimiste et cynique qu'annoncé. Mais pas que...

En cela, il est à la fois exaspérant et jouissif, selon que l'on aime ces écrits à la Moix ou à la Beigbeder, symptomatiques d'une époque où la moindre pincée d'amour ou d'humanisme passe pour la dernière des niaiseries. Primauté au détachement : Bruno et Michel (les deux protagonistes) sont décrits de manière lapidaire, avec un recul plein de dégoût et de pitié. Les corps sont gras, flasques, en décomposition permanente, tout comme les sentiments dont la dilution est annoncée dès leur formation. Houellebecq grossit le trait (parfois jusqu'à rendre le propos comique) et saupoudre le tout de blabla scientifique volontairement obscure : l'on observe la débâcle des personnages avec la même hauteur et le même détachement que le scientifique derrière son microscope. On ne se sent pas vraiment concerné. Ce sont pourtant des humains dont il est question.

C'est d'ailleurs lorsque l'auteur nous le rappelle qu'il offre ses plus belles pages, et que le livre arrive malgré tout à toucher. Quelle force de plume faut-il, en effet, pour rendre émouvants les pérégrinations émotionnels de Bruno, qui traverse la vie la queue entre les jambes, et dont rien ne nous est épargné de ses éclairs lubriques, de ses fantasmes dégoûtants, de l’affaissement de son corps ! Alors même que l'envie nous prend de le mépriser, et que l'auteur semble nous y inviter, voilà qu'apparaît l'idée que ce petit être de rien, cette grosse boule de graisse, a elle aussi le droit de prétendre au bonheur. L'ataraxie prônée par l'auteur n'est-elle donc qu'un leurre ? Le bonheur est-il finalement un objectif souhaitable et accessible, même au plus ordinaires des obsédés ?
La réponse en fin de livre...

"J'ai envie de vivre avec toi. J'ai l'impression que ça suffit, qu'on a été assez malheureux comme ça, pendant trop longtemps. Mais je crois qu'on peut être heureux, ensemble, jusqu'à la fin. En tout cas, j'ai envie d'essayer. Je crois que je t'aime".
CLaze
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le 25 mai 2014

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