Les servantes d'auberge est un recueil de trois nouvelles et d'un scénario, le titre est celui du deuxième récit. Contre mon habitude je ne ferai que résumer le début d'une des nouvelles, car je trouve celles de Kawabata plus denses que celles de ses homologues.
Le pourvoyeur de cadavres:
Lors d'une discussion entre le narrateur qu'on suppose être l'auteur, et une connaissance ils évoquent une farce de John Morton Box and Cox, dans laquelle les personnages occupent tout deux la même pièce, alternativement, nuit et jour, si bien qu'ils ne se rencontrent jamais, ce qui donnent lieu à tout un tas de situations comiques. Asagi Simpachi décide de raconter à Kawabata qu'il a lui même vécu une situation similaire et devient alors le narrateur principal de la nouvelle. Un jour en prenant le bus il tombe fou amoureux d'une jeune Receveuse du nom de Yukaï. En essayant de la rencontrer et de s'approcher au plus près d'elle il tente de trouver un logis près de son domicile étant étudiant il n'aura besoin que d'une pièce pour étudier le jour, et le logeur de la jeune fille lui propose la pièce où elle habite qu'elle n'utilise que pour dormir. Ils se partagent donc le loyer et le logis. Simpachi est tout émoustillé de vivre dans l'atmosphère de sa bien-aimée, il voit dans tout ses gestes et ses non-gestes des attentions qu'elle lui destine, une nouvelle tasse, son habitude de tout ranger de façon maniaque... Cependant, très vite la jeune Yuki tombe gravement malade, ses poumons sont touchés, on convoque les médecins, mais il est trop tard. Le jeune garçonse fait passer devant tous pour me mari de la belle morte, réalisant ainsi le rêve qu'il n'avait pu même envisager de son vivant. N'ayant pas de famille ni d'amis, il n'est même pas possible de lui offrir une sépulture décente. Sempachi en discute dans sa faculté et la meilleure solution qu'il trouve est de vendre son corps à la science afin qu'il soit disséqué par les étudiants. Il hérite de la chambre partagée et même d'un curieux portefeuille trouvé lors de son travail dans le bus, pour lui tout va bien, jusqu'à ce que la cadette de Yuki arrive en réclamant les restes de sa soeur défunte...
Je ne connaissais pas Kawabata, oui, la honte soit sur moi, ma meilleure amie m'avait conseillé Les Belles endormies, mais il était malheureusement déjà emprunté et au vu de ce premier ouvrage je comprends pourquoi. L'auteur a écrit ces nouvelles dans les années 30 et non seulement les sujets, mais également la manière dont ils sont traités est résolument moderne, même pour aujourd'hui. L'auteur fragmente ses récits de façon cinématographique, d'autant plus dans le quatrième récit qui est fait pour être adapté pour cet art (des vues de personnages dans un hôpital psychiatrique autour d'un gardien ayant pris cet emploi pour suivre sa femme devenu folle qui retrouve sa fille venue par hasard). Des scènes empruntes d'une poésie puissante, et pourtant distillées avec soin. Un art purement japonais, sans en faire des tonnes, juste la bonne mesure. Kawabata sait aussi donner dans l'humour, et souvent noir, comme dans le pourvoyeur de cadavres où la mort n'est plus un tabou, qui a dû faire hurler les lettrés de l'époque. Tout les thèmes osés y passent, dans la première nouvelle : Illusion de cristal, un scientifique essaie de procréer par éprouvettes on ignore si lui et sa femme sont stériles ou non,ils possèdent une serre où ils font des expériences étranges sur des animaux, récit à la limite du fantastique et vraiment d'avant-garde pour un sujet qui au final tient plus du sentimental que de la science. Dans la nouvelle éponyme, les servantes en question fréquentent les filles du bordel et ont des discutions libérées à propos de leur sexualité. Cet auteur japonais sait se débarrasser de l'habituelle retenue orientale tout en gardant la poésie qui fait le charme de cette culture. SI vous ne connaissez pas encore, c'est le moment!
Diothyme
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le 3 mars 2011

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