Lorsque j'apprécie un auteur, j'aime bien situer le roman que je m'apprête à lire ou que je viens de lire dans la carrière de son auteur.
Et là, petite difficulté, il y a eu un premier roman de Jane Austen en 1798 (à l'âge de 23 ans, roman de jeunesse ?) "Susan" qui a été repris de nombreuses fois pour finir transformé en "Northanger Abbey" et qui sera publié après la mort de Jane Austen.
C'est donc un roman qui a longtemps mûri comme, finalement, l'héroïne Catherine Morland. Car il s'agit bien de cela dans le roman puisque Catherine est une jeune fille qui a eu une enfance heureuse dans une famille nombreuse, plutôt modeste, à jouer au cricket ou à parcourir la campagne et surtout à lire des romans "gothiques" où elle joue à se faire peur et à s'imaginer dans des situations mélodramatiques.
Jusqu'au jour, où elle est invitée à accompagner à Bath des amis de ses parents, et là, confrontée à la société à travers des bals ou des rencontres, elle va découvrir peu à peu, à ses dépens, la vie, l'amitié, la jalousie, la trahison, les sombres manœuvres, la malveillance…
Contrairement à ce que j'ai pu lire ça et là, je ne considère pas que l'héroïne est une oie blanche, je lui trouve au contraire une intelligence certaine car elle sait bien raisonner et réagir opportunément aux différentes situations auxquelles elle est confrontée. Simplement, sa mentalité, que je trouve très belle et très honnête, ne considère pas d'emblée la noirceur ou la malveillance chez son interlocuteur ou son interlocutrice. Elle est profondément positive. Et quand elle subit un revers, elle en est profondément affectée. Mais ce n'est pas ça "être une oie blanche".
Les rêveries tirés de ses lectures ? Qui n'a pas vécu à l'adolescence la même chose après avoir lu un roman particulièrement passionnant ou angoissant où le lecteur s'imagine volontiers en situation ? Elle-même rira d'elle lorsqu'elle s'apercevra qu'elle psychote surtout quand elle est à "Northanger Abbey", la demeure gothique de ses amis Tilney qui ressemble aux manoirs des romans qu'elle lit.
A part ça, on trouve dans le roman les invariants habituels Austeniens à savoir la considération de la société anglaise de l'époque vis-à-vis d'in individu qui dépend beaucoup du niveau de revenu ou du niveau de fortune.
Un point particulier dans ce roman qu'il ne me semble pas avoir remarqué dans ses autres romans. La romancière intervient directement dans le roman pour porter un jugement sur telle ou telle situation ou sur telle ou telle décision que viendrait à prendre son héroïne. Un peu comme "une voix off", dans un film …
Je trouve cela très original (au moins pour l'époque) et cela tendrait à me prouver le fort attachement de Jane Austen pour son héroïne. Il y a peut-être là un embryon d'explication sur la durée de la gestation du roman …
Il y a une adaptation du roman au cinéma qui est très fidèle. Parmi les critiques que je formulais, je trouvais que la conclusion du film était très abrupte et aurait mérité un peu de développement.
Ici, dans le roman, la conclusion est encore plus abrupte, à peine une demi-page ! Au point que je finis par me demander si le roman, posthume, a bien été achevé …
Roman écrit, comme d'habitude chez Austen, dans un beau style, plaisant à lire.