Black Sails
6.8
Black Sails

Série Starz (2013)

La Piraterie. Thème intemporel, inépuisable et indéfectible de l'imaginaire collectif.


Les récits de ces forbans ont données naissance à une profusion d'œuvres en tous genres; allant du cinéma classique d'aventure, en passant par les mangas jusqu'aux sagas de science-fiction. Leurs désirs de liberté, de transgression, de découvertes et de vies hédonistes séduisirent de tout temps le public; et se marient sans peine avec un très grand nombre de genres culturels. De facto, parmi les grands noms de la pop culture, la piraterie est peut-être le thème le plus versatile et le plus facilement adaptable aux nouveaux récits.


Et pour une nouvelle série à vocation historique, Black Sails -lors de son lancement début 2014- avait un positionnement particulier: être la préquelle du roman " l'Ile au Trésor " de Robert Louis Stevenson. Nous racontant ainsi la jeunesse de Long John Silver, célèbre flibustier de l'œuvre, au début du XVIIIème siècle: durant ce qui, plus tard, sera appelé l'âge d'or de la piraterie.


Cap sur les Bahamas, et plus précisément sur l'île de New Providence, fief de Nassau, fief des boucaniers. C'est sur cette ancienne colonie britannique, devenue une terre de non-droit après la guerre de succession d'Espagne, que sont introduits les héros et héroïnes de Black Sails:
Capitaines pirates en quête de butin espagnol, quartier-maître aigrit par les conspirations de son supérieur, équipages assoiffés d'or et de luxure, gérante de cette économie officieuse née du pillage, armateur des flibustier, espionnes des maisons-closes…
Plus qu'une épopée faite d'abordages, de bricks voguant, de bordées de canons, d'enivrante liberté et de drapeau noir, Black Sails présente tout un écosystème sur le monde de la piraterie. Ses leaders, ses motivations, ses idéaux, et bien évidemment ses querelles intestines.
Dans cet univers où les marginaux, anciens forçats, rebus de basse extraction ou esclaves des empires occidentaux se croisent, une solidarité des "frères de la côte" les rassemblent dans cette nation pirate utopique. Et pourtant, l'appât du gain l'emporte bien souvent sur les promesses fraternelles; trahisons et assassinats étant monnaie courante dans ce monde sans honneur…


"England takes whatever, however, whenever its wants"


Le contexte de Black Sails est intéressant à plusieurs égards: il est historiquement juste, révélant une facette méconnue -voir même un idéal- propre à ces forbans de mers. Et surtout, il permet d'iconiser -à part Silver et son capitaine Flint- des grands noms de la Piraterie: Calico Jack, Anne Bonny, Charles Vane, Benjamin Hornigold, Edward England, et même le légendaire Barbe-Noire. Et la série fait effectivement la part belle à ses personnages, voir même trop.


Ainsi, si par exemple la relation entre le jeune Silver et son capitaine Flint est travaillée - révélatrice de ce qui se passera ensuite dans "l'Ile au Trésor"- la longueurs de certains dialogues coupe le suspens pourtant croustillant de la série. Ces conversations aux faux accents mélodramatiques (ex: saison 3, typiquement ceux entre Rakham, Max et Anne Bonny), alourdissent la saga de parlottes inutiles, au détriment d'une storyboard plus courte, mais maîtrisée.
Dédicace à un des plus atroces accent français des productions modernes.
Concrètement, ces écarts de scènes (plus quelques "faux" cliffangers) donnent l'impression de meubler les épisodes de la série, et même si elles sont minoritaires, cela est bien dommage.
En revanche, les actes et valeurs attribuées à d'autres personnages -comme Flint, Charles Vane, Guthrie ou encore le gouverneur Woodes Rogers- s'articulent de façon remarquable dans cet univers sans foi ni loi. Car ils illustrent les conflits d'époque dans la vision du monde de flibuste: accepter le pardon royal, ou bien mener une guerre contre l'oppresseur anglais, se racheter tout en organisant le marché noir, créer une nation pirate forte et indépendante… Et ce, même si les grands capitaines des boucaniers sont -parfois- volontairement distants de leurs modèles historiques.
Autant de clivages et de luttes pour le pouvoir qui façonnent le cadre presque "politique" de Black Sails.


"All I see here is decay"


Dans sa globalité, au contraire de certaines de ses concurrentes, la série évolue sensiblement au cours de ses trois saisons. D'abord un portrait alléchant de la piraterie (n'échappant pas aux écarts des scènes de boobs à outrance), Black Sails développe ensuite -progressivement- une facette héroïque. Ce qui n'était qu'un prétexte au sexe et à la violence se mue petit à petit en univers cohérent, veiné d'intrigues complexes, où les enjeux se mesurent à la vénalité de ses personnages.


Notamment dans les choix audacieux des héros, des joutes téméraires qu'ils mèneront, ou de bouleversements qui les feront choir. A cet égard, si les scènes d'affrontement ne représentent qu'une partie de la saga, force est de constater qu'abordages, batailles navales, assauts terrestres et duels de flibustiers sont saisissantes de dynamisme.
Enfin, le casting sélectionné pour Black Sails remplit parfaitement son rôle: jouant entre l'autorité, le charme, la duperie, la bestialité et le charisme des personnages; les acteurs dressent ici un tableau de la piraterie multiforme et original.


VERDICT:
Scénario: 3/5
Ambiance visuelle: 4/5
Musique: 4/5
Jeu d'acteurs: 3/5


Produite par la Starz Channel -chaîne qui a rarement brillé dans ses séries dites "historiques" (Da Vinci Daemon, Camelot...), Black Sails compte néanmoins dans ses autres producteurs un titre de renom: Michael Bay. Et les puissants enjeux à l'œuvre dans la saga ne sont certainement pas étranger au cinéma spectaculaire du monsieur.
Tel Game Of Thrones, Vikings ou Les Tudors, la saga bénéficie également d'un générique d'ouverture à la musique grisante, reconnaissable entre mille, évoquant l'allégorie de la mort qui rôde à tout instant sur la flibuste.
Toutes les saisons ne se valent pas: la première était peu ambitieuse, la seconde trépidante et la troisième un poil décevante. La série s'ancre néanmoins sur un choix narratif risqué, mais original: centré sur les personnages avant l'action, sur le cadre émotionnel avant l'ensemble scénaristique.
Malgré ses redondants défauts d'écriture, Black Sails est un bon exemple de réalisation qui s'apprécie avec le temps. Qui, comme un grand cru, s'améliore avec l'âge.

GeffGrn
7
Écrit par

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le 26 avr. 2016

Critique lue 429 fois

2 j'aime

Calme Ignition

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