Cutie Honey Universe
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Cutie Honey Universe

Anime (mangas) AT-X (2018)

Où est passée la "magic touch" de Go Nagai dans cette énième adaptation ?

Pour découvrir Cutie Honey, ne commencez pas par cette série, commencez par le manga ou la première série animée. Il s'agit d'une oeuvre culte de Go Nagai, l'inventeur de Goldorak, mais au Japon l'inventeur avant tout de Devilman, Mazinger Z et Cutie Honey. Go Nagai a eu un succès important avec sa première série qui a accompagné et favorisé le lancement du célèbre Weekly shônen Jump. Il s'agit de L'Ecole impudique. Cette série est à l'origine du Collège fou, fou, fou ou des séries GTO. Dans L'Ecole impudique, les garçons veulent avoir des relations avec les filles, mais les professeurs eux-mêmes, et les filles se défendent, mais sont elles-mêmes émoustillées et n'ont pas tant de problèmes que ça avec leur nudité. La série a choqué à l'époque et Go Nagai lui a donné une fin étonnante. Or, Cutie Honey s'inspire de cette série initiale pour plusieurs éléments, puisque l'héroïne est logée dans un pensionnat pour filles, et les amours saphiques vont bon train. Même Honey et sa meilleure amie se touchent entre elles. Le sujet est traité avec parcimonie, mais pour l'audace de ce qui est suggéré on va droit au but.
Go Nagai a donc un rôle important dans l'évolution du genre ecchi et dans l'érotisation du genre des magical girls, dans le développement aussi de personnages féminins qui sont des héros forts et sexys à la fois. Après, il y a un traitement du dessin qui correspond à son époque, on a un côté cartoon rétro, du glamour du début des seventies dans des images un peu psyché, colorées, flashy, des personnages caricaturaux, etc.


Visiblement, il y a eu de nombreuses adaptations de Cutie Honey depuis le manga d'origine jusqu'à nos jours. Et de tout ce parcours, je ne connais que le début, le manga d'origine, et la fin, la présente série Cutie Honey Universe. Plus précisément, j'ai d'abord lu le volume Cutie Honey l'intégrale, édition française en un seul volume qui correspond au manga de 1973-1974, puis là je n'ai encore vu que les six premiers des douze épisodes de l'adaptation en animé de 2018. Or, le manga correspond aux six premiers épisodes de la série. Il faut comprendre que le manga de 73-74 se terminait sur une fin ouverte : Cutie Honey se retrouvait dans une nouvelle situation et son cœur avait désormais un désir de vengeance contre une ennemie principale, mais cette fin ouverte n'annonçait pas une suite immédiate. C'était plutôt l'idée qu'un cycle se refermait et que l'héroïne était toujours là pour de nouvelles aventures. Le côté dramatique était étouffée par une conclusion sur les atouts érotiques de l'héroïne, il y avait toute une fin gag où les hommes couraient après Honey qui permettait de ne plus vraiment nous attendre à une suite à l'histoire. Or, non seulement le récit a été adapté à plusieurs reprises, mais il y a eu des suites, et la série de 2018 correspond donc pour les six premiers épisodes au manga de Go Nagai d'époque, et puis il y a six autres épisodes qui vont développer une suite.
Voilà pourquoi je me permets de m'arrêter après six épisodes. Même si certains passages m'ont plu pour le côté graphique ou pour certaines idées originales, l'adaptation me semble assez molle, le remaniement du scénario pose un problème de cohérence et il enlève beaucoup de sa tension à l'histoire, il la rend moins attachante. En évitant de spoiler, il faut savoir par exemple que le manga commence par la naissance de l'héroïne qui est racontée dans le deuxième épisode. La série a choisi de procéder à un épisode flashback qui vient après un premier épisode d'illustration du côté action de la série en nous plongeant au milieu d'un combat. Mais cela, ce ne serait que l'ordre du récit qui change. Ce qu'il y a, c'est que même l'histoire est différente. Dans le manga, Jill, la méchante qui dirige les opérations dans l'ombre, n'endosse pas le rôle d'une inspectrice qui s'infiltre au PCIS et devient l'amie de Cutie Honey, de Natsuko, etc. Ce que je comprends entre les lignes, c'est que cette série de 2018 n'a pas elle-même inventé ces nouvelles données, mais ces changements viennent de précédentes adaptations. D'ailleurs, en lisant le manga, dès les premiers chapitres, on a des cases qui évoquent le passage hebdomadaire de la série Cutie Honey à la télévision, et du coup j'aimerais bien voir la série d'époque diffusée en même temps que la parution des chapitres du manga en revue pour vérifier si c'est de là que viennent les différences du scénario. Sinon, cela vient des adaptations ultérieures. Mais, même si c'est intéressant de transformer la méchante Jill en personnage infiltré qui vit aux côtés de l'héroïne, il aurait fallu éviter les anomalies du scénario, puisque Jill placée à côté de Cutie Honey fomente des plans pour obliger notre héroïne à révéler à l'organisation Panther claw où elle se trouve, ce qui n'a pas vraiment de sens : Jill sait où est Cutie Honey, elle n'a qu'à le dire à ses collègues, au lieu d'imaginer des plans compliqués pour qu'elle se montre. La série, même en 2018, censure nettement le manga par ailleurs. Dans le manga, Cutie Honey se transforme en statue de bronze pour échapper à ses poursuivants. Le vieux père qui ressemble à Rigel dans Goldorak et son deuxième fils, qui ressemble à Mirza du coup, arrivent, matent la statue et la léchouillent. L'espèce de "Mirza" obsédé la léchouille d'une manière très confondante, surtout quand on songe à son très jeune âge, travers olé qui disparaît de la série. Mais il y a d'autres atténuations et le caractère érotique sulfureux du manga ne transparaît pas vraiment ici. Dans le manga, Go Nagai reconduit une bande de policiers et détectives parodiques, dont un détective en pagne qui souffre des hémorroïdes. Tout cela disparaît ou peu s'en faut, il faut connaître la série originale pour comprendre le clin d’œil du policier qui se fait déchirer son pantalon dans le premier épisode. Sans spoiler, on peut dire qu'on remarque des aménagements bizarres. Par exemple, le collègue journaliste dans le manga est blessé suite à l'autodestruction du laboratoire où fut créée Cutie Honey et on a l'intrigue qui s'ensuit à l'hôpital. Dans la série, il n'a pas été blessé à ce moment-là. Donc, on a droit à l'invention poussive d'un attentat raté qui permet alors de raconter l'intrigue de l'hôpital, mais l'enchaînement logique en souffre un peu quand on y réfléchit, car les méchants sont supposés avoir de la suite dans les idées, et là les explications sont tarabiscotées. On a aussi des choses peu expliquées qui reprennent le manga d'origine, mais qui ne le suivent pas vraiment. Le premier épisode de la série reprend une scène de braquage avec des otages au manga. Une femme otage est érotiquement lacérée par un "puppet panther" dans le manga, par une amazone panthère dans l'animé, mais dans le manga on apprend que c'est une mise en scène sur une otage qui va servir d'intermédiaire pour parler aux flics. Là, c'est juste de la barbarie un peu sommaire, même pas présentée de manière saisissante.
On perd aussi des infos du manga sur les qualités de l'héroïne, à moins que je n'ai pas fait assez attention lors du deuxième épisode. L'héroïne n'est qu'un certain nombre de fois plus forte qu'un humain normal, car son père veut qu'elle soit humaine, donc il a évité de la faire parfaite militairement, car sa perfection c'est son cœur. On a parfois du beau texte dans le manga, même parfois qui fait rire, je suis la guerrière créée avec amour par le professeur, etc. Ici, on ne l'a pas. Le premier épisode laisse attendre beaucoup avec un emploi de la rose qui n'est pas dans le manga : on voit la transformation saisissante d'une victime, mais après d'épisode en épisode on a vraiment pas quelque chose d'aussi excitant, sauf Jill et sa démarche, Jill qui se retourne et nous regarde de profil avec son œil jaune sadique. Les transformations de Cutie Honey sont traitées par-dessus la jambe, c'était déjà un peu le cas dans le manga, mais là même le truc emblématique de la fille en moto on n'admire rien du tout, on n'a pas un défilé d'images qui nous la rendent sexy et attachante.
Enfin, il y a le sixième épisode, là je vais être obligé de mettre un cache, car je vais expliquer les différences avec le manga en donnant mon opinion.


Dans le manga, l'organisation Panther claw finit par attaquer avec des montgolfières le pensionnat de jeunes filles où loge l'héroïne. Alors que le ton de l'histoire a toujours été léger et qu'il le reste même dans ces moments tragiques, on a quand même la mise à mort de toutes les filles du pensionnat. On a des gags saisissants sur les têtes coupées des enseignantes et de la surveillante au fouet. La surveillante dépasse une prof, la prof l'arrête en l'attrapant par la tête et découvre qu'elle a été décapitée, puis deux profs sont décapitées et on a des phylactères de dernières paroles après leur décapitation. Les filles moches sont toutes tuées avec les autres sans autre forme de considération. On n'a pas la mauvaise idée de leur jouer du violon et de leur trouver des qualités sur le tard au mauvais moment. Enfin, Cutie Honey demande à son amie de se rouler en boule et de ne plus bouger, elle la transforme en rocher, elle n'a plus d'énergie et elle se cache un peu plus loin. Le drame, c'est que son amie quitte le rocher, se met à courir et est confondue avec Cutie Honey, et elle se fait désintégrer. Cela se passe en quelques cases, et c'est un grand moment de bande dessinée. On vit la scène en se posant même des questions sur ce qu'il se passe comme dans la vie. On a une espèce d'horreur tranquille. C'est immense comme scène dans le manga. Là, dans la série, on a cette fille qui réfléchit en caillou, elle nous explique lourdement qu'elle va se faire passer pour Cutie Honey (alors que le manga nous laisse hésiter entre l'idée qu'elle le fait exprès et que les autres ont simplement cru que c'était Cutie Honey), elle court, la scène dure un petit peu, Cutie Honey intervient pour la sauver, mais la virago immense, la meneuse des filles moches, qui pour on ne sait quelle raison n'est pas morte, malgré ce qu'on a vu, vient s'interposer et se bat contre l'ennemie en se faisant passer pour Cutie Honey avec l'emploi inespéré d'un rayon magique, elle se fait bien sûr désintégrer. Mais, notre héroïne a récupéré, sa meilleure amie est sauvée, le happy end partiel est assuré et on nous propose pour pathos de verser une petite larme sur la virago qui n'était pas mauvaise au fond (on le savait déjà par un épisode précédent), qui certes avait un physique ingrat mais qui était dévouée jusqu'à sacrifier sa vie. M'enfin, c'est nul, c'est indigeste, c'est mille fois vu, ça dure dix plombes sans fournir d'émotions. Cutie Honey était censée se retrouver seule, se reconstruire en ayant tout perdu. Sa meilleure amie était sa seule amie du pensionnat, si elle ne meurt pas, la fin entre le manga et celle de cette moitié de la série n'ont rien à voir. Les implications ne sont pas les mêmes. Tout le côté drame et philosophie de la vie est balayé. Après, je pense que le septième épisode va encore raconter un bout du manga, et on verra le sort de Jill, car là encore il y a une différence que j'attends de voir. Dans le manga, la vraie identité de Jill est révélée et c'est un truc scotchant, c'est une vraie panthère devenue un démon femme. Dans la série, l'inspectrice française Genet est Jill, mais Jill n'est pas claire : elle veut détruire son clan et on se demande si ce ne sera pas autre chose qu'une panthère à la fin, puis dans le manga elle ne survit pas longtemps à l'amie de Cutie Honey. Je vais de ce pas me mater le septième épisode.
En tout cas, on comprendra dans ces conditions que les cinq étoiles sont pour le reliquat du travail de Go Nagai, avec à la limite des effets graphiques qui m'ont plu, notamment Jill ou la première transformation de panther claw, mais l'animé est fait stupidement. Je n'aime pas sa musique non plus, à l'exception bien sûr du générique d'ouverture. Les bruits qui accompagnent les catch eyes ne sont pas très séduisants non plus.


Voilà, bien obligé d'éviter de spoiler dans la partie sans cache, mais ceux qui liront la partie "spoiler" ils auront une explication très claire sur le pourquoi d'une note aussi faible pour une adaptation d'une oeuvre culte de Go Nagai.


Une critique du manga lui-même est prévue, je m'accorde quelques jours.
Mais, maintenant, j'ai continué à regarder la suite.
En fait, les six premiers épisodes correspondent à l'essentiel du manga avec des modifications, mais il y a encore quelques petits trucs en plus dans le manga et ma mémoire n'a pas réagi très rapidement, quelques petits chapitres donc, mais le dessin animé s'éloigne définitivement du manga, après une scène érotico-comique du début de septième épisode.


Après la mort de Natsuko, on a un passage comique où l'héroïne emménage chez le père et le frère du journaliste, ce qui donne lieu à un chapitre du bain très appuyé, atténué dans le manga, car sans arrêt les hommes viennent la regarder essayer d'en sortir, y compris le journaliste. Puis, oui, il y a tout un arc final avec une statue dorée qui permet à Cutie Honey de tuer définitivement Jill, il reste la grande patronne de l'organisation Panther Zora, mais comme elle avait laissé faire Jill le manga s'arrête sans problème sur la fin de Jill dont la vraie nature de panthère permet sans doute aussi à l'héroïne de mieux admettre la cruauté de la vie et de ce qu'il s'est passé au pensionnat. Puis, on a les dernières pages où les hommes courent après une héroïne qui n'arrive plus à créer des habits quand elle se transforme et on a une transcription sur les cases de la dernière page d'une chanson coquine, sans doute celles du générique de l'animé d'époque, et ça finit en médaillon kawai.
Or, l'animé, des épisodes 7 à 9 maintient Jill en vie et crée une action qui n'est pas dans le manga. Toutefois, Jill tend un piège à Natsuko et cette fois réussit à la tuer. C'est moins bien que la scène surprenante du manga et ça retombe dans pas mal de trucs rebattus, mais le côté jeu sadique où Jill torture à la fois Natsuko, Honey et plus paradoxalement Tarantula panther dont le fonds humain se révèle fait que c'est quand même du bon. Il y a des dessins qui me plaisent bien dans cette série, donc je ne peux pas lui mettre moins que la moyenne, puis l'histoire je m'y intéresse, donc ça marche quand même, même si ce n'est pas à la hauteur de Go Nagai.


Voilà, j'ai fini les douze épisodes de la série, donc les six derniers épisodes sont une suite au-delà du manga, même si des éléments dans le septième et le neuvième épisodes reprennent un peu ce qu'il se passe dans les derniers chapitres, voire y font une rapide allusion en passant (la statue dorée). Le dernier épisode est intéressant pour la symbolique de certaines images, mais c'est malheureusement un what the fuck généralisé où le combat est pensé comme dans Les Chevaliers du zodiaque, l'héroïne se fait éclater jusqu'à ce que la raison pour laquelle elle se bat la rende plus forte. Mais le what the fuck est encore ailleurs...

davidson
5
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Créée

le 9 nov. 2019

Critique lue 813 fois

davidson

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