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Edit : J'ai visionné la partie 4 de la série, et autant les premières saisons laissaient entrevoir une possible amélioration, autant je peux désormais l'affirmer : cette série est ultra-mysogine, sexiste, transphobe, grossophobe. Je ne la recommande pas.


La quatrième partie de la fameuse série espagnole sortant dans quelques jours je me mise à re-visionner (je dirais même re-re-visionner) la troisième partie de « la Casa de Papel », qui relate la prise d'otages fictive dans la Maison royale de la Monnaie d'Espagne.


Je ne vais pas y aller par quatre chemins : cette série est bien faite, et surtout trop addictive pour qu’on puisse la lâcher une fois qu’on entre dans l’univers de la bande espagnole de voleur.euses. Je ne suis pas fan des films de braquage, je trouve toujours cela redondant et prévisible. Or, et c’est sûrement ce qui en fait tout son succès, « La casa de Papel » apporte un souffle nouveau au concept de braquage, et l’étale sur plusieurs saisons d’une série bien pensée.


Avant de commencer la première partie, je me demandais comment je pourrais m’attacher à un groupe de personnages armé.es, mais très vite je me suis laissée entraîner dans l’univers haletant de « La Casa de Papel ». Même si le premier épisode n’est pas des plus réussis, on se demande très vite où cela va nous mener, et les prises de position sociales de la bande détachent cette série du genre cinématographique classique. Les personnages aux noms de ville incarnent avec brio l’opposition à un système capitaliste qui créé et renforce des inégalités, et cette propension grandit au fil des épisodes ; les téléspectateur.trices deviennent peu à peu la population représentée dans la série. Ainsi, en visionnant cette série, on est projeté.e au cœur d’une action à la fois sociale et individualiste (les revendications sont collectives, mais l’intérêt des personnages est personnel), et c’est comme si on était face à la « Casa de la Moneda », comme si les masques de Dalí s’adressaient à nous, derrière nos écrans. Je pense que c’est cela qui fait le succès d’une telle série.


Lorsque la troisième partie est sortie, je l’ai commencée avec hâte, mais aussi avec beaucoup de méfiance : je trouvais que la fin de la deuxième partie était brillante, réussie et jouissive. Je ne m’attendais même pas à une troisième partie. J’ai donc eu peur d’un « trop », que le créateur Alex Pina ait eu les yeux plus gros que le ventre et ne se laisse tenter par les tentacules du bénéfice. Il est très rare que les suites surpassent leurs antécédents, et pourtant je pense pouvoir l’affirmer : la troisième partie a réussi à aller plus loin que les deux premières, tout en conservant son esprit.
Je ne pensais pas assister de nouveau à une prise d’otages, et encore moins à une idée encore plus folle que celle d’imprimer ses propres billets de banque ! Mais finalement, c’est ce qu’on attendait en visionnant une partie de « La Casa de Papel » : si on avait eu la vie des personnages sur leur île déserte chacun.e de leur côté, on aurait été bien déçu.es !


Pour moi, la réussite complète de la série est son rythme, donné à la fois par les rebondissements d’une folle aventure, et par la musique, très prenante. Je m’apprête d’ailleurs à réserver ma journée du samedi au visionnage de la quatrième partie, car je sais que je serai incapable de stopper son visionnage. La justesse des personnes est également très attachante, même si certains sont odieux.


Et en ce sens apparaît pour moi le plus gros défaut de la série : trop de répliques machistes et homophobes. C’est vraiment dommage, car la série aurait pu être parfaite (il faut croire que je ne suis pas le public visé). Alors certes, il y a des personnages queer et féministes, mais leurs répliques ne font pas le poids face aux multiplications des propos machistes, surtout dans les deux premières parties. La troisième partie est moins pire car elle donne beaucoup plus de pouvoir à Nairobi, par exemple, mais il faut admettre qu’elle est bien seule dans une marée d’hommes mysogines : les autres personnages féminins la soutiennent, mais pas aussi fermement. Je regrette aussi que parmi les nouveaux personnages, il n’y ait aucune femme. Enfin si, pardon, il y a Alicia, mais c’est une psychopathe qui ne fait pas partie de la bande, je préfère ne pas la compter comme élément fort contre les violences sexistes perpétuées par la bande. Par ailleurs, j’ai été ravie de retrouver Najwa Nimri dans ce rôle, que j’avais découverte dans la série « Vis-a-vis ».


J’ai également regretté que le personnage de Raquel Murillo n’ait pas été plus travaillé dans la troisième partie, alors qu’il y avait tellement à faire. Très vite, elle est passée de « mon personnage préféré » à « ah oui, tiens, elle existe ». Elle est clairement au fond de chaque scène, et n’existe qu’à travers le Professeur. C’est tellement dommage ! J’aurais préféré que son personnage soit plus travaillé, et que Berlin n’apparaisse pas autant dans la troisième partie.


J’aimerais aussi saluer la qualité du casting, même s’il est dommage qu’il n’y ait aucune personne racisée dans le scénario (série de 2018 !). On aime ou on n’aime pas les personnages, mais il faut admettre qu’ielles sont brillamment interprété.es. Personnellement, je haïs Berlin et Denver qui incarnent le machisme à l’état pur, mais aussi Tokio, qui est assez niaise et complètement immature et égoïste. En revanche, comment ne pas tomber en amour avec le Professeur, Nairobi ou même Angel ? Les personnages sont délicatement travaillés, et chacun.e a des milliers d’éléments attachants.


Je ne pouvais pas écrire une critique sur cette série sans évoquer son gros point faible, en tant que féministe. Toutefois, si vous avez envie d’une série poignante, parfaitement réalisée et montée et qui vous fera vivre de grandes émotions, je vous la recommande chaudement. En conclusion, si vous ne l’avez pas encore visionnée, je vous dirais « foncez averti.es ! »

SoyAne
7
Écrit par

Créée

le 29 mars 2020

Critique lue 152 fois

SoyAne

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